ven 26 avril 2024 - 08:04

Le manifeste de la responsabilité universelle

A la demande du Dalaï-lama et dans l’esprit de ses enseignements, ce texte a été dirigé par Sofia Stril-Rever, revu et édité avec le vénérable Samdhong Rimpoché, le professeur Robert Thurman, président de Tibet House et professeur titulaire de la chaire Je Tsongkhapa de tibétologie de l’université de Columbia de New-york, le professeur Eric Etzkin, directeur de l’Héritage immuable à Johanessburg, biographe du mahatma Gandhi.

Cette version a été finalisée avec le Dalaï-lama, à Oxford le 15 septembre 2015.

Trois prises de conscience et onze engagements de vie

Première prise de conscience : paix intérieure et réalité partagée de la vie

Je suis né-e sur cette Terre, enfant de la vie, au sein du cosmos.

Mes codes génétiques incorporent les messages de l’univers. Je suis relié-e à tous les vivants dan la réalité partagée de la vie.

La même énergie qui fait battre mon cœur entraîne aussi la Terre et les corps célestes. La respiration, mouvement source de la vie, unit chacun de mes souffles au souffle de tous les êtres et au grand souffle de l’univers.

La sagesse première des peuples d’autrefois connaissait le secret de la paix entre les hommes et le monde. Depuis la Révolution industrielle, l’homme a oublié le secret de la paix. Son cœur endurci est parti en guerre contre lui-même, en guerre contre la vie. Le poison de son esprit a empoisonné la terre nourricière, infecté les sources des fleuves, acidifié les océans, pollué l’atmosphère. L’air de la planète surchauffée est devenue irrespirable dans les mégalopoles des cinq continents, dont les lendemains semblent voués au désastre de grandes souffrances.

Mais, aujourd’hui, l’homme des temps modernes recherche la voie de la douceur, de la paix et de la guérison intérieure. La physique contemporaine, à l’instar des philosophies de l’âge axial, expose les principes de l’interdépendance fondamentale, au niveau de la matière, mais aussi sur les plans subtiles de l’esprit et des émotions. Je réalise que chacune de mes actions, de mes paroles et de mes pensées dépose des empreintes de conscience qui traversent l’espace et le temps. Mes actes hostiles viennent grossir les vagues de haine destructrice qui agitent l’océan des douleurs du monde. Mes actes d’amour bienveillant voyagent comme des ondes de joie aux confins de l’univers.

Je prends conscience que le bien-être de tous les vivants dépend de l’équilibre des écosystèmes, eux-mêmes dépendant de la paix dans le cœur des hommes et de l’esprit de justice dans les sociétés humaines, où nul ne doit être laissé pour compte, mutilé par la faim, la pauvreté et le dénuement. Dans un esprit d’équanimité, libre de partialité, d’attachement et de haine, je contribue à maintenir et rétablir l’harmonie de la vie.


Vivre la paix et la guérison intérieure dans chacun de mes gestes, dédiés au bien de toutes les existences, humaines et non humaines, est un grand appel à être vivant, dans la joie de l’amour universel qui est la vie de la vie.

Deuxième prise de conscience : notre humanité intérieure

Je suis né-e sur cette Terre, enfant de la vie, au sein de l’humanité, ma famille.

Des liens irrévocables m’unissent à mes 7 milliards de frères et sœurs ainsi qu’à tous les êtres non humains, qui partagent l’aventure de la vie. Je prends conscience que ce qui nous rapproche est plus fort que ce qui nous sépare et, trop souvent nous divise.

Quelles que soient ma couleur de peau, ma nationalité, ma religion, mes ressources et mes convictions personnelles, je suis en essence un être humain pareil à tous les autres, partageant le même désir d’être heureux, d’aimer et d’être aimé. En me fondant sur mon humanité intérieure, je reconnais qu’aujourd’hui je ne peux vivre coupé-e du monde. Des évènements survenus dans une région lointaine m’affectent et affectent aussi toute la planète. Chaque problème local a une incidence globale qui transcende les frontières.

Je prends conscience que, dans un contexte d’interdépendance démultipliée par la mondialisation et la technologie, l’épanouissement des sociétés humaines et la protection de l’environnement se fondent, avant tout, sur l’entraide. Seul l’altruisme me motive à agir pour le bien de tous les vivants, en assumant ma responsabilité universelle.

Paix intérieure, amour et compassion, n’expriment pas seulement un idéal noble, mais sont aussi une solution pragmatique, au sein de la nouvelle réalité, garantissant l’intérêt général contre la déshérence du lien social et le délitement des solidarités.

