sam 08 novembre 2025 - 19:11

Le Chapeau: l’accessoire maçonnique qui te fait tout de suite plus royal

J’ai entrepris de réécrire mon Dictionnaire vagabond en Franc-maçonnerie dans un style humoristique. Les références, elles, restent intactes, car on ne touche pas aux ornements du texte.
L’humour agit comme un levier subtil qui décolle les esprits des sentiers battus, offrant une distance salutaire face à un texte ou une situation. En provoquant un rire ou un sourire, il crée un espace où l’on peut observer sans être englué dans l’émotion brute. Cette distanciation, à la manière d’un zoom arrière théâtral, permet de voir au-delà des détails immédiats, révélant des perspectives inédites. Par exemple, en ridiculisant un dogme ou une convention, l’humour ouvre une brèche pour questionner des vérités établies, comme un oiseau qui s’élève pour survoler un paysage complexe.

Des études en psychologie sur le soulagement cognitif montrent que l’humour réduit le stress et favorise une pensée latérale, élargissant ainsi le champ de vision. Appliqué à un texte, cela invite à explorer ses sous-entendus avec légèreté, rendant l’analyse plus fluide et créative. En voici quelques extraits autour du thème du couvre-chef pour vous en demander votre avis (attention, il n’y aura plus d’illustrations dans ce nouvel ouvrage).

LE CHAPEAU : L’ACCESSOIRE MAÇONNIQUE QUI TE FAIT TOUT DE SUITE PLUS ROYAL

En Orient, le chapeau n’était pas juste un truc pour éviter les coups de soleil, c’était carrément l’étendard de l’honneur et de la dignité. On jurait même par lui, et si quelqu’un osait y toucher, c’était l’insulte ultime – pire qu’un commentaire désobligeant sur les réseaux sociaux.

Sa forme rappelle le dôme des édifices religieux, une sorte de mini-sphère céleste – en gros, quand tu mets un chapeau, tu deviens un médiateur entre la Terre et le Ciel, rien que ça. En le portant, tu fais le lien entre le Ciel et la Terre, comme un axis mundi – un homme debout, le regard vers les étoiles, prêt à canaliser les énergies divines. Tu portes le ciel sur ta tête, et hop, te voilà connecté au divin – un vrai pont cosmique ambulant.

Dans la Bible, le grand-prêtre portait un couvre-chef, mais ce n’est qu’au IIe siècle que les juifs ont généralisé le port du chapeau après un débat talmudique bien animé sur le respect de Dieu. Au Moyen Âge, tout le monde s’y met, et on décide que chacun est un peu comme un grand-prêtre – mais aussi que le chapeau rappelle qu’il y a toujours un truc entre toi et Dieu, histoire de rester humble. Le Talmud dit que la kippa (le couvre-chef) sert à te rappeler que Dieu est l’Autorité suprême au-dessus de toi – une sorte de pense-bête divin. Ce «connais-toi toi-même» te pousse à l’humilité : avec un chapeau, tu sais où est ta place – pas trop haut, pas trop bas.

Le chapeau, c’est aussi un substitut de la couronne – un symbole de royauté temporelle et spirituelle. Virgile le dit à Dante avant de le laisser avec Béatrice pour un aller simple au paradis : «Je te couronne au-dessus de toi-même»  [p.47/50]. En gros, mets un chapeau, et tu deviens un roi spirituel – ou au moins, tu as l’air d’en être un.

En Maçonnerie française, le Chevalier Ramsay aimait bien voir les maçons coiffés – un franc-maçon du XVIIIe siècle avec un chapeau, c’était un peu le look officiel (Revue Points de vue initiatiques n° 31-32, p. 73).

Le Régulateur du Maçon (1802) précise pour le grade de Maître : «Tous les Frères seront vêtus de noir, le chapeau en tête et rabattu»  (p. 8 et 26). On rendait au nouveau Maître son épée, puis son chapeau, avec un petit speech : «Désormais, vous serez couvert en Loge de maître, cet usage très ancien annonce la liberté et la supériorité»  – un peu comme si on te donnait un badge VIP pour te pavaner en loge.

À l’époque, un geste avec le chapeau pouvait même servir de convocation à une tenue – un SMS version XVIIIe siècle.

