mer 09 juillet 2025 - 22:07

Fêtes religieuses dans l’Égypte antique : 1 jour sur 3

Célébration de la vie et du divin, et leurs parallèles avec la Franc-maçonnerie

Dans l’Égypte antique, la religion était le cœur battant de la société, tissant un lien indissoluble entre le divin, le cosmos et l’existence humaine. Les fêtes religieuses, nombreuses et variées, rythmaient l’année, célébrant les dieux, les cycles naturels et les événements dynastiques. Ces moments sacrés, bien plus que de simples réjouissances, étaient des actes rituels visant à maintenir l’ordre cosmique, ou Maât. Leur richesse symbolique et leur dimension initiatique offrent des parallèles fascinants avec la franc-maçonnerie, une tradition initiatique moderne qui, à travers ses rituels et ses symboles, explore des thèmes similaires d’harmonie, de transformation intérieure et de quête de la lumière.

Cet article examine le nombre de jours consacrés aux fêtes religieuses dans l’Égypte antique, leur matérialisation, et les liens possibles avec les pratiques maçonniques, en particulier dans les rites d’inspiration égyptienne comme Misraïm et Memphis.

Les Fêtes Religieuses dans l’Égypte Antique : Une Estimation du Nombre de Jours

Un Calendrier Structuré par le Sacré

Le calendrier égyptien civil, basé sur un cycle solaire de 365 jours, était divisé en trois saisons de quatre mois de 30 jours chacune – Akhet (inondation), Peret (émergence) et Shemou (récolte) – auxquelles s’ajoutaient cinq jours épagomènes pour aligner le calendrier sur l’année solaire.

Selon les inscriptions du temple funéraire de Ramsès III à Medinet-Habou (XIIe siècle av. J.-C.), environ 105 jours par an étaient officiellement chômés pour des fêtes religieuses ou des commémorations, soit près d’un tiers de l’année. Ces jours incluaient des célébrations dédiées aux divinités majeures, aux cycles agricoles (crue du Nil, semailles, moissons) et aux événements dynastiques, tels que les couronnements ou les jubilés royaux. Les jours fériés fixes comprenaient les 1er, 2, 4, 6, 8, 15, 29 et 30 de chaque mois, auxquels s’ajoutaient des fêtes spécifiques variant selon les régions, les époques et les cultes locaux.Les cinq jours épagomènes, situés du 14 au 18 juillet, étaient particulièrement sacrés, marquant les naissances mythiques des grands dieux d’État : Osiris, Horus l’Ancien, Seth, Isis et Nephtys.

Considérés comme hors du temps ordinaire, ces jours étaient empreints de rituels solennels et de célébrations. Les grandes fêtes nationales, comme la fête d’Opet à Thèbes ou la Belle Fête de la Vallée, pouvaient s’étendre sur plusieurs jours, voire semaines, augmentant le nombre total de jours dédiés au sacré. Par exemple, la fête d’Opet, sous le Nouvel Empire, durait jusqu’à 27 jours sous Ramsès II, bien que sa durée ait varié selon les règnes.

Variabilité selon les Époques et les Régions

Le nombre de jours chômés fluctuait selon les périodes et les localités. Sous l’Ancien Empire (env. 2686-2181 av. J.-C.), les fêtes étaient souvent liées aux cycles agricoles et aux divinités locales, tandis que sous le Nouvel Empire (env. 1550-1070 av. J.-C.), les célébrations nationales, comme celles dédiées à Amon-Rê à Thèbes, prenaient une ampleur spectaculaire. Hérodote, dans son Histoire (Livre II), décrit la fête de Bastet à Bubastis comme attirant jusqu’à 700 000 pèlerins, bien que ce chiffre soit probablement exagéré.

