La franc-maçonnerie et l’image entretiennent des rapports étroits, et ce depuis l’origine. Qu’est-ce donc que le tableau de loge si ce n’est un enseignement visuel et graphique, une transmission par l’image ?
À travers cette modeste rubrique j’envisage d’explorer avec vous les liens tissés entre l’image et surtout l’image animée, et la maçonnerie, liens parfois sérieux, parfois cocasses, souvent inattendus.
Commençons cette rubrique par « du lourd » : rien moins qu’un spot publicitaire destiné à attirer les impétrants vers la franc-maçonnerie. Voilà bien une problématique qui unit toutes les loges du monde : comment expliquer à des « profanes » ce que par définition on ne peut pas trop leur montrer ? Comment traduire le « mystère de la chose », sans la dévoiler ?
Utiliser un spot pour parler à des profanes serait un peu suspect au pays de Molière, mais beaucoup moins dans les contrées proches d’Hollywood. Le fait est que ce spot est d’une superbe facture sur le plan technique ; j’entends par là le soin apporté à chaque plan, à la lumière, au montage et quelques petites trouvailles visuelles comme l’insistance sur les pas, sur la dynamique de la marche. Premier plan : des pieds nus sur le carrelage d’une piscine ; et quelques plans plus loin d’autres pas qui gravissent un escalier, passant de la Beauté à la Force puis la Sagesse ; ce sera le seul plan du film nous dévoilant partiellement une cérémonie : celle du second degré « à l’anglaise ».
Ce plan est également l’axe central du film ; avant, des hommes cherchent à donner du sens à leur vie, après ils en trouvent : c’est l’entrée dans une fraternité chaleureuse qui conjugue de vigoureux shake-hands avec un univers de club anglais, comme le montrent les quatre plans autour d’un billard. Dans cette fraternité d’hommes, les différentes ethnies du melting pot américain sont bien présentes, regroupées autour d’une notion si difficile à traduire dans notre langue française : brotherly love. Amour fraternel, plus fort que l’amitié, entre l’agapé grec et le caritas latin, lequel se traduit également par « charité » ; amour fraternel, charité fraternelle… derrière ces notions apparaît le point fort de la maçonnerie américaine, centré autour de la bienfaisance et d’une certaine éthique du don et du partage.
On peut bien entendu critiquer cette vision marketée de la franc-maçonnerie. Déjà le fait que tous ces maçons semblent être des mannequins Classe 1 de chez Élite, évoluant dans des intérieurs coquets munis de robots ménagers dernier cri… On notera aussi la grande absente : pas de place pour les femmes ou les sœurs dans cet univers très typé « mec ». Mais j’avoue ressentir une émotion certaine à la vision de ce film, comme si le commanditaire (qui est un des systèmes de hauts grades du nord des USA : la Northen Masonic Juridiction) avait réussi à faire passer un petit quelque chose de la chose maçonnique en démystifiant sans pour autant démythifier.
Le symbolisme est d’ailleurs loin d’être absent de cette réalisation. Le plongeon qui ouvre le film n’est-il pas, entre autres choses, une superbe métaphore de l’initiation ? C’est en tout cas ce que je me plais à y voir.
La Traduction à la volée du texte du film (et un grand merci à notre S. Judith Bullerwell, qui a bien voulu vérifier ma traduction et m’apporter ses idées !) est la suivante :
“Comment un homme bien peut-il devenir encore meilleur ? Par l’entraînement ? Ou en gravissant les échelons de son entreprise ? En changeant son régime, ou en changeant son look ? En parcourant le monde ou en restant parfaitement immobile ?
Depuis 300 ans nous aidons les hommes bien à devenir encore meilleurs, dans le cadre d’un groupe spécifique, où ils jurent de mener une vie d’intégrité, de service, d’amour fraternelle. Un engagement envers leurs frères, envers leurs familles, envers notre noble cause.
En fin de compte nous ne faisons pas que rendre les hommes meilleurs, nous en faisons des Maçons…”
Merci de cette précision ! Cette loge Art et Lumière est mixte est l’une des S fut initiée à l’OITAR et longtemps en double appartenance. Elle en fut également vénérable. Je les salue chaleureusement également !
…filmé en partie au temple de Los Angeles, à Santa Monica.
un coucou fraternel aux sœurs et frères de Art et Lumières ( GODF )