Nous avons tous rencontré certains maçons qui affirment qu’untel est un mauvais Frère et qu’il ne lui pardonnera jamais le préjudice subit. Ce dernier l’a trahi ou l’a volé et le délit est trop insupportable pour être passé sous silence. Ainsi, naissent les discordes et les disharmonies qui conduisent à des conflits parfois tenaces dans les Loges.
Pourtant, nous avons tous entendu la séquence de texte suivante :
Le Vénérable Maître : « – Néophyte, je vous poserai une dernière question. Vous avez connu beaucoup d’hommes ; vous avez peut-être des ennemis. Si vous en rencontriez dans cette Assemblée ou parmi les Frères Maçons, seriez-vous disposé à leur tendre la main et à oublier le passé ? »
Le Néophyte : « – Oui, Monsieur »
Tout cela partait d’un bon sentiment, surtout que ce jour là, tout le monde était plein d’amour dans les yeux et dans les cœurs. Le problème a commencé lorsque ce mauvais Frère à qui j’avais fait confiance en lui prêtant 5000 €, n’a pas tenu sa parole quand l’heure du remboursement fut venue !
Ce genre d’exemple existe à foison, si les Loges pouvaient parler, il s’en dirait des choses, car chacune garde ce genre d’histoire en mémoire. La cause est souvent différente, mais le schéma est toujours le même.
Généralement, on entre en maçonnerie pour être en confiance et en fraternité. C’est probablement pourquoi ce type de mésaventure amplifie la déception des victimes. Pourtant, il faut relativiser et rappeler que nous sommes tous venus en Loge pour travailler sur nous même. Mais qu’est-ce que cela signifie réellement ? Nous y reviendrons plus tard. Tout d’abord, soulignons que l’assemblée que nous nommons des Frères (ou des Sœurs), n’a pas été choisie sciemment et rationnellement par nous. Si vous aviez du faire une sélection préalable individuelle, la composition actuelle de votre Loge serait totalement différente. C’est précisément le point de départ du travail maçonnique. Toutes ces personnalités différentes, réunies dans le même Atelier, c’est le seul moyen de nous faire sortir de notre zone de confort pour un parfait travail sur la Légende d’Hiram à tous les degrés.
Lorsque nous étions sur la colonne du Septentrion en silence ou à écouter religieusement le Second Surveillant, c’était bien confortable, car nous étions réceptifs. Ensuite, en passant sur la Colonne du Midi, nous avons commencé à nous exprimer et à voyager… mais nous ne prenions pas encore part à la gestion de la Loge. Nous étions toujours dans l’éducation qui devait nous conduire à la Maîtrise.
Puis cela s’est gâté quand nous sommes devenus Maîtres. L’autre est souvent le miroir de nous même et comme la vie est parfois taquine, elle nous place devant le miroir un Frère ou une Sœur qui vient réveiller nos démons anciens. C’est alors que les tensions naissent et les conflits prennent corps. On oublie très vite la réponse à la question de notre Initiation lorsque nous avons dit « – Oui, Monsieur. »
En général, les litiges ou les simples agacements sont à la hauteur du travail que nous avons besoin d’accomplir pour grandir. En résumé, il est bien possible que chaque facette de cette maudite Loge soit une partie de nous même avec laquelle nous avons besoin de nous harmoniser. Entrer en conflit avec un Frère, c’est comme exciter avec une aiguille le nerf d’une dent sensible en se disant que ça ira mieux ensuite. La tentation est forte et pourtant, le seul moyen pour désamorcer la situation est de prendre du recul et de travailler sur soi ce problème d’apparence extérieure.
L’aspect social de mise en harmonie dans la Loge s’exerce à chaque conflit en prenant conscience que l’autre est un « nous-même » à l’extérieur. Dans le litige en question, nous ne sommes pas forcément coupable, mais nous sommes toujours responsable. Le piège vient souvent de la confusion que nous faisons entre ces deux notions. L’enfer n’est pas l’autre, l’enfer c’est nous même lorsqu’on nourrit et cultive les passions sans mesure ni fraternité. Cela ne veut aucunement dire que nous devons tout supporter et nous faire humilier. Bien au contraire, nous devons être droits et courageux pour communiquer, échanger et travailler au retour de l’harmonie. Croyez-vous que Mandela aurait grandi s’il avait passé 27 ans à préparer une guerre à sa sortie de prison ? Après avoir commis plus de 200 actes de violence, il a choisi de travailler sur lui pour se pacifier. On en connait le résultat.
Il faut pour cela parfois passer par des phases transitoires qui nécessitent beaucoup de courage et de patience. Mais, ne sommes-nous pas là pour glorifier le travail ? Ce chemin commence souvent par se pardonner à soi même la situation insupportable du moment. Une fois la paix faite avec soi-même, l’autre devient souvent moins gênant car on comprend qu’il n’est bien souvent qu’un bouc émissaire. S’il disparaît, un autre viendra le remplacer dans un cycle sans fin, du moins tant que notre conscience n’évolue pas.
C’est pourquoi les Loges sont rarement des lieux de paix et de méditation. Elles sont des athanors où nous venons nous frotter aux autres pour nous aider à trouver notre centre, notre enracinement. En fait, on pourrait presque affirmer qu’une Loge c’est un élevage de compas ou chaque pointe essaie de trouver sa juste place dans la terre et chaque crayon tente de tracer sa route circulaire dans le ciel. C’est par le croisement avec les autres compas que nous pouvons grandir. Ainsi, le problème ne vient pas du conflit, mais bien de la manière que nous avons à en tirer une richesse, une leçon. Lorsque je disais plus haut que nous sommes responsables, bien souvent le travail commence par cette prise de conscience. Il est tellement plus facile d’affirmer que le responsable c’est l’autre, le Frère, le chef, ou la société. Si nous sommes maçons, c’est bien parce que les autres nous reconnaissent comme tel. Nous devons donc admettre que nous grandissons ensemble grâce à la responsabilité de nos pensées et de nos actes. L’un ne va pas sans l’autre. Si notre société essaie quotidiennement de nous convaincre qu’elle peut nous vendre de la sécurité et du rêve à tous prix, la Franc-maçonnerie quant à elle, nous vend de la responsabilisation sans aucun prix… mais avec beaucoup de valeur. Les problèmes sur la voie initiatique commencent à naître lorsqu’on essaie de faire des mélanges des genres. Il suffit de lire les articles de nos blogs maçonniques pour s’en convaincre.
C’est ben vrai mon gars !!!!! Rien n’est grave dans ce monde pour peu qu’on essaye d’aller à l’essentiel !
Fraternité
Alain