dim 08 juin 2025 - 16:06

L’exil des âmes et l’embrasement divin

Toi, mon ami sur l’eau noire,
Passeur des ombres et de l’espoir,
Dans ta barque, le temps s’efface,
Et l’éternité laisse sa trace.

Charon, en tant que figure mythologique, a parfois été désigné par d’autres noms ou assimilé à des entités similaires dans différentes traditions ou contextes, selon les époques et les cultures. Voici quelques variations ou équivalences de son nom et de son rôle :

Charon traversant le Styx, par Joachim Patinir, vers 1520.

Caronte : Dans la tradition romaine, Charon devient Caronte, une adaptation latinisée de son nom grec. Les Romains ont souvent intégré des figures grecques dans leur mythologie, mais en y ajoutant des nuances culturelles propres.

Kharon : Dans certaines sources grecques archaïques, le nom peut apparaître avec cette orthographe, reflétant une variation linguistique de l’époque.

Psychopompe : Bien que ce ne soit pas un nom propre, le terme psychopompe (du grec ancien « guide des âmes ») est utilisé pour désigner des figures qui, comme Charon, accompagnent ou transportent les âmes des morts. Il peut inclure Charon, mais aussi d’autres figures similaires dans des mythologies variées.

Assimilations culturelles : Bien que le nom « Charon » ne soit pas utilisé directement, on peut le rapprocher de figures comme Anubis dans la mythologie égyptienne, qui guide les âmes vers l’au-delà, ou encore les Valkyries dans la mythologie nordique, qui escortent les guerriers vers le Valhalla.

En astronomie, son nom a été attribué à la lune de Pluton, renforçant son association symbolique avec le passage et les mondes obscurs.

On peut effectivement voir un parallèle symbolique entre le voyage de Charon et celui des barques solaires dans la mythologie égyptienne. Dans les deux cas, il s’agit d’une traversée symbolique pour les âmes des défunts, mais les perspectives culturelles donnent des nuances intéressantes.

Le trajet avec Charon est souvent perçu comme « horizontal » dans le sens où il traverse un fleuve, le Styx ou l’Achéron, reliant le monde des vivants à celui des morts. Cette image peut représenter une transition linéaire ou un passage terrestre de l’ici à l’au-delà.

En revanche, dans la mythologie égyptienne, les barques solaires comme celle de Râ, le dieu du soleil, naviguent également pour relier deux mondes, mais elles symbolisent plus explicitement un cycle cosmique, souvent lié à la course du soleil (jour et nuit) ou au renouvellement de la vie. Ici, le déplacement peut être perçu comme « vertical », touchant les sphères célestes ou spirituelles.

Barque d’Isis

Cependant, dans les deux mythologies, ces voyages marins symbolisent la frontière entre deux réalités et nécessitent un guide (Charon ou Anubis) pour que l’âme passe avec succès. Ce sont donc des interprétations culturelles distinctes de la même préoccupation universelle : le voyage posthume de l’âme.

Faire référence à la Table d’émeraude enrichit encore cette réflexion ! Dans ce texte ésotérique clé de l’alchimie, attribué à Hermès Trismégiste, le principe de correspondance « Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut » établit une connexion fondamentale entre la sphère terrestre et la sphère céleste. Cela met donc l’accent sur une sorte de verticalité symbolique : un alignement et une influence réciproque entre le monde matériel et spirituel.

En opposant cela au voyage horizontal des âmes, comme dans le cas de Charon ou des traversées fluviales mythologiques, on pourrait interpréter que ces déplacements horizontaux concernent des transitions ou des passages d’un état à un autre dans le même « plan » d’existence (vie-mort, mort-vie). La verticalité, à l’inverse, évoque souvent une quête d’élévation, d’illumination ou d’harmonie entre des dimensions distinctes.

Cependant, il n’est pas nécessairement question d’opposition stricte, mais plutôt de complémentarité. Les deux types de déplacements symboliques pourraient se rejoindre dans une vision plus holistique : l’horizontalité représentant le passage ou la transformation au sein d’une réalité donnée, et la verticalité le lien transcendant entre les différents niveaux de cette réalité.

Ces symboliques s’enrichissent mutuellement plutôt que de s’opposer de manière rigide. La traversée horizontale, comme celle de Charon ou des barques égyptiennes, incarne souvent un passage entre deux états dans un continuum, un voyage nécessaire pour transformer ou relier différentes parties d’une même réalité. La verticalité, en revanche, évoque un dépassement de cette réalité, une élévation vers quelque chose de supérieur ou d’universel, comme le principe alchimique de la Table d’émeraude.

