L’auteure, ou autrice, puisqu’aussi bien l’un et l’autre, l’un ou l’autre se dit ou se disent, poursuit dans son nouvel ouvrage paru dans la collection « Egale à égal » de Belin, son combat pour la féminisation du langage quand il s’agit des femmes. Reprenant les arguments que certains et hélas certaines ne veulent toujours pas entendre, la politologue rappelle en cinq courts chapitres une vision de la question du sexe des mots que l’on peut ainsi résumer : la langue est sexiste ; elle est façonnée par et pour les hommes ; il convient de mettre les mots au service de l’égalité ; un combat à langue armée est nécessaire pour vaincre les résistances qui constituent une violence faite aux femmes et à la mixité et il existe des chemins vers l’égalité.
On retiendra de cette lecture que rien ne sert d’espérer dans la naissance d’un neutre ou la promotion de l’épicène. Il faut appeler un chien un chien et une chienne une chienne, comme diraient les chattes de garde. A propos de langue armée, Claudie Baudino propose de s’emparer du caractère performatif de la langue pour ne pas hésiter à répéter les nécessaires féminisations et faisant fi des ricanements basés sur les connotations en retournant d’un humour léger le gras des blague salaces. Elle nous offre un bel exemple : Il faut employer l’expression « femme publique » pour désigner toutes celles qui consacrent leur vie au bien de la société, louer leur vertu et leur engagement au lieu de commenter leur situation familiale ou leur tenue vestimentaire ».
Dont acte, allons-y, ne baissons pas les bras, cessons de penser que les hommes publics font le tapin et signalons dans cette collection de poche une quinzaine d’autres textes consacrés depuis 2014 à cette problématique, vendus 6,5 euros. N’hésitons pas à les offrir à celles et ceux que l’on n’ose appeler des résistants, à cause de connotations, vous comprenez. Ce Sexe des mots recèle comme il se doit une petite bibliographie et même un quiz, avec dix questions qui permettent de regarder en s’amusant où l’on en est de sa culture féministe.
Pour qui voudrait approfondir la question, Claudie Baudino qui fit jadis sa thèse sur une comparaison entre la situation française et belge (Politique de la langue et différence sexuelle, la politisation du genre des noms de métier, l’Harmattan, 2001) a également publié : « Le travail social au défi de la mixité », L’année de l’action sociale 2015 : Objectif autonomie, Dunod, 2014 ; « De la féminisation des noms à la parité : réflexion sur l’enjeu politique d’un usage linguistique », Ela. Études de linguistique appliquée 2006/2, no 142 ; « Du « genre » dans le débat public ou comment continuer la guerre des sexes par d’autres moyens ? », Travail, genre et sociétés 2006/2, n°16 ; « La cause des femmes à l’épreuve de son institutionnalisation », Politix 2000/3, n° 51. J. Scott, La citoyenne paradoxale. Les féministes françaises et les droits de l’homme, Politix 1998/3, n° 43.
La question de l’évolution du langage, parallèlement à celle de la société est donc de moins en moins marginale, Gaudeamus igitur ! Nos lecteurs liront dans le numéro 11 de la revue Critica masonica, paru il y a quelques semaines, l’entrevue que nous avons réalisée avec Eliane Viennot, autre spécialiste de la cause sous le titre : « Et la modernité fut masculine ». Pour ce qui est de Claudie Baudino, elle s’exprime également en ligne sur www.laboratoiredelegalie.org
Le sexe des mots : un chemin vers l’égalité – De Claudie Baudino
Jean-Pierre Bacot
Première parution
Blog Critica masonica 14 mars 2018
C’est un sujet important pour nous ! Quand on voit que la grande majorité des rituels dans les différentes obédiences ont été actualisés en utilisant le masculin comme genre soi-disant neutre, on peut se poser la question de notre capacité à accepter la féminité ! Si la grande loge féminine accepte une féminisation des mots pour les trois premiers degrés, elle revient à la masculinité pour les autres degrés sans craindre le ridicule ! De fait la franc-maçonnerie est interdite aux femmes qui refusent cette masculinité du langage !