dim 19 octobre 2025 - 14:10

Saviez-vous qu’il existe moins de 6 degrés de séparation… entre vous et n’importe quel Frère ou Sœur ?

Dans un monde où les connexions humaines semblent à la fois infinies et complexes, la théorie des six degrés de séparation fascine depuis des décennies. Cette idée, qui suggère qu’une personne peut être reliée à n’importe quel autre individu sur Terre à travers un maximum de six intermédiaires, a évolué avec le temps, notamment grâce à l’essor des technologies numériques. Aujourd’hui, avec l’avènement des réseaux sociaux, ce nombre serait même réduit à environ 4,74 degrés.

Mais que signifie cette théorie pour des communautés comme la Franc-maçonnerie, où les liens fraternels jouent un rôle central ? Explorons cette notion, son évolution et son application intrigante dans le contexte maçonnique, où la fraternité transcende les distances et les époques.

Les origines de la théorie des six degrés de séparation

Stanley Milgram – Département de psychologie de Harvard

L’idée des six degrés de séparation trouve ses racines dans les travaux du sociologue hongrois Frigyes Karinthy, qui, dès 1929, dans son essai « Chaînes« , avançait que les progrès de la communication et de la mondialisation rendaient le monde plus petit. Cependant, c’est l’expérience de Stanley Milgram (dont nous avions déjà parlé pour sa célèbre expérience sur la soumission à l’autorité), un psychologue américain, dans les années 1960, qui a véritablement popularisé cette théorie. Milgram a conduit une étude dans laquelle il a demandé à des habitants du Midwest américain d’envoyer une lettre à une cible spécifique à Boston via des connaissances personnelles.

Résultat : les lettres qui ont atteint leur destination l’ont fait en passant par une moyenne de cinq à six intermédiaires, renforçant l’hypothèse d’une connexion mondiale à travers six degrés.

Cette expérience, bien que limitée par son échantillon et ses biais (notamment une faible participation), a inspiré des recherches ultérieures, notamment dans le domaine des réseaux sociaux. La théorie repose sur l’idée que chaque individu est un nœud dans un vaste réseau, connecté à d’autres par des relations personnelles, professionnelles ou familiales. Avec environ 8 milliards d’habitants sur Terre, cette notion semble presque magique, mais elle illustre la puissance des liens humains.

L’évolution avec les technologies : de 6 à 4,74 degrés

L’arrivée d’Internet et des réseaux sociaux a transformé cette théorie. En 2011, une étude menée par Facebook, en collaboration avec l’Université de Milan, a analysé les données de 721 millions d’utilisateurs et 69 milliards d’amitiés virtuelles. Les résultats, publiés dans une analyse relayée par Le Monde, ont révélé que la distance moyenne entre deux personnes sur la plateforme était de 4,74 degrés, et non plus 6. Cette réduction s’explique par la rapidité et l’échelle des connexions numériques : un clic suffit pour lier deux individus à travers des amis communs, des groupes ou des intérêts partagés.

Un article de Wellcom, publié également en 2011, corrobore cette évolution. Avec des plateformes comme Twitter ou LinkedIn, la « loi des petits mondes » – un concept mathématique décrivant des réseaux où les distances sont courtes malgré un grand nombre de nœuds – s’applique plus que jamais. Les technologies ont effacé les barrières géographiques et sociales, permettant à des individus de continents différents de se connecter en quelques étapes. Par exemple, un Français peut être lié à un habitant du Japon via un ami commun sur Facebook, puis un collègue de ce dernier, réduisant ainsi les « sauts » nécessaires.

Cependant, cette moyenne de 4,74 degrés reste une approximation. Elle varie selon les régions, les cultures et les niveaux d’accès à la technologie. Dans les zones moins connectées, les six degrés originels pourraient encore prévaloir, tandis que dans les métropoles hyperconnectées, ce chiffre pourrait même descendre sous les 4.

La Franc-maçonnerie : un réseau fraternel unique

La Franc-maçonnerie, avec ses loges, ses rites et sa philosophie, offre un terrain fascinant pour appliquer la théorie des six degrés. Fondée sur des principes de fraternité, de solidarité et de transmission, cette organisation regroupe des millions de membres à travers le monde, organisés en obédiences nationales ou internationales. Chaque Franc-maçon est lié à d’autres par des rituels partagés, des symboles communs et une appartenance à une « chaîne d’union » qui transcende les frontières.

Historiquement, la Franc-maçonnerie a toujours fonctionné comme un réseau. Dès le XVIIIe siècle, les loges européennes échangeaient des correspondances, des visiteurs illustres (comme Voltaire ou Mozart) reliant des obédiences éloignées. Aujourd’hui, avec des organisations comme la Grande Loge Unie d’Angleterre ou la Grande Loge de France ou le Droit Humain, les connexions sont encore plus étroites. Un frère ou une sœur d’une loge parisienne peut être relié à un membre d’une loge au Congo-Brazzaville via un dignitaire commun ou une rencontre lors d’un convent international.