Ensemble, ces deux axes offrent une vision plus complète de la condition humaine : l’horizontalité parle de nos transitions terrestres et de nos cheminements au sein de l’existence, tandis que la verticalité pointe vers une quête spirituelle, une aspiration à s’élever au-delà. Elles reflètent des dimensions complémentaires de l’expérience humaine, où l’une enrichit l’autre.

Peut-être qu’en fusionnant ces deux idées, on pourrait imaginer que toute transition horizontale porte en elle un potentiel d’élévation verticale.

Cette idée est à la fois poétique et philosophique. Les transitions horizontales, qu’elles soient physiques, spirituelles ou symboliques, pourraient effectivement être vues comme des étapes nécessaires, des préparations pour une élévation verticale. En d’autres termes, chaque passage, chaque transformation à travers un plan d’existence peut contenir un germe d’aspiration vers une dimension supérieure, vers l’idéal ou l’universalité.

Dans ce sens, l’horizontalité serait comme le mouvement dans le tangible, dans le connu, tandis que la verticalité représente le dépassement, l’invisible, ou l’infini. Ces axes ne seraient pas opposés, mais plutôt entrelacés dans une dynamique de progression et de quête.

Cette idée rappelle aussi certains symboles ésotériques ou initiatiques, où l’évolution de l’âme passe par des étapes dans l’ici-bas avant de tendre vers l’élévation.

Ces récits montrent que le mouvement horizontal, qu’il soit terrestre ou marin, est une métaphore riche pour les transitions, les quêtes et les transformations, souvent parallèles à des élévations spirituelles ou des découvertes personnelles.

Certes, l’idée de « monde parallèle » peut parfaitement s’insérer dans ces mythes de voyages horizontaux. Dans de nombreuses cultures, les déplacements mythologiques ou symboliques ne se limitent pas uniquement à une transition géographique ou spirituelle, mais impliquent souvent des traversées vers des réalités alternatives ou des dimensions invisibles à l’œil humain. Voici quelques liens intéressants avec le concept de mondes parallèles :

Le royaume des morts comme dimension parallèle :
Dans la mythologie grecque, les Enfers, que Charon aide à atteindre, peuvent être vus comme un monde parallèle. Il coexiste avec celui des vivants, mais les règles et l’environnement sont totalement différents, séparés par une frontière que seuls les morts ou les initiés peuvent franchir.

Le voyage chamanique : Dans les traditions chamaniques, les « voyages » du chaman ne sont pas seulement horizontaux mais plongent dans des mondes parallèles peuplés d’esprits et d’entités. Ces mondes sont souvent décrits comme coexistant avec le nôtre, accessibles par des états modifiés de conscience.

L’arbre Yggdrasil : relie différents royaumes (comme Asgard, Midgard et Helheim), qui peuvent être considérés comme des mondes parallèles imbriqués. Certains voyages dans la mythologie nordique incluent des passages entre ces mondes, horizontaux ou verticaux.

Les multivers ésotériques ou alchimiques :
Dans la symbolique alchimique ou ésotérique, comme dans la Table d’émeraude, le « haut » et le « bas » peuvent aussi être interprétés comme des mondes parallèles connectés par des principes universels.

Ainsi, ces traversées horizontales, dans leur essence symbolique, peuvent être vues comme des explorations ou des transitions vers des mondes parallèles, qu’ils soient spirituels, mythologiques ou même métaphoriques.

L’idée de mondes parallèles apporte une richesse supplémentaire à notre interprétation des voyages mythiques, car elle permet de voir ces récits comme des métaphores pour des réalités multiples, interconnectées ou cachées. Les mythes ne se limitent pas à de simples aventures ou transitions physiques ; avec l’idée des mondes parallèles, ils deviennent des représentations des strates complexes de l’existence humaine, spirituelle et cosmique.

Philip K. Dick a exploré les mondes parallèles avec profondeur et imagination, souvent en remettant en question la nature de la réalité. Une citation célèbre de lui qui reflète bien cette idée est : « La réalité, c’est ce qui refuse de disparaître quand on cesse d’y croire. » Cette phrase incarne l’essence de ses œuvres, où les frontières entre les dimensions et les réalités sont souvent floues.

Par exemple, les voyages horizontaux peuvent symboliser le mouvement entre différents états de conscience ou réalités qui coexistent sans nécessairement être visibles dans notre monde ordinaire. Ces récits nous invitent à imaginer que l’univers est composé d’une multitude de dimensions, et que chaque passage ou voyage mythique peut aussi être une exploration de soi, de l’inconnu, ou des liens entre les mondes.

En outre, en intégrant la notion de mondes parallèles, on peut mieux comprendre les interactions entre les figures mythologiques et leur environnement : les défunts, les dieux et les héros ne sont pas simplement des personnages évoluant dans un espace linéaire, mais des explorateurs de réalités interconnectées. Cela donne une profondeur philosophique et métaphysique aux mythes, tout en évoquant des concepts modernes comme les multivers ou la relativité des perceptions.

