(Avec modération, le pastis, merci).
Les athées sont désormais majoritaires. Mais cela ne signifie pas forcément des comportements plus rationnels ou raisonnés. En fait, l’éthique et le théisme sont deux choses très différentes, sans réelle relation.
Ca y est, le monde a changé ! ChampomyTM pour tout le monde ! La raison l’a emporté sur l’obscurantisme ! Rideau, je vais pouvoir enfin prendre ma retraite d’écrivain et me consacrer à un projet qui me tient à coeur : postuler pour écrire des aventures de l’Exécuteur ou de SAS ! Certains se demanderont le pourquoi de tant de joie. Hé bien, un récent sondage a mis en valeur le fait que plus de la moitié de nos concitoyens se déclaraient désormais athées ! Autrement dit, on en a presque fini avec les diktats religieux, les requêtes d’avantages ou d’exceptions pour raisons confessionnelles et les tentatives d’intégristes religieux de vouloir réguler la société selon leurs dogmes et leurs croyances. On va enfin pouvoir se construire une vraie éthique, loin des fadaises et autres niaiseries que nous servent les religieux, pour qui la divinité est la seule vérité. Enfin, je vais pouvoir me sentir majoritaire et faire taire ceux qui me disent que comme je suis athée, je ne peux pas avoir d’éthique. Il est vrai qu’il est plus éthique de s’en référer à des commandements religieux qui incitent à annihiler l’existence de l’Autre soit en le convertissant, soit en le tuant… Dois-je aussi rappeler que les athées ont fait moins de dégâts que les religieux de tout bord ? Alors maintenant que nous sommes majoritaires, mesdames et messieurs les religieux, bigots, tartuffes et autres Savonarole, laissez-nous tranquilles. Vous avez le droit de croire en ce que vous voulez, mais vos croyances, à l’instar de votre sexualité, soyez aimable de bien vouloir la laisser chez vous. L’intime doit le rester, sous peine de devenir obscène.
Quant à ceux qui reprocheraient à un athée de ne pas avoir d’éthique, je vous invite à réfléchir à l’athéisme, dont il existe un certain nombre de déclinaisons : l’immanence (le Dieu de Spinoza), le matérialisme de Diderot et D’Holbach, l’existentialisme de Sartre, le déisme de Voltaire, l’indifférentisme etc. Et ces positions sont toutes aussi éthiques que d’autres. La confusion vient de l’apparente similitude de sens entre éthique et morale. Or, l’éthique se réfère à des valeurs et un questionnement interne, alors que la morale se réfère à un commandement externe, relatif à une idée ou un objet à valeur transcendantale.
En fait, je pense que le vrai problème que pose la transcendance, outre la croyance en une hypothétique entité supérieure, c’est qu’elle invite à placer l’Homme au dessus de toute chose. « L’Homme est la mesure de toute chose » nous dit Pic de la Mirandole. Certes. Mais à se croire au dessus de la nature, l’Homme se livre à la destruction du monde, voire à sa propre destruction. Sans compter qu’il faut aussi voir de quel Homme on parle… En fait, j’aimerais vous proposer une autre vision de l’Homme, inspirée des arts martiaux. L’Homme n’est pas au dessus de la création, il en fait partie. A ce titre, il y est intriqué. Or, en étant partie intégrante de la création, l’Homme se doit de la préserver. La transcendance amène à commettre un hubris. En ce sens, la référence à un absolu n’est pas automatiquement éthique, en dépit de la revendication de morale qui en est faite.
Un autre problème qui se pose avec les religieux et les religions, c’est le privilège sous couvert d’appartenance religieuse. Ainsi, si on suit telle ou telle religion, on devrait avoir des droits (et la société devrait avoir des devoirs) liés à la confession : pas d’examens le jour de telle ou telle fête religieuse, conditions de travail spéciales, bref, des ruptures d’égalité pour raisons confessionnelles. A ce propos, j’ai été choqué par le religieux qui affirmait que le secret de la confession chez les catholiques était supérieur aux lois de la République, dans la polémique qui a suivi le rapport.
Non, non, trois fois non.
Depuis la loi de 1905 portant sur la séparation de l’Église et de l’État, aucune, absolument aucune injonction religieuse ne prévaut sur la loi. Tous les secrets tombent face à la loi en cas de crime ou de délit. Et la non-dénonciation de crime est un délit (article 434-1 du Code Pénal). Quid du secret d’appartenance maçonnique, alors ? Dans la mesure où nous nous engageons par serment à respecter les lois de la République, le respect de la loi prévaut. Il en est de même pour le secret professionnel ou le secret médical, dont la rupture est elle aussi encadrée par le Code de Procédure Pénale. Quand un prélat ou un simple adepte d’une religion quelconque affirme que son commandement religieux prévaut sur la loi, il commet une faute et ne fait que se placer hors-la-loi, sous ses dehors de vierge effarouchée ou de gardien du temple de la vertu.
Il est réellement dommage que certains n’aient pas encore compris que la croyance ou l’appartenance à une communauté n’étaient ni un argument éthique, ni un argument juridique. Personne ne doit être au dessus de la loi. Soit dit en passant, imposer l’omerta, la loi du silence, faire garder le secret d’un crime commis dont on a été témoin ou confesseur sous peine des pires tourments, ça ressemble un peu à des méthodes de maffiosi ou de criminels, non ? D’ailleurs, les maffieux en tout genre, immortalisés à l’écran par le Corleone de Francis Ford Coppola sont de très bon paroissiens… Coïncidence ? Et il y en a encore pour dire que si on n’a pas de religion ou de transcendance, on n’a pas d’éthique…
Finalement, il reste encore beaucoup de travail. Et comme les Frères n’aspirent pas au repos, je ne vais pas prendre ma retraite de sitôt, moi. En attendant, pour ceux que ces questions d’éthique et athéisme intéressent, je vous invite à lire mon nouvel opus, Ethique et athéisme – Construction d’une morale sans dieux, disponible aux Editions Numérilivre ou chez votre libraire. Et si vous êtes à Lille le dimanche 17 octobre 2021, je vous invite à me rencontrer au Salon Masonica, sur le stand des Editions Numérilivre.
D’ici là, je vous embrasse.