Dans ce contexte, les six degrés de séparation – ou plutôt 4,74 – prennent une dimension particulière. Prenons un exemple : un franc-maçon de Toulouse, initié en 2020, pourrait connaître son Vénérable Maître, qui a rencontré un dignitaire de la GLDF lors du Convent de 2025. Ce dignitaire, ayant visité une loge à Nice, pourrait avoir été présenté à un frère togolais présent à l’ouverture d’une nouvelle loge en 2025. Enfin, ce frère togolais pourrait avoir un contact avec un membre d’une obédience africaine reliée à une loge en Amérique latine. En quatre étapes, la boucle est bouclée, confirmant que le réseau maçonnique pourrait même être plus resserré que la moyenne mondiale.

Les spécificités maçonniques dans l’application des degrés

Ce qui distingue la Franc-maçonnerie dans cette dynamique, c’est la nature intentionnelle de ses liens. Contrairement aux réseaux sociaux, où les connexions peuvent être superficielles, les relations maçonniques sont forgées par des engagements mutuels, des initiations et une éthique partagée.

De plus, la Franc-maçonnerie utilise des outils comme les registres de membres, les correspondances inter-loges et les reconnaissances mutuelles pour maintenir une cohérence mondiale. Par exemple, un frère initié au Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA) à Lille peut être reconnu par une loge au Brésil, grâce à des protocoles établis par des suprêmes conseils. Cette structure formelle accélère les connexions, potentiellement ramenant les 4,74 degrés à un chiffre encore plus bas dans certains cas.

La mixité, comme pratiquée au DH, ajoute une autre couche d’intérêt. En intégrant des Sœurs et des Frères, l’obédience élargit son réseau à des sphères sociales et professionnelles diverses, augmentant les points de contact. Une Sœur travaillant dans l’éducation à Deauville pourrait être liée à un Frère diplomate au Togo via une chaîne de connaissances maçonniques, renforçant l’idée d’un réseau globalisé.

Implications et réflexions pour la fraternité maçonnique

L’application des six degrés – ou 4,74 – à la Franc-maçonnerie soulève des questions fascinantes. D’abord, elle renforce l’idée que la fraternité n’est pas qu’un idéal abstrait, mais une réalité concrète, mesurable par les liens qui unissent les membres. Un Franc-maçon peut se sentir proche d’un inconnu à l’autre bout du monde, non seulement par la solidarité, mais aussi par cette proximité numérique et rituelle.

Ensuite, cela pose un défi : dans un monde hyperconnecté, comment préserver la profondeur des relations maçonniques face à la superficialité potentielle des réseaux sociaux ? Enfin, cette théorie invite à repenser la mission maçonnique. Si chaque membre est à 4,74 degrés d’un autre, la Franc-maçonnerie pourrait devenir un vecteur d’influence sociale plus large, reliant des décideurs, des penseurs et des citoyens ordinaires pour promouvoir des valeurs comme la tolérance et la laïcité – des idéaux célébrés lors des 120 ans de la loi de 1905.

Conclusion : une fraternité au cœur d’un monde connecté

La théorie des six degrés de séparation, réduite à 4,74 grâce aux technologies, illustre la petitesse de notre monde et la puissance des réseaux humains. Dans la Franc-maçonnerie, cette idée prend une résonance particulière, où les degrés ne sont pas seulement des étapes de connexion, mais des étapes de fraternité. Que vous soyez un frère de Lille ou une sœur du Congo-Brazzaville, un lien maçonnique peut vous relier en quelques pas à n’importe quel autre membre de cette grande famille.

Ainsi, la prochaine fois que vous serrerez la main d’un Frère ou d’une Sœur en loge, souvenez-vous : derrière ce geste, un réseau mondial s’étend, reliant des millions d’âmes à travers des degrés qui, grâce à la technologie et à la fraternité, se rapprochent chaque jour un peu plus.

Cet article s’inspire des travaux de Frigyes Karinthy, Stanley Milgram, et des analyses de Facebook et Wellcom, adaptées au contexte maçonnique contemporain.

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Alice Dubois
Alice Dubois
Alice Dubois pratique depuis plus de 20 ans l’art royal en mixité. Elle est très engagée dans des œuvres philanthropiques et éducatives, promouvant les valeurs de fraternité, de charité et de recherche de la vérité. Elle participe activement aux activités de sa loge et contribue au dialogue et à l’échange d’idées sur des sujets philosophiques, éthiques et spirituels. En tant que membre d’une fraternité qui transcende les frontières culturelles et nationales, elle œuvre pour le progrès de l’humanité tout en poursuivant son propre développement personnel et spirituel.

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