Aujourd’hui, dans certains rites maçonniques, les maîtres doivent porter un couvre-chef.
Au Rite Opératif de Salomon (ROS), lors de l’élévation à la Maîtrise, l’Expert équipe le nouveau Maître avec tablier, écharpe et chapeau – un vrai relooking initiatique.
Au Rite Écossais Rectifié (RER), si on suit la tradition à la lettre, tous les maîtres doivent être couverts : «Que ce chapeau soit sur votre front le symbole de l’esprit de justice, de tempérance et de prudence qui doit accompagner les maîtres. Désormais, vous pourrez vous en couvrir en loge, pour annoncer la supériorité sur les apprenants et compagnons.»  
Quand ils parlent, les frères (sauf le Vénérable et les Surveillants) se découvrent – et si le Vénérable enlève son chapeau pour accueillir un frère, tout le monde suit, un peu comme un jeu de «Simon dit»  version maçonnique.

Depuis le XVIIIe siècle, leur chapeau est un tricorne noir avec un galon doré, la calotte ronde symbolisant le ciel – un style que les Quakers d’Amsterdam auraient validé Cérémonies et coutumes religieuses de tous les peuples du monde .



Au Rite Français Groussier, le chapeau ? Pff, rangé au placard, démodé. Même chose au REAA, sauf pour le Vénérable qui le sort juste pour ouvrir et fermer la séance, comme un DJ qui met ses lunettes de soleil pour le final.
Au Rite Émulation, c’est carrément interdit, même si des vieux parchemins anglais disent que le Maître devait être couvert. Va comprendre.
Au Rite York, le Vénérable Maître se la joue Gatsby avec un haut-de-forme ou un clac, le genre de chapeau qui te donne l’air d’un magicien prêt à sortir un lapin.

Dans les loges féminines ou mixtes, les sœurs ont troqué le chapeau pour une mantille ou un calot, mais l’idée reste la même : style et symbolique au top. Par contre, dans tous les rites, pas de chichi : quand on parle au Grand Architecte de l’Univers, le chapeau, on l’enlève. Respect, toujours.

Le chapeau, ce n’est pas juste un truc pour éviter les coups de soleil, c’est un passeport pour le cosmos, un clin d’œil à l’humilité et une couronne pour les humbles.

LE BONNET PHRYGIEN : LE CHAPEAU RÉVOLUTIONNAIRE QUI TE FAIT … UN PEU ROUGIR.

Ce couvre-chef légendaire crie « liberté » plus fort qu’un coq français au lever du soleil !
Son nom vient de la Phrygie, une contrée antique où on savait faire la fête… et les chapeaux.
Il y avait un culte complètement délirant chez les Phrygiens, une sorte de rave party mystique pour Cybèle, la déesse de la nature qui faisait pousser les salades et les passions. Son fiston Atys, un prêtre VIP divinisé, jouait les profs de sciences nat’ en initiant les Phrygiens aux secrets de Mère Nature. Atys, c’est un peu le soleil qui fait bronzer les légendes : il meurt (en mode drama queen) et ressuscite comme une star de télé-réalité, à la manière d’Osiris ou d’Adonis. » (Rebold, Histoire Générale De La Franc Maçonnerie, 1850). Cette histoire mythique, c’est comme un scénario Netflix pour expliquer la cérémonie du 3e degré maçonnique. Suspens et symbolisme garantis !

Regardez le prince Pâris, ce bellâtre troyen, sur un sarcophage romain : il porte le bonnet phrygien parce que sa môman Hécube venait de Phrygie. C’était la mode à l’époque, un peu comme les sneakers aujourd’hui.

Le nom « bonnet phrygien » ? Merci les Grecs, qui l’appelaient aussi « bonnet oriental », genre « le it-bag de l’Est ».
Mais attention, ce n’était pas une exclusivité phrygienne ! Ce couvre-chef faisait fureur chez les tribus iraniennes, des Cappadociens aux Scythes, qui le portaient comme des hipsters sur les bas-reliefs de Persépolis. Même un marchand zoroastrien de Samarcande, en road-trip en Chine au 8e siècle, arborait fièrement ce bonnet avec son look sogdien. C’était LE must-have intercontinental !

Ce feutre légendaire, appelé libéria chez les fans de Mithra, pileus par les Romains, ou pilos chez les Grecs, était le signe distinctif des esclaves affranchis. Genre : « T’es libre, mec, mets ce bonnet et fais la fête ! »

Le bonnet phrygien, c’est l’accessoire qui change tout selon sa posture : penché en avant, en arrière, ou dressé. Chaque position raconte une histoire, comme un emoji capillaire.

Côté coquinerie, quand le bonnet pointe en avant, il évoque… disons, l’élan viril. Regardez le tableau de David, L’amour d’Hélène et de Pâris : ce bonnet dressé, c’est du pur marketing érotique !