À la Basse Époque (env. 664-332 av. J.-C.), le culte des animaux sacrés, comme le taureau Apis, donnait lieu à des rituels prolongés, notamment des jeûnes lors de la mort de l’Apis, ajoutant des jours de dévotion. Ainsi, si 105 jours constituent une moyenne, certaines années pouvaient inclure davantage de jours fériés en fonction des événements dynastiques ou des cycles lunaires, qui influençaient certaines fêtes.

Matérialisation des Fêtes Religieuses

Les fêtes religieuses égyptiennes étaient des manifestations complexes du sacré, intégrant processions, rituels, pèlerinages et festins pour actualiser les mythes et renforcer l’ordre cosmique. Voici comment elles prenaient forme :

  • Processions et Barques Sacrées

Les grandes fêtes, comme la fête d’Opet ou la Belle Fête de la Vallée, étaient marquées par des processions spectaculaires. La statue d’un dieu, comme Amon-Rê, était transportée dans une barque sacrée, souvent en bois doré ou incrustée de pierres précieuses, depuis le temple de Karnak jusqu’à Louxor ou les nécropoles de la rive ouest du Nil. Ces processions, accompagnées de musique (harpes, flûtes, sistres), de danses et de chants, permettaient aux fidèles d’approcher le divin, un privilège rare, car l’accès aux sanctuaires était généralement réservé aux prêtres. La Belle Fête de la Vallée, par exemple, voyait la triade thébaine (Amon, Mout, Khonsou) visiter les tombes royales, honorant les défunts et renforçant le lien entre les vivants et l’au-delà.

  • Mystères et Représentations Mythiques

De nombreuses fêtes incluaient des « mystères », des représentations théâtrales des mythes divins, comme la passion d’Osiris, la quête d’Isis ou le combat entre Horus et Seth. Ces performances, jouées ou narrées par des prêtres, permettaient aux participants de revivre symboliquement la victoire de l’ordre (Maât) sur le chaos (Isfet). La fête de Wepet-Renpet, marquant le Nouvel An égyptien, incluait des rituels liés à la mort et à la renaissance d’Osiris, accompagnés de chants comme les Lamentations d’Isis et Nephtys, qui évoquaient la résurrection du dieu. Ces mystères, souvent réservés à une élite initiée, avaient une dimension spirituelle profonde, comparable à des rituels initiatiques.

  • Oracles et Interaction avec le Divin

Lors des processions, les fidèles pouvaient consulter les dieux via des oracles. Ils posaient des questions oralement ou par écrit, sur des fragments de papyrus ou de poterie, l’un affirmatif, l’autre négatif. Les porteurs de la barque sacrée, guidés par la volonté divine, avançaient ou reculaient pour indiquer la réponse, un processus décrit par Hérodote et attesté par des inscriptions. Ces oracles renforçaient la foi en une interaction directe avec le divin, liant la communauté à la Maât.

  • Pèlerinages et Dévotion Populaire

Les pèlerinages étaient un aspect clé des fêtes. À Abydos, centre du culte d’Osiris, les fidèles érigeaient des stèles votives pour obtenir la faveur du dieu dans l’au-delà. À Bubastis, la fête de Bastet attirait des foules pour des célébrations joyeuses, mêlant danses, musique et consommation de vin, comme le rapporte Hérodote. Ces fêtes, associées à la fertilité et à la crue du Nil, combinaient dévotion spirituelle et liesse populaire, renforçant le lien entre le peuple et les dieux.

  • Festins, Danses et Offrandes
peinture égyptienne
décoration égyptienne

Les fêtes s’accompagnaient de festins, où la bière et le vin coulaient à flots, et de danses, comme les performances rythmées par des claquettes et des flûtes lors de la fête de Bastet. Les offrandes, allant de nourriture (pain, oies, fruits) à des objets votifs, étaient déposées dans les temples pour apaiser les dieux. À la mort du taureau Apis, des jeûnes et des pratiques ascétiques marquaient la dévotion, illustrant la diversité des expressions religieuses.

