L’énigme des Vierges Noires.
Quel lien peut bien unir les énigmatiques Vierges Noires à la franc-maçonnerie ? À première vue, ces deux univers semblent éloignés, et pourtant, ils partagent un même langage, celui du symbolisme initiatique. Car, parmi les nombreux chemins qui mènent à la connaissance, la franc-maçonnerie n’est qu’une voie parmi d’autres, une voie qui, comme les Vierges Noires, plonge ses racines dans les mystères les plus anciens de l’humanité.

Les Vierges Noires émergent dans l’histoire vers le XIIe siècle, portées par un courant spirituel impulsé par les Bénédictins, et plus particulièrement par une figure fascinante : Bernard de Cîteaux, plus connu sous le nom de Saint Bernard de Clairvaux. Cet homme, à seulement 22 ans, tutoyait les papes, conseillait les rois, et influençait les grands de son époque. Songez-y : un jeune homme capable de façonner l’histoire spirituelle de l’Occident ! Bernard joue un rôle clé dans la fondation de l’Ordre des Templiers, protège les maçons en leur accordant des franchises, et s’impose comme un initié des traditions druidiques. Chez les Templiers comme chez les Druides, on retrouve une vénération profonde pour la figure de la Mère, incarnée par Notre-Dame. Les Vierges Noires, ces statues sombres et majestueuses, apparaissent alors dans les hauts lieux de la spiritualité médiévale, là où souffle l’esprit des lieux sacrés. Ces sites, connus des Druides et peut-être même d’une civilisation antérieure aux Celtes, étaient marqués par des menhirs et des dolmens, témoins d’une sagesse oubliée.

Du Mont-Saint-Michel à Chartres, en passant par Notre-Dame de Paris, Rocamadour, Le Puy, ou encore la Daurade à Toulouse, chaque sanctuaire abritait sa Vierge Noire. Le Puy, en particulier, était un centre spirituel majeur : cinq papes, quatorze rois, dont Louis XI, ainsi que la mère et les deux frères de Jeanne d’Arc, s’y rendirent pour rendre hommage à cette figure sacrée. Mais pourquoi ces Vierges étaient-elles noires ? Dès leur création, les sculpteurs les peignaient en noir, avec des dimensions presque identiques : 70 cm de haut sur 30 cm de large. Certains y voient la reproduction d’une icône miraculeuse attribuée à Saint Luc, l’évangéliste.

Le culte des Vierges Noires s’inscrit dans la continuité d’un très ancien culte gaulois, un héritage que Bernard de Cîteaux, initié aux mystères druidiques, a su préserver et transmettre. Aujourd’hui, on estime qu’une quarantaine de Vierges Noires sont encore vénérées en France, bien que Jacques d’Arès en ait répertorié 210, incluant les copies et celles disparues. Ces statues ne sont pas de simples objets de dévotion : elles sont les gardiennes d’un langage ésotérique, un message gravé dans la pierre des églises médiévales. Car le Moyen Âge, loin d’être une époque obscure, fut une période de civilisation initiatique, où les initiés de la grande tradition – dont nous faisons partie – ont laissé des indices pour ceux qui savent voir.

Les Vierges Noires succèdent à un culte antique, celtique, voire plus ancien encore. Elles incarnent la « Virgo Paritura », la Vierge qui doit enfanter, une déesse mère ou une déesse terre, symbole universel que l’on retrouve dans les grandes religions américaines et les mythologies africaines. Ce culte est intimement lié à celui du soleil : dans les lieux celtiques dédiés à Belen – le nom celtique d’Apollon, divinité solaire grecque – une Vierge Noire était toujours présente. Fait troublant, ces statues étaient souvent découvertes par un bœuf labourant la terre, un animal qui est l’emblème de Saint Luc. Or, « Luc » ou « Lucques » signifie en celtique « lieu sacré ». Le soleil féconde la terre, qui engendre la vie, et cette vie prend la forme d’une femme. Bernard de Cîteaux lui-même décrivait la Vierge Noire comme « une femme revêtue de soleil ».
Ainsi, la déesse terre devient la vierge élue, qui, par l’action divine, donne naissance à un fils à la fois humain et divin. Jésus naît de Marie, mais ce symbole transcende les frontières religieuses : Krishna, dans l’hindouisme, est né d’une vierge, tout comme Merlin, le Celte, fils d’une fée, ou Horus, fils d’Isis. S’agit-il d’une conception hérétique ? Je ne saurais le dire, car ma connaissance n’est qu’un grain de sable face à l’infini. Mais ce que je peux affirmer, c’est que cette vision était partagée par Bernard et les élites monastiques de son temps. Était-ce un vestige de paganisme ou la clé de voûte d’un édifice spirituel initiatique ? Pour ma part, je penche pour la seconde hypothèse.