La nécessité de coopérer m’amène à reconnaître que la base la plus sûre d’un développement durable du monde repose sur ma pratique individuelle et partagée de la paix intérieure, de l’amour et de la compassion.

Je ré-enchante ainsi l’espérance et la confiance dans la communauté du destin de l’humanité.

Troisième prise de conscience : satyagraha – la force de la vérité

Je suis né-e sur cette Terre, enfant de la vie, au sein de la grande paix universelle.

Mais les livres d’histoire, comme l’actualité, rapportent une succession de guerres, de conflits, de catastrophes et de faits divers violents. La tentation est grande de conclure que le mal est plus fort que le bien. Pourtant, quand je calme l’agitation de mon mental et que je regarde profondément en mon esprit, je deviens la paix. Je touche ma vérité, aimante et connaissante. Je prends conscience de la nécessité d’entraîner non seulement ma logique rationnelle mais aussi toutes les autres facultés remarquables de mon esprit, telles que l’amour, la compassion, la générosité et le pardon.

Je prends conscience que la puissance du mal n’est pas fondée et qu’elle peut être dépassée. La haine est une illusion, un effet de l’ignorance. Ainsi relié-e à ma vraie nature, je découvre l’immense générosité de la vie et ses pouvoirs. La réalité profonde et inéluctable de la bonté me révèle que satyagraha, la force de la vérité, est irréductible quand elle se manifeste dans l’amour.

A l’ère d’internet et de la mondialisation, quand je me sens manipulé-e et instrumentalisé-e par la culture techno-économique, je prends conscience qu’il me faut incarner une sagesse de la responsabilité universelle, basée sur la force de la vérité et de l’amour, appelée satyagraha par le mahatma Gandhi.

Diversement traduit par « force de la vérité » ou « force d’âme », satyagraha est l’arme de mon combat non violent contre l’injustice. Car, dès que la vérité passe à travers moi pour s’exprimer, je suis invincible. Satyagraha exige que j’accepte la souffrance et le sacrifice, sans recourir à la violence, dans ma lutte contre toute forme d’exploitation et d’agression d’êtres humains ou non humains.

En vivant satyagraha au quotidien, je deviens, parmi d’autres et avec d’autres, artisan de la paix, de justice et de vérité. Citoyen-ne du monde, j’assume un nouveau lien civique de responsabilité universelle.

Sans forcer ni culpabiliser personne dans le respect du pluralisme, c’est par la force de l’exemplarité que j’inspire à d’autres la détermination d’assumer leur responsabilité universelle. De sorte que les générations futures verront, un jour, advenir ce monde auquel j’aspire, mais que je ne verrais peut-être pas.

A la mesure de mes moyens, je m’efforce donc de construire avec constance, dans un esprit de paix et d’amour, la nouvelle réalité d’une Terre Fraternelle.

Ida Radogowski

Ida a créé avec d’autres personnes LA LETTRE DES DEUX VOIES pour favoriser des échanges et des liens entre Francs-Maçon (nes) qui sont déjà dans une démarche bouddhiste ou qui souhaitent connaître un peu mieux le bouddhisme.

La lettre est trimestrielle et gratuite, on peut s’y inscrire en précisant son Ob., sa L. et la Ville de résidence à ce mail : lesdeuxvoies@orange.fr

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Ida Radogowski
Ida Radogowskihttps://forms.gle/jqqZUgXG4LN6vv9aA
Pratiquante bouddhiste depuis plus d’une trentaine d’années, continue de suivre régulièrement des enseignements auprès de maîtres du bouddhisme Theravada-moines de la forêt (bouddhisme de l’Asie du sud-est) et pratique la méditation régulièrement. Ida a pratiqué pendant longtemps le hatha-yoga, s’est imprégnée d’une certaine philosophie hindouiste moderne (Swami Prajnanpad et Krischnamurti). Je guide depuis plusieurs années des séances de yoga-nidra (yoga relaxation) auprès de différents groupes. Ses thèmes de réflexion sont : l’éthique – le travail sur soi, la cohérence et rassembler ce qui est épars. Elle travaille dans le milieu du spectacle vivant depuis de nombreuses années en qualité d’administratrice de compagnies de théâtre et d’ensembles musicaux (gestion-administration). Ida a crée avec d’autres personnes LA LETTRE DES DEUX VOIES pour favoriser des échanges et des liens entre Francs-Maçons(nes) qui sont déjà dans une démarche bouddhiste ou qui souhaite connaître un peu mieux le bouddhisme. La lettre est trimestrielle et gratuite, on peut s’y inscrire en précisant son Ob., sa L. et la Ville de résidence à ce mail : lesdeuxvoies@orange.fr

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