jeu 21 novembre 2024 - 14:11

Du perfectionnement de l’homme au perfectionnement de l’humanité (Suite)

À la question : « Qui suis-je aujourd’hui ? », la Franc-maçonnerie en subroge une autre : « Qui dois-je être demain ? » Pour parcourir le chemin de la première à la seconde, elle en pose une troisième : « Que dois-je faire pour y arriver ? » Par cette dernière interrogation, l’homme se propose de réfléchir aux meilleurs comportements pour y parvenir. Dans son vécu, il les expérimente ; il en déduit une conduite de vie qui confirme ou modifie sa façon d’être. Ainsi peut-il passer de ses propres ténèbres à la lumière de l’esprit, et devenir un homme de bien ; un « homme d’honneur et de probité » disent les Francs-maçons.

Dès lors, l’éthique individuelle déborde sur la morale collective. Elles induisent toutes deux le concept de solidarité : Il s’agit d’être dévoué et compatissant au regard de la communauté humaine à laquelle nous appartenons : « La vertu d’humanité – édicte Confucius -, c’est élever autrui comme on souhaiterait l’être soi-même ; c’est le faire parvenir là où on le voudrait soi-même. » Et puisque, par définition, « la vertu, dans sa quintessence, expose la morale dans toute sa pureté », intéressons-nous maintenant aux valeurs morales que la Franc-maçonnerie préconise.

Elle prétend d’abord à l’universalité. Elle va donc reprendre les valeurs universelles que les religions, les philosophies, les sagesses et les cours d’instruction civique de l’« Éducation Nationale » dispensaient naguère. Elle n’a pas de valeurs en propre, elle a simplement un regard sur ces valeurs qu’elle intègre dans ses enseignements. S’il y a un écart, il faut le corriger : soit en adaptant son existence au référentiel de ses valeurs (parce qu’elles sont essentielles à l’individu), soit en adoptant un autre référentiel quand le décalage entre ses valeurs et son mode d’existence est trop grand. Car il faut toujours être convaincu pour adhérer à la vertu.

En fait, la Franc-maçonnerie demande à ses membres d’être plus que « libres et de bonnes mœurs » ; elle leur demande aussi d’être « loyaux et fidèles à leurs engagements » – dont celui de s’approprier, de respecter et de transmettre les valeurs fondamentales qui font sa raison d’être. Si elles éclairent l’initié dans le temple, c’est pour qu’il les fasse rayonner à l’extérieur.

« Fuir le vice », obéir à la loi morale, s’imposer des devoirs, y accorder ses comportements et tenter d’être vertueux en respectant les valeurs universelles de notre confraternité (qu’elles soient ontologiques, éthiques, humaines, sociales ou républicaines)[2], voilà un beau programme qui s’offre aux Francs-maçons pour qu’ils l’incarnent.

La société s’est fixée pour modèle le « souverain bien ». Pour être reconnu comme « être exemplaire »[3], l’homme doit donc répondre à des péremptions morales, à des principes déontologiques, à des références éthiques, à une moralité sans faille et à une vertu absolue.

Hélas ! Ce programme, s’il est beau en théorie, paraît irréaliste pour les hommes et les femmes imparfaits que nous sommes ! C’est pourquoi, pour nous aider à le réaliser, il n’est de meilleur moyen de nous convaincre que de le représenter : l’exemple des êtres qui les ont personnifiées va servir à l’illustrer.

Mais dans quel but ? Pour distinguer ainsi l’action de l’initié de celle du profane. Le profane, au mieux, s’évertue à être meilleur que les autres ; l’initié, par la vertu, s’ingénie à être meilleur que lui-même. L’épreuve le révèle : le succès le rassure et il s’efface ; l’échec le stimule et il se dépasse. Tout ce qui est vil l’avilit, tout ce qui est grand le grandit. Si la perfection n’est pas de ce monde, la perfectibilité l’est – en tant que but –. Or, pour se perfectionner, il faut non seulement se référer à une idée de la perfection et à un idéal de perfectibilité pour l’accomplir, mais il faut aussi les matérialiser, donc se référer à un guide de perfectionnement pour conduire ses actions : le Franc-maçon appelle « grands initiés » ces hommes qui servent de modèles à ses comportements : « Pour être frère, il faut accepter d’être fils, il faut accepter d’avoir un père adoptif, il faut se reconnaître une transcendance, une autorité » infère Régis Debray.

Nous pouvons – et nous devons – chercher autour de nous des hommes remarquables par leur conduite et leur haute valeur morale, non plus au niveau idéal d’identification ou d’imitation à des modèles passés mais au niveau sociétal, dans l’inspiration d’exemples présents : s’ils n’ont ni le renom ni l’envergure des « grands initiés », ils peuvent eux aussi nous accompagner et nous guider dans notre démarche.

 

Pierre PELLE LE CROISA, LE 27 AVRIL 2015Ó

 

[1] Voir l’article précédent « Du perfectionnement de l’homme au perfectionnement de l’humanité »(1), rubrique : « Des clés pour hier et aujourd’hui ».

[2] Voir l’article « L’action du Franc-maçon a-t-elle un sens dans le monde d’aujourd’hui ? »(2) dans la rubrique « La Franc-maçonnerie actuelle et de demain éclairée par celle d’hier ».

[3] Voir l’article « Pourquoi être exemplaire dans un monde qui ne l’est pas ? » dans la rubrique : « La Franc-maçonnerie actuelle et de demain éclairée par celle d’hier ».

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