L’anthropocentrisme
Un seigneur
J’irai plus loin, dans notre héritage génétique. Pour l’instant, supposons son expression collective. Ce qui est déjà un germe viral. Il est maintenant admis par quelques-uns dont je fais partie, n’en veulent les climato-sceptiques, que la santé déclinante du système socio-planétaire est la conséquence de la nature animale, instinctuelle de l’Homme. En effet elle engendre des modifications si majeures de son biotope que certains n’hésitent plus à nommer notre très courte époque, l’anthropocène. Comme si quelques siècles étaient en train d’accélérer un changement radical, au lieu des millions d’années usuelles de l’évolution de la Terre. Ne craignons pas de déchoir et, en sautant de notre piédestal imaginaire, regardons-nous au fond des yeux. Si nous sommes des « saigneurs » c’est parce que nous sommes les plus grands prédateurs actuels et, sans hésitation, de tous les temps de notre existence. Il y a six millions d’années, la branche des hominidés pris sa singularité dans l’arbre des primates. Et le sapiens se différencia, il y a 315 000 ans. Nus, peu velus, courant médiocrement, incapables de grimper aux arbres, nous étions alors la risée de la nature, en proie éventuelle de crocs gourmands. Et puis, la ménopause en frein de la prolifération, la vieillesse avec une peau humaine qui se ride, s’amincit et perd son élasticité avec l’âge. Je n’aurais pas parié sur mes ancêtres. J’aurais eu grand tort. Car notre couronnement qui fit de nous des seigneurs et qui nous persuada que nous l’étions et le sommes encore, brilla de capacités rutilantes. Et caractéristiques à notre espèce. Je les rappelle, en grand merci à Wikipédia : la complexité de nos relations sociales mais je ne suis pas sûr que nous soyons les seuls, le langage, l’apprentissage, dont je ne suis pas si sûr non plus, les outils mais à voir, les vêtements, la maîtrise du feu, la domestication, et cette si bruyante faculté, la cognition, grâce à laquelle nous montons à l’abstraction, l’introspection, la spiritualité… Bref la conscience et ce que les Anciens appelaient la raison. Des dizaines de milliers de page des philosophes de toutes époques nous confortent dans notre gratifiante auto-béatitude. Oui, nous sommes capables de raison, de sagesse et d’échapper à notre destin. Pourtant, on le sait, une autre chanson est audible, et ce, depuis toujours. En fait, nos inconscients feraient, en nous, la loi et la circulation. Sans attendre l’inévitable Sigmund, Denis Diderot asséna cette phrase stupéfiante, surtout au fameux Siècle des Lumières : « Il y a un peu de testicule au fond de nos sentiments les plus sublimes et de notre tendresse la plus épurée » Il ne se racontait pas d’histoire !
Comment ne pas se croire un seigneur qui règne sur l’univers et lui-même ? Les réalisations tangibles comme les villes, les activités économiques, nos organisations constamment pyramidales, nos œuvres artistiques… coulent comme du miel en notre for. Nous sommes oints, en respiration profonde, par les saintes huiles de cette grandeur qui semble venue du ciel. Les religions se sont emparées de cet anthropocentrisme, comme je l’ai écrit plus haut. Impossible de remettre notre seigneurie en question, pour l’immense majorité. Et aujourd’hui, encore de façon criante. Sourire quand nous évoquons « notre » Terre, « notre » environnement, bref nos fiefs et nos possessions. Pas étonnant que plusieurs courants spirituels, dans le monde et les ans, s’adornent en recherche d’identité chevaleresque. Car, cette certitude anthropocentrique, admises sans recul par les seigneurs risque d’être sévèrement secouée par des épidémies, par exemple, comme celle que nous vivons. Avec l’espoir que nous prenions enfin conscience de qui nous sommes réellement dans le tourbillon naturel. Mais ne sommes-nous pas au-dessus de cela ?
L’anthropocène ? L’état de santé du monde en découle depuis un ridicule laps de temps de quelques siècles. Nous mesurons aujourd’hui la conséquence des prélèvements et autres taxes d’habitation sur l’environnement. Tout cela, en une poussière de temps. Que pèsent les 10 000 ans de l’homme chasseur-cueilleur du paléolithique, notre grand papa en comparaison des 200 millions d’années de vie des mammifères, la classe dont nous sommes membres?. Et que pèsent à leur tour, nos -35000 ans de sédentarisation qui nous amènent au massacre ?
Les humains admettront-ils, un jour, qu’ils ne sont pas des seigneurs ? On me répond : « Jamais, car leur anthropocentrisme les amène à détruire leur propre habitat, leur vie » Et je me lève et réplique : « Voilà une affirmation avouée de l’anthropocentrisme rampant ! ». Voici l’urgence : nous étudier, car la connaissance du bipède humain est toujours balbutiante malgré les assertions, en tous temps, de moult penseurs et philosophes. Oser faire de la zoologie, ou de l’éthologie -terme moins piquant, comparée est notre tâche primordiale. Et cela est en route ; tant mieux !
Pour changer le monde actuel, pas de tergiversations ! L’auteur de la dégradation est l’Homme ; alors changeons-le. Pour cela pénétrons enfin ses arcanes millénaires collectives et individuelles, dans leurs interactions secrètes. Il est grand temps de sortir un instant des sciences du dehors pour élucider les mystères du dedans ! Que se passe-t-il donc dans la tête des maîtres du monde, les Hommes, pour qu’ils ne se soucient pas de sa santé. Pourtant ils voient bien qu’elle est chancelante ?
Je vais commencer, avant, par un bref exposé des directives qui pèsent dans notre inconscient et nous modèlent. Elles sont souvent légitimées d’ailleurs par la conscience, voire la raison. Ainsi je vous inviterai à aller plus loin.