De notre confrère italien notiziegeopolitiche.net – di Aldo A. Mola

Dans les méandres de l’histoire italienne, l’année 1925 marque un tournant décisif, non seulement pour l’ascension autoritaire de Benito Mussolini, mais aussi pour la disparition officielle de la franc-maçonnerie en tant qu’institution influente. Cette période, souvent éclipsée par d’autres événements plus médiatisés du fascisme, révèle une stratégie politique calculée visant à éliminer toute opposition organisée et à centraliser le pouvoir. À travers une analyse approfondie des dynamiques politiques, des lois promulguées et des motivations idéologiques.
Cet article explore comment Mussolini a utilisé l’interdiction de la franc-maçonnerie comme un levier pour instaurer un régime totalitaire, tout en questionnant les récits officiels et en mettant en lumière les complexités sous-jacentes de cette répression.
Contexte Politique : Une Italie Divisée et une Opportunité pour Mussolini

À l’aube des années 1920, l’Italie traverse une période de turbulence politique et sociale après la Première Guerre mondiale. Les élections de novembre 1920 pour les conseils communaux et provinciaux révèlent une fragmentation marquée : les fascistes, bien que soutenus par un gouvernement relativement stable sous Mussolini, font face à une opposition potentiellement unie. Les libéraux, les socialistes, les démocrates, les républicains et les catholiques du Parti populaire pourraient, en s’alliant, constituer une force majoritaire aux élections locales. Cependant, cette coalition reste fragilisée par l’« Aventin », une retraite symbolique des opposants qui boycottent les travaux parlementaires, laissant la Chambre aux mains des fascistes. Au Sénat, où les fascistes sont minoritaires, le danger est encore plus grand.
Dans ce contexte, Mussolini perçoit la franc-maçonnerie comme un « collant » dangereux pour ses adversaires. Depuis des décennies, les loges maçonniques, notamment celles du Grand Orient d’Italie, servent de creuset pour les idées libérales, laïques et démocratiques, attirant des figures politiques influentes comme Ernesto Nathan, ancien maire de Rome et Grand Maître. Cette organisation, avec ses réseaux transnationaux et son attachement à la liberté individuelle, représente un obstacle à l’unification idéologique que Mussolini cherche à imposer. Loin d’être une simple coïncidence, la répression de la maçonnerie s’inscrit dans une stratégie plus large pour neutraliser toute structure autonome susceptible de défier son autorité.
La Loi Antimaçonnique : Un Instrument de Contrôle
Le processus législatif contre la franc-maçonnerie débute avec un projet de loi intitulé « Régularisation de l’activité des associations, entités et instituts, ainsi que de l’appartenance à ceux-ci du personnel employé par l’État, les provinces, les communes et les instituts placés sous la tutelle de l’État, des provinces et des communes ». Adopté à l’unanimité par la Chambre des députés le 19 mai 1925, ce texte marque une étape clé. Cependant, c’est au Sénat, les 19 et 20 novembre 1925, que la loi prend sa forme définitive, ciblant explicitement les associations secrètes, dont la maçonnerie est la cible principale.

Lors des débats sénatoriaux, des figures comme Cesare Maria De Vecchi, quadrumvir fasciste et sénateur fraîchement nommé, soutiennent avec ferveur cette mesure, alimentant un climat d’hostilité envers les loges. Adriano De Cupis, rapporteur du projet, qualifie le droit au secret maçonnique de « droit au mensonge », tandis qu’Enrico Corradini dénonce une « mitologie razionaliste » et une « action internazionalista » contraires aux intérêts nationaux. Ces discours reflètent une propagande fasciste visant à diaboliser la maçonnerie comme un ennemi intérieur, accusée de saper la religion et l’unité nationale. Même Armando Diaz, duc de la Victoire, se rallie à la cause, rejetant une proposition antérieure d’Ernesto Nathan d’intégrer des éléments maçonniques dans l’armée, bien que les preuves de son appartenance à la maçonnerie restent absentes.
Francesco Ruffini, sénateur libéral, oppose une résistance symbolique, citant Machiavel : « Aucune force ne dompte, aucun temps ne consume, aucun mérite ne contrebalance le nom de la liberté. » Filippo Crispolti, catholique engagé, plaide pour une distinction entre associations secrètes et licites, évoquant même les « massons repentis », tandis que Mussolini, piqué au vif par des allusions à ses propres démêlés judiciaires, réplique avec ironie. Cette joute verbale masque une réalité : la loi, promulguée le 26 novembre 1925 sous le numéro 2029, interdit aux membres des associations secrètes d’occuper des fonctions publiques, sonnant le glas de la présence maçonnique dans la sphère politique italienne.
Une Répression Antérieure : Les Années de Violence