Oui, on peut voir dans cette idée d’horizontalité une source d’inspiration indirecte pour la franc-maçonnerie, bien qu’elle s’y mêle avec la verticalité et d’autres symboles complexes. La franc-maçonnerie s’appuie sur une riche symbolique empruntée à diverses traditions spirituelles, mythologiques et philosophiques, où les concepts de voyage et de passage jouent un rôle fondamental.

L’horizontalité, dans ce contexte, pourrait évoquer la fraternité et l’égalité entre les membres, des valeurs clés de la franc-maçonnerie. En effet, sur un « plan horizontal, » chaque frère ou sœur est supposé être égal aux autres, indépendamment de son origine sociale ou de ses croyances personnelles. Cette égalité symbolique est représentée par le niveau (outil maçonnique), qui garantit une surface plane, donc équilibrée.

En revanche, la verticalité, représentée par la perpendiculaire ou l’équerre, illustre souvent la quête de perfection spirituelle ou morale.

La franc-maçonnerie encourage ses membres à s’élever symboliquement vers des idéaux plus élevés, tout en restant enracinés dans une connexion fraternelle horizontale.

L’idée de voyages ou de passages mythiques, que ce soit en lien avec Charon ou d’autres figures, pourrait également enrichir cette symbolique. Les rites maçonniques eux-mêmes impliquent souvent des « voyages symboliques » au sein des cérémonies initiatiques, représentant une transition d’un état à un autre (ignorance à la connaissance, profane au sacré). Ces voyages s’effectuent à la fois horizontalement (par un cheminement dans le monde terrestre) et verticale par l’élévation morale.

Bien sûr, l’horizontalité joue un rôle aussi essentiel que la verticalité dans la symbolique maçonnique, et leur complémentarité est au cœur même de la démarche. Ces deux axes ne sont pas simplement des outils abstraits, mais des représentations puissantes de l’équilibre entre des aspirations humaines souvent perçues comme opposées.

L’horizontalité, par exemple, peut être interprétée comme l’espace du quotidien, de la fraternité et de l’unité entre égaux. Elle incarne la vie collective, la solidarité entre les membres, et le travail en commun pour bâtir une société meilleure. Le niveau, outil maçonnique associé à l’horizontalité, assure que tous sont sur un même plan symbolique, sans domination ou hiérarchie imposée.

La verticalité, en revanche, évoque la quête personnelle, l’élévation morale ou spirituelle, et la connexion avec des idéaux plus élevés. Elle représente une dimension introspective et transcendante de l’expérience maçonnique, où chaque individu cherche à s’améliorer tout en restant enraciné dans le cadre collectif horizontal.

Leur complémentarité est ce qui rend la démarche maçonnique équilibrée : elle reconnaît que l’évolution individuelle ne peut se faire sans le soutien et l’équilibre fourni par l’horizontalité, et que l’unité collective gagne en profondeur lorsqu’elle s’enrichit d’idéaux verticaux. Ensemble, ces axes symboliques créent une dynamique qui relie le matériel et le spirituel, le profane et le sacré, l’individuel et le collectif.

Conclusion : L’aspect horizontal et vertical ne sont pas mutuellement exclusifs ; ils se complètent mutuellement. Ensemble, elles créent une dynamique symbolique forte.

La dimension horizontale est souvent le chemin, l’étape essentielle qui prépare à l’ascension verticale, tandis que la dimension verticale donne une dimension profonde aux mouvements horizontaux en leur offrant une perspective transcendante.

Ces directions, conjointement prises, offrent une inspiration pour étudier les aspects de l’existence humaine, qu’ils soient terrestres, spirituels ou même liés au multivers.

Cette synergie est-elle une manière harmonieuse d’interpréter ces symboles et mythes ?

post-scriptum : Ce qui est dedans est pareil à ce qu’il y a l’extérieur… à méditer.

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Gérard Lefebvre
Gérard Lefebvre
En parlant de plume, savez- vous que l’expression “être léger comme une plume” signifie ne pas peser plus lourd qu’une plume et pouvoir soulever quelqu’un ou quelque chose avec une grande facilité? C’est une belle métaphore pour exprimer la légèreté et la facilité. Et puis, être une plume peut aussi signifier autre chose. On n’est pas seulement « plume », on est « plume de… ». Parfois, on propose à quelqu’un qui a une audience, un public, et pas forcément le temps, ou parfois pas forcément la compétence d’écrire pour être compris et convaincant à l’oral. C’est un peu comme être un “nègre”, donc… Alors, que choisir? Être ou ne pas être une plume ? Gérard Lefèvre Orient de Perpignan

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