Le rite est le corpus du sens, il est le corps des valeurs de la pensée. Il faut s’exercer à essayer pour appliquer. Il s’agit d’une sorte de simulation qui se situe dans le champ de l’expérimentation, avant sa réalisation qui introduit dans le champ de l’expérience. Ce matriçage (ou cette trans-formation dans la matrice) prépare la venue au monde d’un être in-formé (par les messages maçonniques) et formé (par le rite) à vivre une vie dont le sens symbolique, porté par le rituel, lui sert de modèle. Celui-ci l’incite, par le sens qu’il lui révèle, à se révéler à lui-même comme homme de sens… en l’imitant dans ses valeurs et dans ses actes. Hors de toute situation et de toute temporalité profanes, l’initié apprend ce qu’il doit faire, puis le répète correctement (c’est-à-dire de manière exemplaire) dans le lieu et pour le temps où il vit.
Mais cette modélisation des comportements ne risque-t-elle pas d’être un carcan ? Non, car elle n’uniformise pas. Si le dess(e)in des patrons est toujours le même, chaque homme lui donne sa coupe. Pour qu’un vêtement puisse être porté tous les jours, il faut qu’il soit taillé aux mesures de celui qui l’endosse. Le port fait le style. L’initié s’approprie les mots et les gestes qui lui sont transmis. Par eux, il reçoit une tradition (en paroles et en actes). Les symboles, les mythes et les rites sont les moyens de communication et de diffusion de cette tradition.
Elle est donc le creuset dans lequel se fondent mythes et rites pour donner un contenant à la méthode initiatique et un contenu à la connaissance ésotérique.
Notre chemin s’est éclairci, les bermes se sont élargies : la voie que nous avons empruntée nous a conduit sur les traces des héros de la mythologie, des êtres exemplaires de l’humanité, des « grands initiés » de la Franc-maçonnerie.
Sur ces modèles, nous avons choisi un mode de vie personnel. Certes, nous suivons tous le même itinéraire (la naissance pour départ, la vie pour parcours, la mort pour terme) ; mais chacun fait la route à son pas, à son rythme, à sa mesure, en touriste de la vie ou en pèlerin de l’esprit. Et pour que son périple se passe dans les meilleures conditions, son obédience lui offre – comme tout bon tour opérateur :
- une destination où se rendre (en l’occurrence, il s’agit plutôt d’une destinée),
- un circuit à accomplir (c’est la voie de son perfectionnement),
- des étapes à respecter (ce sont les degrés de l’élévation spirituelle),
- des excursions à voir (un guide de métamorphose pour connaître son « petit monde » et ses secrets, un guide de la gnose pour connaître le « grand monde » et ses mystères)
- et des traditions locales à respecter (il faut se montrer exemplaire en s’adaptant aux rites et aux coutumes de la population d’accueil).
Alors, bonne initiation, chers impétrants ! Et que vos voyages parmi nous, dans nos rites, vous apportent tout le bonheur que confère une belle démarche de vie.
Pierre PELLE LE CROISA, LE 27 AVRIL 2015