Avant cette législation, la franc-maçonnerie subit une vague de répression brutale orchestrée par les chemises noires. Dès 1923, des assauts contre les loges se multiplient, encouragés par une circulaire du Parti national fasciste datée du 14 avril 1925, qui qualifie la maçonnerie de « mentalité démocratique nefaste » et de soutien aux oppositions parlementaires. Cette violence, tolérée par le ministre de l’Intérieur Luigi Federzoni, connu pour son antimasonisme, vise à briser les structures maçonniques avant même leur interdiction officielle. Des intellectuels comme Piero Gobetti et Giovanni Amendola, ainsi que des journalistes critiques, sont agressés, tandis que les propriétaires de journaux sont contraints de se séparer de collaborateurs indésirables.
Cette campagne de terreur, débutée après la marche sur Rome en octobre 1922, s’intensifie en 1925, coïncidant avec les « lois fascistissimes » qui abolissent la liberté de presse et de grève, dissolvent les syndicats et partis non fascistes, et renforcent le pouvoir exécutif. L’assassinat de Giacomo Matteotti en 1924, dénonçant les fraudes électorales, avait déjà révélé la brutalité du régime, mais l’interdiction de la maçonnerie parachève cette transition vers un État totalitaire. Les loges, pillées et fermées, perdent leur rôle de refuge pour les idées libérales, laissant place à une idéologie unique sous la férule de Mussolini.
Motivations Idéologiques et Politiques : Un Rapprochement avec l’Église

Les raisons de cette croisade antimassonique sont multiples. Sur le plan idéologique, Mussolini, ancien socialiste, avait déjà montré son hostilité envers la maçonnerie lors du congrès d’Ancona en 1914, où il fit expulser les maçons du Parti socialiste italien pour incompatibilité avec les principes de classe. Cette aversion s’accentue après la guerre, lorsque la montée du Parti populaire catholique, soutenu par l’Église, menace la laïcité défendue par les loges. Pour consolider son pouvoir, Mussolini cherche à s’allier avec le Vatican, un objectif qui culmine avec les Pactes du Latran en 1929. La maçonnerie, perçue comme antireligieuse et internationaliste, devient un bouc émissaire idéal pour apaiser les tensions avec l’Église.
Sur le plan politique, l’interdiction répond à une nécessité pragmatique. En éliminant la maçonnerie, Mussolini coupe un lien unificateur entre les oppositions, facilitant leur marginalisation. De plus, cette mesure renforce son image de chef incontesté, libéré des influences extérieures. Pourtant, des historiens soulignent que cette rupture n’était pas inévitable : avant 1925, certains maçons avaient soutenu le fascisme naissant, voyant en Mussolini un rempart contre le bolchevisme. Cette alliance tacite s’effondre lorsque le régime opte pour une centralisation totale, incompatible avec l’autonomie des loges.
Une Perspective Critique : Au-delà du Récit Officiel

Le récit dominant présente l’interdiction de 1925 comme une victoire du fascisme sur un ennemi juré. Cependant, une analyse critique révèle des nuances. L’absence de preuves solides sur l’influence réelle de la maçonnerie dans l’opposition – hormis son rôle symbolique – suggère que cette répression pourrait avoir été exagérée pour justifier une prise de contrôle plus large. De plus, des figures comme Mussolini lui-même, malgré ses discours, auraient pu avoir des liens passés avec des réseaux maçonniques, une hypothèse alimentée par son séjour en Suisse et ses contacts avec des cercles progressistes avant 1914.
La destruction des archives maçonniques lors des saccages complique toute vérification, laissant place à des spéculations. Certains estiment que cette campagne servit aussi à détourner l’attention des échecs économiques et sociaux du régime, comme la crise agricole ou les tensions avec les industriels. Enfin, l’alliance avec l’Église, bien que stratégique, ne fut pas sans friction, les catholiques restant méfiants envers un régime qui avait initialement flirté avec des idées anticléricales.
Héritage et Réflexion Contemporaine
L’interdiction de la franc-maçonnerie en 1925 marque la fin d’une ère pour les loges italiennes, qui ne retrouvent une certaine liberté qu’après la chute du fascisme en 1943. Le Grand Orient d’Italie, reconstitué après la guerre, porte encore les cicatrices de cette répression, tout en continuant à promouvoir les idéaux de liberté et de fraternité. Cette période interroge les relations entre pouvoir politique et organisations indépendantes, un débat toujours d’actualité dans les démocraties modernes face aux risques d’autoritarisme.
En somme, l’anéantissement de la maçonnerie par Mussolini en 1925 fut un acte stratégique, autant idéologique que politique, visant à consolider un régime totalitaire. Si cette mesure a réussi à briser une opposition potentielle, elle a aussi révélé les fragilités d’un système dépendant de la répression pour survivre. Cette page d’histoire invite à réfléchir sur la valeur des libertés associatives et sur les dangers d’une uniformisation imposée, des leçons qui résonnent encore dans notre époque marquée par des tensions entre unité et diversité.
Le respect de l’autonomisation des Loges et l’engagement pour la souveraineté institutionnelle maçonnique traduisent tant bien que mal la volonté indépendantistes et apolitique des cercles ésotériques qui ma foi ne font pas le contrepoids face au rouleau compresseur de certains pouvoirs politiques à régime autoritariste en mal à la gestion de la conciliation d’avec les organisations indépendantes.
La question est bien posée et invite sérieusement à réfléchir sur les valeurs des libertés associatives et sur les dangers d’une uniformisation imposée par certains pouvoirs politiques.
Cette page convoque en filigrane le principe maçonnique de <> qui appelle à l’unité et à la conciliation, mais aussi à la défense de la justice face à l’abus du pouvoir.