Priape, le dieu de la fertilité, le portait aussi, et on va dire qu’il n’était pas du genre discret

Et Marianne, notre icône républicaine ? Son bonnet phrygien pointe toujours en avant, comme pour dire : « Je suis une meuf, mais j’ai du punch ! » Une petite touche de virilité pour booster son charisme.

Pendant la Révolution française, les bonnets phrygiens ont débarqué quelques mois après la prise de la Bastille, en mode fashion statement rouge pétard. Les sans-culottes, ces rebelles aux pantalons rayés, les portaient pour crier leur patriotisme. Apparemment, ce look venait des marins et galériens du Sud, qui ont dû se dire : On va apporter un peu de style méditerranéen à Paris ! «Ils étaient faits de tissu rouge, et s’accordaient aux vêtements rayés des plus fervents révolutionnaires, les sans-culottes. Il semblerait qu’un bonnet pratiquement identique coiffait les marins et les galériens de la Méditerranée, et il est possible que les révolutionnaires venus du Midi les aient amenés à Paris. Porter le bonnet phrygien était en effet une façon d’afficher son patriotisme» (M. Heydari-Malayeri, Observatoire de Paris).

Le bonnet phrygien, c’était le gri-gri ultime des sans-culottes, un talisman qui disait : Touche pas à mon style, même au milieu du chaos révolutionnaire !

C’était aussi le badge officiel des Initiés, ceux qui avaient débloqué le niveau max des mystères.

Le savant Pierre Dujols raconte qu’à l’étape d’épopte (le boss final des initiés d’Éleusis), on demandait au candidat s’il avait le mojo, la volonté et le courage pour le Grand Œuvre. Puis, bim, on lui collait un bonnet rouge sur le crâne en lançant : «Couvre-toi de ce bonnet, vaut mieux que la couronne d’un roi » (Fulcanelli, Le mystère des cathédrales, note p. 31). Les alchimistes, comme des rockstars ésotériques, le portaient fièrement, et Julien

Champagne l’a même dessiné dans Splendor Solis, où un philosophe marche avec son bonnet comme s’il allait conquérir l’univers.

Dès le Moyen Âge, le bonnet phrygien se fait un nom de scène : le prépuçan ! Oui, oui, c’est le surnom rigolo que je colle à ce chapeau pointu pour désigner les Juifs dans les sculptures, en mode « coucou, on sait que vous êtes circoncis ! » Sur le tympan méridional de l’abbatiale Saint-Pierre de Beaulieu-sur-Dordogne (début XIIe siècle), les sculpteurs se sont lâchés : les Juifs portent fièrement leur prépuçan, et certains vont même jusqu’à exhiber leur circoncision, histoire de dire « on assume tout ! » [youtu.be/JrxOm46wkCo]. C’est un peu l’ancêtre des pancartes « Fier d’être moi » !

Dans l’art chrétien des enluminures, c’était la même vibe : le prépuçan comme badge officiel du Juif. Dans le Florilège de la France du Nord vers 1280, Aaron, le grand prêtre qui joue les DJ en allumant la ménorah du Temple, arbore ce bonnet comme une star de la Torah. Pas de doute, avec ce couvre-chef, tout le monde sait qui est le boss du chandelier !

Au XVe siècle, l’enluminure de la Bible traduite en français par Jean de Sy (Genèse, chap. VIII, 1 – Deutéronome, chap. XXXIV, 6) met le paquet : le bonnet phrygien devient l’accessoire fétiche pour illustrer la circoncision d’Abraham. C’est comme si les artistes disaient : « Bonnet pointu = club des circoncis, bienvenue ! »

Et au XVIe siècle, dans les Heures de Rohan, rebelote ! Le Juif qui rachète la tunique de Jésus au légionnaire romain est repérable à dix lieues grâce à son prépuçan. C’est comme un néon clignotant : « Juif en action, acheteur de reliques vintage ! »

Le bonnet phrygien te fait briller en révolutionnaire, initié, désigné juif ou un peu coquin. Alors, prêt à pointer ton bonnet ?

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Solange Sudarskis
Solange Sudarskis
Maître de conférences honoraire, chevalier des Palmes académiques. Initiée au Droit Humain en 1977. Auteur de plusieurs livres maçonniques dont le "Dictionnaire vagabond de la pensée maçonnique", prix littéraire de l'Institut Maçonnique de France 2017, catégorie « Essais et Symbolisme ».

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