ven 22 novembre 2024 - 22:11

Casanova franc-maçon

Giacomo, Jean-Jacques en français, Casanova (1725-1798) est un célèbre aventurier et écrivain politique de la République de Venise.

Drapeau de la République de Venise.

Ce que souligne fort justement Jean-Claude Haux, en précisant que « Casanova est né pratiquement en même temps que la franc-maçonnerie ».

Après avoir rapidement dressé le tableau de la présence de la franc-maçonnerie à compter du 24 juin 1717, en Angleterre puis en France, où les francs-maçons subirent quelques tracasseries de la part du cardinal Fleury (1653-1743) principal ministre du jeune roi Louis XV de 1726 jusqu’à sa naissance au ciel, l’auteur rappelle que les « Loges volantes », en réalité les loges militaires qui, en accompagnant les troupes en campagne, essaimaient, au grès des villes de garnison, et participaient ainsi au développement de l’Art Royal. Prenant pour exemple, Choderlos de Laclos, auteur des Liaisons dangereuses, aide-major au régiment d’artillerie du royaume de France Toul artillerie et membre de La loge dudit régiment. Et si pendant les Lumières les idées circulent et se diffusent, la Franc-Maçonnerie en est un vecteur. Rappelons que Giacomo Casanova semble avoir eu plusieurs vies, prêtres, soldat, musicien, joueur et amateur du beau sexe. La vivacité de ses passions et la fougue de son caractère l’entraînèrent du reste dans moult aventures qui, à la une suite de scandales et plusieurs intrigues amoureuses, lui valurent d’être chassé du séminaire, et de subir même un emprisonnement.

Portrait de Giacomo Casanova attribué à Francesco Narice  (1719-1785).

Jean-Claude Hauc révèle d’ailleurs que la « fraternité maçonnique n’était pas un vain mot à l’époque concernant le domaine du plaisir ». Et de citer quelques croustillants exemples, avec John Murray en 1755 ou encore Madame Morin qui va aider le libertin Casanova à approcher sa jolie nièce ainsi qu’au sein de la Loge Saint-Jean de Jérusalem que Casanova semble avoir fréquenté le plus souvent et où il « trouvait de nombreuses victimes potentielles ». Il parcourt  l’Italie, la Turquie, les îles grecques, la France avec des passages à Lyon et des séjours à Paris.

L’auteur nous rappelle où, quand et comment Casanova reçu la lumière au sein de la Loge Amitié ou Les Amis Choisis, l’une des trois loges qui existait alors à l’Orient de Lyon. Citant Histoire de ma vie, un des ouvrages de Giacomo Casanova et où puise l’auteur pour nous retracer la vie palpitante de l’aventurier : « … Un respectable personnage, que j’ai connu chez M. de Rochebaron, me procura la grâce d’être admis parmi ceux qui voient la lumière. Je suis devenu franc-maçon apprenti. Deux mois après j’ai reçu à Paris le second grade, et quelques mois après le troisième, qui est la maîtrise. C’est le suprême. Tous les autres titres que dans la suite du temps on m’a fait prendre sont des inventions agréables, qui quoique symboliques n’ajoutent rien à la dignité de maître… »

Equerre Compas et G

Une occasion aussi de mentionner comment l’Art Royal est arrivé dans la capitale des Gaules. Casanova utilisant ce réseau relationnel dans toute l’Europe grâce au passeport maçonnique et aux guides du Franc-Maçon en voyage. Jean-Claude Hauc reprend la riche vie de Casanova. Vie profane s’il en est, mais aussi maçonnique, en citant, à titre d’exemple, des lettres et correspondances que Casanova écrivit et qu’il reprend dans son autobiographie. Nous pouvons que Casanova a peint avec beaucoup de vérité l’état des mœurs de la société dans tous les pays de son Grand Tour – ce voyage aristocratique destiné à parfaire l’éducation. Ce qu’il raconte, Casanova l’a presque toujours vu de ses propres yeux ; et c’est ainsi qu’il donne sur une époque riche en personnages remarquables une foule de traits caractéristiques et individuels pris dans toutes les classes de la société contemporaine.

