Nous sommes au XXIᵉ siècle, dans une époque où l’humanité se cherche entre héritages et innovations, entre rites anciens et libertés conquises. Et au cœur de cette mouvance, la franc-maçonnerie peine parfois à suivre le rythme, coincée entre ses colonnes historiques et les vents du changement.
Mais qu’on se le dise : il ne s’agit pas ici de renier la tradition, ni de jeter aux oubliettes les rituels forgés dans les siècles passés. Non. Il s’agit de regarder ces mêmes traditions avec lucidité, humour, et conscience, pour comprendrequ’exclure la femme aujourd’hui revient à nier une réalité omniprésente, celle d’un monde où elle bâtit, initie, guide et éclaire.
Notre époque n’appelle pas à la rupture, mais à la cohérence : comment parler d’universel si la moitié de l’univers reste à la porte du temple ? Comment invoquer la lumière si l’on refuse qu’elle brille sous d’autres formes, d’autres voix, d’autres visages ?
Ce traité, entre satire et réflexion, n’est donc pas une critique acerbe, mais une offrande joyeuse, une façon de montrer que la femme n’est pas un intrus maçonnique, mais bien une source initiatique en elle-même, déjà présente, déjà vivante, parfois silencieusement brillante entre les colonnes.
Chapitre I : « Vade Retro, Sœur Satanas »
Une loge ultra-traditionnaliste reçoit l’ordre, divin, administratif ou astrologique, d’initier une femme. Panique à l’Orient ! Le Vénérable Maître s’évanouit, le Frère Orateur parle en latin inversé, et le Maître des Cérémonies improvise un rituel en lisant le manuel du 3e degré à l’envers.
« Arrière, Sœur ! Ne viens pas troubler notre compas sacré avec ton rouge à lèvres profane ! »

Régularité en kit, compas en talons : bienvenue dans la loge du Délire éclairé. »
Chapitre II : « Platon, Pythagore et le Club des Garçons »
Les philosophes antiques sont convoqués pour justifier l’exclusion. Platon aurait dit : « La femme est une idée imparfaite, sauf si elle sait faire des planches. »
Mais les Mystères d’Éleusis, dirigés par des prêtresses, sont soigneusement oubliés. On préfère les citations floues à la vérité historique.
Chapitre III : « La Bible selon Saint Misogyne »
« Tu enfanteras dans la douleur, et tu ne seras pas initiée. »
Voilà ce qu’on croit parfois lire entre les lignes sacrées, quand on cherche à justifier l’exclusion des femmes par des versets mal digérés. On convoque la Genèse, on invoque Saint Pierre, et même Moïse, qui aurait refusé l’initiation de sa sœur Myriam faute de barbe. Mais la vérité biblique est tout autre.
Car le fameux « Vade retro Satanas », cette formule latine devenue incantation contre le mal, n’a jamais été adressée à une femme. Elle fut prononcée par Jésus lui-même,contre Pierre, son disciple, dans les Évangiles selon Marc (8:33)etMatthieu (16:23) :
« Arrière de moi, Satan ! Tu m’es un scandale ; car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes. »
Pierre, l’homme, le roc, le futur chef de l’Église, est ici le tentateur, celui qui veut détourner Jésus de sa mission. Et c’est à lui, un homme, que Jésus adresse cette réprimande spirituelle. Pas à une femme. Jamais.
Ce détail scripturaire, souvent ignoré, démolit les fondations théologiques de l’exclusion genrée. Il révèle que le mal n’a pas de sexe, et que la tentation peut venir du cœur le plus proche, même masculin, même initié.
Alors, quand certains brandissent le « Vade retro Satanas » comme un talisman contre l’initiation féminine, ils oublient que le Christ lui-même l’a utilisé pour corriger un homme qui refusait le chemin de la vérité.
Chapitre IV : La Cérémonie Fictive
La loge est contrainte d’initier une femme à cause :
- d’une prophétie oubliée stipulant que « refuser trois âmes pures attire les chèvres de l’Apocalypse »,
- d’un décret européen menaçant de retirer la régularité,
- ou d’une erreur informatique : « Jean(e) » est enregistré comme homme.
La cérémonie devient un théâtre burlesque :
- Le mot de passe est remplacé par « Vade Retro Satanas », crié trois fois en tournant autour d’un chandelier IKEA.
- La candidate doit réciter l’alphabet hébraïque en dansant la polka.
- Le Temple tremble, les tabliers se froissent, et les colonnes restent debout malgré tout.
Chapitre V : La Touche Sérieuse
L’exclusion des femmes n’est pas une fatalité. Des obédiences telles que le Grand Orient de France ou le Droit Humain, entre autres, démontrent que l’initiation n’a rien à voir avec le genre, mais avec la quête de sens, de lumière et de fraternité, ou plutôt, de sororité.
Bibliographie complémentaire
Ouvrages réels :
- Simone de Beauvoir – Le Deuxième Sexe
- Albert Camus – Le Mythe de Sisyphe
- Friedrich Nietzsche – Ainsi parlait Zarathoustra
- Jean-Jacques Rousseau – Du Contrat Social
- Edgar Morin – La Voie
- Pierre Rabhi – Vers la sobriété heureuse
Ouvrages fictifs :
- Sœur Satanas – Le Compas en talons aiguilles
- Vénérable Dac – La Loge en Folie
- Frère IKEA – Symbolisme et Mobilier
- Myriam de l’Orient – Pourquoi Moïse m’a snobée
Note de l’auteur
Cet travail est né d’une nécessité : celle de faire éclater un rire dans le silence sacré des temples, de bousculer les colonnes sans les renverser, et de rappeler que l’exclusion, même lorsqu’elle est vêtue d’oripeaux rituels, demeure une forme d’obscurité.
À travers l’humour, l’absurde et l’ironie, j’ai voulu bâtir une loge fictive où les contradictions du système se dévoilent d’elles-mêmes. Mais cette caricature n’est pas une moquerie : elle est un acte de résistance lucide, une quête symbolique pour réintégrer l’universel dans le cœur de la franc-maçonnerie.
Rire de ce qui exclut, c’est déjà poser les bases de ce qui unit.
Exergue final
“La femme est l’avenir du maçon,
car elle est l’incandescence que l’on avait oubliée dans le feu.”
Postface initiatique
Cette planche n’a pas été écrite pour plaire à tous, mais pour parler à chacun.
En tant que Vénérable Frère, je revendique le droit de penser librement, d’écrire avec lucidité, et de rire sans jamais renier le sacré.
Car c’est dans l’intelligence de la dissidence joyeuse que naît, parfois, la plus sincère des fraternités.
Gérard Lambda, initié du Délire éclairé.
Loge du Délire Éclairé n°404
Rite absurde universel
Pourquoi ne pas évoquer aussi le pb de l’adelphité ?