Le plaisir étant addictif, les réseaux sociaux nous ont gobés facilement, en flattant notre narcissisme et notre propension aux indignations vertueuses. Résistons.
Dans notre devise, la liberté vient d’abord. On a beau parler abondamment d’égalité, et un peu de fraternité, dans nos pays la liberté est profondément ancrée dans nos esprits et considérée comme un acquis définitif.
Et il s’agit là de liberté individuelle , même si au collectivisme d’antan s’est substituée une certaine vogue des communautés . Jeunes, nous avons pour la plupart bravé quelques interdits parentaux et goûté la petite ivresse de la transgression ; certains d’entre nous ont continué à la rechercher : une drogue commence toujours par séduire. Les années post-68 ont aussi entraîné à la consommation de drogues plus physiques, avec les conséquences que l’on sait.
Le pendant de la liberté est donc une dépendance au plaisir, c’est-à-dire une perte de liberté par recherche compulsive de ce plaisir, recherche qui peut devenir de plus en plus douloureuse s’il y a accoutumance.
Les années actuelles, déjà avant l’avènement des outils informatiques, avaient vu un glissement progressif des outils de communication vers des modes plus visuels : à témoin, le succès des bandes dessinées. Mais l’ordinateur devint personnel, comme son successeur le smartphone, aussi c’est l’égo qui s’en est trouvé tout flatté : je vais lancer mon blog, publier mes billets d’humeur ( ben quoi ? ) , et surtout envoyer partout mes selfies , pour lesquels je réserverai mes plus beaux sourires .
Une étude américaine a chiffré qu’en moyenne un individu exerce plus de 2600 pressions sur son smartphone par jour. N’est ce pas merveilleux que nous soyons si intéressés par la marche du monde ? Hélas, l’explication est ailleurs : les réseaux sociaux sont conçus pour que nous y devenions accro : chaque like, chaque commentaire, même négatif, nous crée un petit shoot de dopamine, qui nous conditionnera à revenir et revenir encore.
C’est pour y parvenir que les algorithmes s’évertuent à ne nous présenter que ce qui peut nous provoquer une réaction émotionnelle . Premier danger en passant : nous croyons avoir une fenêtre ouverte sur le monde, mais en réalité la fenêtre ne nous montre que ce qui sert à maintenir notre addiction.
Mauvaise nouvelle : l’addiction est le mieux renforcée lorsque le pic émotionnel est intense, et qu’est ce qui crée les pics les plus intenses, suivis d’actions ( « engagement » selon la terminologie psychologique ) ? La rage et l’indignation.
Colère et indignation sont nommés « affects narcissiques par excellence » ; ils correspondent bien à l’époque.
Les actions rapides sont, entre autres, le partage immédiat ou la signature de pétitions sans réfléchir : bonjour fake news, complotisme, haine, populisme .
Et nous les francs-maçons dans tout ça ? Bon, une partie a renoncé à ces outils récents, échappe donc à leurs inconvénients et risques, mais comprend de moins en moins la marche du monde actuel. Pourquoi pas, si c’est un choix conscient . Toutefois, ils s’aventurent parfois sur Facebook, et sont alors estomaqués lorsqu’en s’inscrivant ils se voient immédiatement proposer comme « amis » pleins de frères ou sœurs de leur atelier.
Les autres, ceux qui souhaitent « rester dans le coup », se verront proposer des tas d’infos émaillées de liberté, égalité, fraternité, initiation, symbolisme, et tous les mots-clés associés à notre ordre : c’est-y pas un beau bac à sable, ça ?
Vous l’aurez compris, notre boulot est
- de ne pas nous laisser piéger ( en particulier, ne plus nous contenter de ce que le système algorithmique propose, et même nous forcer à aller voir ce que le système ne propose pas, avant de nous forger une opinion personnelle fondée sur des faits ),
- de rester présents dans la cité,
- les yeux ouverts et prêts à regarder la réalité en face ( après recoupement des infos ),
- la truffe humide pour flairer le non-dit,
- le cerveau alerte et l’esprit ouvert pour affiner notre vision avec nos frères et sœurs,
- avant d’agir dans la société, cœur et esprit alignés, en toute exemplarité.
Bien d’accord, Coyote, pour éviter de jeter le bébé culturel avec l’eau du bain numérique !
Toutefois, il existe bel et bien des signaux inquiétants, qu’il faut traiter.
Il a été mesuré que le représentant type de la génération ” écran tactile” a une durée de concentration de 9 secondes, soit seulement une seconde de plus que le poisson rouge dont nous nous gaussons allègrement ( référence : “la civilisation du poisson rouge”, de Bruno Patino ).
Salut Patrick, sympa très accrocheur le titre et j’ai bien aimé le style d’écriture de l’article.
Mon apport serait de dire qu’un franc-maçon se doit de cultiver le doute. Et que ces réactions épidermiques qu’il ressent à l’encontre des réseaux sociaux… devrait lui mettre la puce à l’oreille sur ses processus interne qui refusent cette technologie… repartir en introspection pour se demander pourquoi.
Car après tout, les réseaux sociaux, ce n’est qu’un outil, inerte, non-humain et pas mal intentionné de Nature. Il est programmé, il y a un Algorithme… mais cela constitue une caractéristique à prendre en compte. Sans plus.
Un outil n’est pas mauvais en soi, c’est l’utilisation que l’on en fait qui compte. C’est ce même outil qui actuellement renversé des dictatures, permet la résistance et l’émancipation dans certaines parties du monde… Le franc-maçon dans tout ça ?
Il peut favoriser ces technologies, accompagner sa compréhension et surtout bosser sur lui-même ^^