Casanova jeune peint par son frère Francesco (entre 1750 et 1755)

La thèse développée par Guy Chaussinand Nogaret nous apprend que Casanova avait toujours sur lui, des passeports dont tout maçon itinérant devaient être munis, mais et surtout qu’il pouvait être un émissaire de la confrérie, mentionnant l’opinion de Joseph Legras qui estime que l’agent de liaison Casanova était chargé d’assurer la cohésion de l’international maçonnique ! Avançant des preuves véritables et laissant à penser qu’il était alors chargé de mission pour la Grande Loge qui deviendra, en 1773, le Grand Orient de France. L’ouvrage, qui ne comprend ni sommaire, chapitre ou sous-titrage, se lit d’une traite. Une tranche de vie, mais une tranche de vie maçonnique des plus passionnantes. Nous y apprenons plusieurs détails sur ces manies, attitudes et comportements.

Portrait de 1788, par Johann Berka

Mais aussi que Casanova espérait la célébrité à travers l’édition de Icosameron – Voyage au centre de la terre qui relate une exploration intérieure, un récit initiatique hors du commun. Une œuvre magistrale et originale toutefois publiée à 366 exemplaires à l’imprimerie de l’école normale, à Prague, où il est le plus grand mal à trouver des souscripteurs, pour la plupart des Frères.

L’ouvrage s’achève par l’illustration de la stèle funéraire de Casanova à Dux, en Bohême, dans le château d’un autre franc-maçon, le comte de Waldstein. Ainsi que par les ouvrages consultés par l’auteur. Pour tous, le nom de Giacomo Casanova restera au panthéon de l’histoire des grands de ce monde.

Jean-Claude Hauc, qui nous livre ici son quatrième ouvrage sur Casanova, vit à Montpellier et a publié une vingtaine de romans et récits chez différents éditeurs, ainsi que des essais sur les aventuriers et les libertins du siècle des Lumières. Il fait partie de la rédaction des Lettres françaises, une publication littéraire créée en France, en septembre 1942, pendant l’Occupation, par Jacques Decour et Jean Paulhan. C’est l’une des nombreuses publications du mouvement de résistance Front national. Il s’agissait alors d’une publication clandestine bénéficiant entre autres de la collaboration de Louis Aragon, François Mauriac, Claude Morgan, Édith Thomas, Georges Limbour, Raymond Queneau et Jean Lescure. Après la Libération, à partir de 1953 jusqu’en 1972, Les Lettres françaises, dirigées par Louis Aragon, bénéficient du soutien financier du Parti communiste français (PCF).

Les Éditions Douro, dont la devise est « Par la lecture, on s’absente de soi-même et de sa propre vie », une citation romancier et journaliste Alphonse Karr (1808-1890), est honorée de reprendre la collection « La Bleu-Turquin » dirigée par Jacques Cauda, peintre, écrivain, poète, éditeur, photographe et documentariste pour les télévisions française, algérienne et canadienne, et développée jusqu’à la fin de l’année 2020 par leur partenaire et ami Daniel Ziv, de Z4 Éditions. Les publications précédentes restent disponibles et vous pouvez toujours les commander. Le site des Éditions Douro https://www.editionsdouro.fr/

Jean-Claude Hauc – Éditions Douro, Coll. La Bleu-Turquin, 2023, 66 pages, 17 €

La 4e de couverture
Icosameron
Casanov, annotazione della morte

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Yonnel Ghernaouti
Yonnel Ghernaouti
Yonnel Ghernaouti, fut le directeur de la rédaction de 450.fm de sa création jusqu'en septembre 2024. Il est chroniqueur littéraire, membre du bureau de l'Institut Maçonnique de France, médiateur culturel au musée de la franc-maçonnerie et auteur de plusieurs ouvrages maçonniques. Il contribue à des revues telles que « La Chaîne d’Union » du Grand Orient de France, « Chemins de traverse » de la Fédération française de l’Ordre Mixte International Le Droit Humain, et « Le Compagnonnage » de l’Union Compagnonnique. Il a également été commissaire général des Estivales Maçonniques en Pays de Luchon, qu'il a initiées.

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