  • Fêtes Dynastiques et Rituels de Renouveau

Les fêtes dynastiques, comme la fête Sed (Heb-Sed), célébrée après 30 ans de règne ou plus tôt pour certains pharaons, renouvelaient la force vitale du roi à travers des rituels complexes, incluant des courses symboliques et l’érection du pilier djed, symbole de stabilité et de renaissance. La fête Sokar, l’une des plus anciennes, impliquait des processions de bateaux et des rituels liés à la mort et à la résurrection, souvent associés à Osiris.

Parallèles avec la Franc-Maçonnerie

Bien que séparées par des millénaires et des contextes culturels, les fêtes religieuses égyptiennes et la franc-maçonnerie partagent des affinités dans leur approche du symbolisme, de l’initiation et de l’harmonie cosmique, particulièrement dans les rites maçonniques d’inspiration égyptienne comme Misraïm et Memphis. Voici une exploration détaillée de ces parallèles :

  • Le Symbolisme Initiatique
Dieu Egyptien Isis
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Les fêtes égyptiennes, avec leurs mystères et processions, étaient des expériences initiatiques permettant aux participants de se connecter au divin à travers des rituels symboliques. Les représentations de la mort et de la renaissance d’Osiris, par exemple, offraient une expérience transformative, où le fidèle revivait le mythe pour s’aligner avec la Maât. Dans la franc-maçonnerie, l’initiation est au cœur de la démarche, notamment dans le cabinet de réflexion, où le néophyte médite sur sa condition humaine face à des symboles comme le sablier, le crâne ou VITRIOL. Cette épreuve, marquant le passage de l’obscurité à la lumière, évoque les rituels égyptiens où la renaissance spirituelle était centrale.

  • L’Harmonie Cosmique et l’Ordre Universel

Les Égyptiens organisaient leurs fêtes pour maintenir la Maât, l’ordre cosmique, face au chaos (Isfet). Les processions et offrandes étaient des actes rituels pour soutenir les dieux, qui préservaient l’univers. La franc-maçonnerie partage cette vision d’un ordre universel, incarné par le Grand Architecte de l’Univers (GADLU). Le pavement mosaïque, avec ses carrés noirs et blancs, symbolise l’harmonie des opposés, un concept proche de la Maât. Les rituels maçonniques, rythmés et ordonnés, alignent l’initié avec cet ordre, tout comme les fêtes égyptiennes reliaient la communauté au cosmos.

  • La Fraternité et l’Égrégore
temple égyptien illuminé
temple des Ramsès à Louxor

Les fêtes égyptiennes, comme celles de Bastet ou d’Opet, réunissaient des communautés dans une célébration collective, créant une énergie spirituelle partagée. Les tenues maçonniques, où les frères et sœurs s’unissent dans un égrégore, reflètent cette dynamique. Les agapes, repas fraternels suivant les tenues, évoquent les festins égyptiens, où la nourriture, la musique et la danse renforçaient les liens communautaires. Dans les deux traditions, le collectif transcende l’individu, favorisant une communion spirituelle.

  • Le Temps Sacré et Cyclique

Les fêtes égyptiennes, comme Wepet-Renpet ou les jours épagomènes, soulignaient la nature cyclique du temps, où la mort et la renaissance se répétaient éternellement. La franc-maçonnerie adopte une vision similaire à travers ses tenues régulières, rythmées par les cycles lunaires ou solaires, où chaque rituel est une opportunité de renouveler l’initiation. Cette cyclicité, proche du concept grec d’Aion (l’éternité cyclique), relie l’homme au divin dans les deux traditions, transformant le temps en un espace sacré.

  • L’Influence Hermétique et le Rôle de Thot

Les rites maçonniques égyptiens s’inspirent de l’hermétisme, qui synthétise les traditions égyptiennes et grecques. Thot, dieu égyptien de la sagesse, de l’écriture et du temps, associé à Hermès Trismégiste, jouait un rôle clé dans les fêtes égyptiennes, notamment en tant que scribe des dieux et gardien de la mémoire. Dans la franc-maçonnerie, Thot est évoqué dans les rites égyptiens, où il donne son nom au secrétaire, gardien des archives, et inspire le symbolisme du fil à plomb, outil d’alignement avec la vérité. La maxime hermétique « ce qui est en haut est comme ce qui est en bas », centrale dans les rites maçonniques, relie les fêtes égyptiennes, qui unissaient le terrestre et le divin, au travail initiatique de la loge.

