De notre confrère expartibus.it – Par Hermes
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Dans le panorama complexe de la critique sociale contemporaine, la franc-maçonnerie continue de représenter un cas emblématique de la manière dont d’anciens mécanismes psychosociaux persistent dans la société moderne.
L’institution maçonnique, particulièrement en Italie où elle est divisée en de multiples Obédiences et Communions, chacune avec son propre bagage historique spécifique de lumières et d’ombres, est au centre d’un phénomène de diabolisation qui mérite une analyse approfondie.
Une perspective anthropologique
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Le processus de diabolisation de la franc-maçonnerie représente un cas paradigmatique de la théorie du « mécanisme victimaire » développée par l’anthropologue René Girard. Selon cette perspective, les sociétés humaines tendent à gérer leurs tensions internes par la désignation d’un « ennemi commun ».
Ce processus émerge du « désir mimétique » – un mécanisme par lequel les conflits sociaux naissent de l’imitation mutuelle des désirs et des peurs collectives. La franc-maçonnerie, avec son caractère initiatique et sa réserve traditionnelle, devient le réceptacle idéal pour projeter des angoisses sociales plus profondes.
La critique sélective comme symptôme social
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Il est particulièrement significatif d’observer comment les détracteurs de l’institution maçonnique manifestent une sélectivité symptomatique dans leurs critiques. Alors qu’ils dirigent leur véhémence contre la franc-maçonnerie, ils restent souvent silencieux face aux problèmes éthiques les plus urgents de notre époque : le capitalisme prédateur, l’exploitation systémique du travail humain, l’érosion progressive des liens sociaux, les conflits mondiaux, les inégalités économiques croissantes et la crise environnementale.
Cette sélectivité trahit la nature projective de la critique, révélant davantage les peurs collectives que l’objet de la critique lui-même.
Symbolisme et malentendus : le cas de la lettre G
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Un exemple révélateur de cette dynamique se manifeste dans la confusion fréquente entre le gnosticisme historique et le sens plus large de la Gnose, symbolisé dans la tradition maçonnique par la lettre G.
Ce symbole polyvalent, qui peut représenter à la fois la Gnose, la connaissance spirituelle, la Géométrie, l’ordre cosmique, Dieu/Grand Architecte, principe créateur, et la Génération, la transformation, est souvent réduit à une caricature qui sert à renforcer des récits préétablis.
La dimension psychologique des préjugés
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La rhétorique qui associe la franc-maçonnerie au satanisme révèle de profonds mécanismes psychologiques. Le terme « diable », dérivé du grec « διαβάλλω » (diabállō, « séparer/diviser »), éclaire paradoxalement la nature même du préjugé : c’est dans l’acte d’accuser et de diviser que se manifeste le véritable principe diabolique.
De ce point de vue, le véritable « satanisme » ne consiste pas en des rituels obscurs, mais en la fragmentation de l’humanité, en l’opposition dualiste qui alimente une atomisation existentielle.
C’est comme si l’humanité buvait symboliquement l’eau du fleuve Léthé, oubliant son origine commune : une matrice sacrée qui embrasse à la fois la dimension spirituelle et la dimension quantique de l’intelligence universelle.
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La référence critique fréquente au « luciférien » Albert Pike, bien qu’historiquement pertinente, révèle combien de critiques sont ancrées dans une vision archaïque et non représentative de la franc-maçonnerie contemporaine.
Cette fixation sur des personnages historiques spécifiques démontre comment le mécanisme du bouc émissaire nécessite des symboles tangibles sur lesquels construire son récit accusateur.
Les vrais défis ignorés
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La fixation sur la franc-maçonnerie comme bouc émissaire sert involontairement à détourner l’attention de défis évolutionnistes et sociaux plus immédiats et plus concrets : le narcissisme social dominant, la marchandisation des relations humaines, la violence structurelle dans ses diverses manifestations, les crises éthiques des institutions financières et les scandales impliquant les institutions religieuses elles-mêmes.
Ce mécanisme de diversion, analysé à travers le prisme de la théorie de la « panique morale » de Stanley Cohen, révèle comment les sociétés modernes continuent de recourir à des mécanismes archaïques pour gérer l’anxiété collective.
Vers une compréhension plus profonde
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Le défi intellectuel de notre époque ne consiste pas à perpétuer d’anciens préjugés, mais à développer des outils d’analyse plus sophistiqués pour comprendre les véritables dynamiques sociales.
Le cas de la franc-maçonnerie offre une occasion précieuse d’examiner comment les mécanismes archaïques de bouc émissaire continuent de fonctionner dans les sociétés contemporaines, masquant souvent les véritables causes de la détresse sociale.
À une époque caractérisée par des défis existentiels sans précédent, surmonter ces mécanismes primitifs de gestion de l’anxiété sociale devient non seulement un impératif moral, mais une nécessité pratique pour répondre efficacement aux menaces réelles à la cohésion sociale et à la survie même de l’espèce humaine.
“Le terme « diable », dérivé du grec « διαβάλλω » (diabállō, « séparer/diviser »), éclaire paradoxalement la nature même du préjugé : c’est dans l’acte d’accuser et de diviser que se manifeste le véritable principe diabolique”
Peut-on lire
Le DIABLE : Dia-Bolos : qui se jette en travers (dia) , qui divise (diamètre, diagonale….)
L’opposé de Dia-Bolos c’est Sym-Bolos ( SYMBOLE) ; Rappelons nous : le petit morceau de terre cuite cassé en deux et quand on rapproche les deux morceaux, ils s’épousent parfaitement .
En Maçonnerie , tout est symboles : comment pourrait-elle être diabolique ?