  • La Dimension Initiatique des Rituels

Les mystères égyptiens, joués lors des fêtes d’Osiris, étaient des rituels initiatiques réservés à une élite, où les participants revivaient la mort et la renaissance pour s’élever spirituellement. La franc-maçonnerie, avec ses grades progressifs (apprenti, compagnon, maître), adopte une structure similaire, où l’initié traverse des épreuves pour accéder à une compréhension plus profonde. Les oracles égyptiens, permettant une communication avec le divin, trouvent un parallèle dans les débats maçonniques, où la parole circule pour éclairer la vérité collective.

  • La Transformation Intérieure

Les fêtes égyptiennes, en actualisant les mythes, invitaient les participants à se transformer en s’alignant avec la Maât. La franc-maçonnerie, à travers le travail sur la pierre brute, propose une transformation similaire, où l’initié polisse ses imperfections pour atteindre la lumière. Les deux traditions partagent une vision de l’homme comme un être perfectible, capable de s’élever par l’effort et la discipline spirituelle.

Une Quête Intemporelle de Lumière

Dans l’Égypte antique, environ 105 jours par an étaient consacrés à des fêtes religieuses, des moments sacrés où processions, mystères, oracles, pèlerinages et festins reliaient l’homme au divin et au cosmos. Ces célébrations, loin d’être de simples réjouissances, étaient des actes rituels pour maintenir l’ordre universel et célébrer la vie, la mort et la renaissance. La franc-maçonnerie, avec ses rituels symboliques et sa quête d’harmonie, partage des affinités profondes avec ces pratiques, notamment dans les rites égyptiens comme Misraïm, où les influences de Thot et de l’hermétisme sont prégnantes.

Entre les barques sacrées du Nil, portant les dieux à la rencontre des fidèles, et les colonnes du temple maçonnique, encadrant la quête de lumière, se dessine une vision commune : celle d’un homme cherchant à transcender sa condition par le rituel, la fraternité et l’alignement avec un ordre supérieur. Comme les Égyptiens renouvelaient la Maât à travers leurs fêtes, les francs-maçons construisent leur temple intérieur, unissant le terrestre et le divin dans une quête intemporelle de vérité et d’harmonie.


Sources :

  • Lachaud, René. L’invisible présence, Les dieux de l’Égypte pharaonique Kybalion.
  • Hérodote, Histoire, Livre II.
  • Bunson, Margaret. Encyclopedia of Ancient Egypt.
  • Meskell, Lynn. Cité dans Nardo, Living in Ancient Egypt.
  • Encyclopædia Universalis, « Égypte antique : La religion ».
  • World History Encyclopedia, « Fêtes dans l’Égypte ancienne ».
  • Wikipédia, « Fêtes dans l’Égypte antique ».
  • jfbradu.free.fr, « L’Égypte antique ».
  • Egyptian Wisdom Center, « Les anciennes fêtes égyptiennes/chrétiennes ».
  • Bonardel, Françoise. L’hermétisme.
  • Gordon, Pierre. Le Mythe d’Hermès.

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Pierre d’Allergida
Pierre d’Allergida
Pierre d'Allergida, dont l'adhésion à la Franc-Maçonnerie remonte au début des années 1970, a occupé toutes les fonctions au sein de sa Respectable Loge Initialement attiré par les idéaux de fraternité, de liberté et d'égalité, il est aussi reconnu pour avoir modernisé les pratiques rituelles et encouragé le dialogue interconfessionnel. Il pratique le Rite Écossais Ancien et Accepté et en a gravi tous les degrés.
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