La couleur noire des Vierges n’est pas anodine : elle représente la terre primitive, la matrice originelle qui, une fois fécondée, donne la vie. Isis, Cybèle, Déméter – toutes ces déesses furent souvent représentées en noir. À Éphèse, dans le temple de Diane, l’une des sept merveilles du monde, on vénérait une Vierge Noire, sœur d’Apollon solaire. Et, par une coïncidence troublante, c’est à Éphèse que Marie aurait fini ses jours. Les artistes médiévaux utilisaient délibérément le noir pour exprimer cette dualité : une femme qui pouvait être Marie, la mère de Jésus, mais aussi la déesse terre, ou Isis l’Égyptienne. Dans le christianisme, cette couleur fut réservée à Marie, mère de Jésus, et à Anne, mère de Marie. L’alchimie, elle aussi, s’empare de ce symbole : la matière première, la « Materia Prima », est noire. Toutes les Vierges Noires partagent des caractéristiques communes : sculptées en bois, datant des XIe ou XIIe siècles, elles sont toujours des Vierges en majesté, l’enfant assis sur les genoux de sa mère, avec une expression noble et une allure orientale. Les lieux où elles furent placées étaient fréquentés depuis la plus haute antiquité, souvent dédiés à une divinité celtique ou préceltique avant l’arrivée du christianisme.

Le christianisme, en réalité, a récupéré ces lieux sacrés pour les sanctifier sous une appellation catholique. L’exemple le plus frappant est le pèlerinage de Sainte-Anne-d’Auray, où l’Église prétend qu’Anne, mère de Marie, serait apparue. Mais la vérité est plus ancienne : ce lieu était consacré à Dana, la déesse mère des Gaulois, dont le nom devint Anna. Les Bénédictins, sous l’égide de Bernard de Cîteaux, ont repris ce flambeau, tout comme les Templiers, qui vouaient à Notre-Dame un culte préférentiel. Chaque année, un rituel étrange avait lieu : on lavait les statues de Notre-Dame avec du vin, un geste chargé de symbolisme.
À Limoux, dans l’Aude, l’église de Marceille abrite une Vierge Noire et une source miraculeuse, aujourd’hui en partie bouchée. Peu savent que cette humble église eut pour curé Saint Vincent de Paul. Pour certains, les Vierges Noires auraient une signification alchimique, un mystère que les Druides initiés, croyant en un Dieu unique, en la Trinité, et en l’immortalité de l’âme, auraient transmis. Ils associaient à la terre nourricière une déesse à la fois vierge et mère, destinée à enfanter un dieu incarné. Ce symbole résonne jusqu’aux Amérindiens, qui vénéraient la « Pachamama », la déesse terre, respectant la mère nourricière – un respect que nous avons, hélas, perdu. Les religions païennes honoraient la mère, mais l’arrivée des religions monothéistes – judaïsme, christianisme, islam – a souvent relégué la femme à un rôle subalterne, une réalité encore palpable dans certaines cultures.

Bernard et ses contemporains, dépositaires d’un savoir antique, ont su le remettre au jour, tout en le parant d’une couverture chrétienne pour échapper à l’Inquisition. Les Vierges Noires furent ainsi présentées comme des représentations de Marie, mais elles étaient bien plus : des effigies de la « Virgo Paritura », la terre mère vénérée depuis des millénaires, placées à proximité de lieux sacrés connus et révérés. Elles succédaient à des statues plus anciennes, dont nous avons perdu la trace, mais qui incarnaient cette même déesse mère.
Bernard, né à Fontaine-lès-Dijon, où une « Virgo Paritura » était encore vénérée de son temps, et étudiant à Saint-Vorles, où une Vierge Noire avait pris la suite d’une déesse celtique, n’était pas un cas isolé. Les Bénédictins, avant lui, avaient suivi cette quête initiatique. L’un des plus célèbres fut Gerber, un pâtre devenu le pape Sylvestre II. Envoyé par les Bénédictins étudier à Tolède et Cordoue, Gerber surpassa ses maîtres, introduisant en France l’astronomie, l’algèbre, et la géométrie, tout en s’adonnant à l’alchimie. Bernard, quant à lui, consacra une grande partie de sa vie à méditer sur le Cantique des Cantiques, où une femme, symbole de féminité sacrée, proclame : « Je suis noire, et pourtant je suis belle. » Il trouva un compagnon de route en Saint Malachie, un Irlandais initié par les Druides, qui vint se retirer à Clairvaux.

Le symbolisme numérique, cher à Bernard, est tout aussi révélateur : il fallut douze moines pour fonder Clairvaux, comme les douze apôtres ou les douze sages druidiques, bien que leur nombre réel fût de dix-sept ou dix-huit. Tous les monastères cisterciens furent dédiés à Notre-Dame, et les Templiers, dans leurs rituels, consacraient plus de prières à Notre-Dame qu’à Dieu lui-même. Cette appellation, « Notre-Dame », inventée par Bernard, porte une équivoque fascinante : elle désigne Marie, mère de Jésus, mais aussi la déesse terre, ou Isis l’Égyptienne.
Les Vierges Noires sont la signature d’une époque initiatique, un appel lancé par les hommes du Moyen Âge à travers les siècles. Elles nous murmurent : « Regardez-nous, nous sommes nourries de trois sources – chrétienne, druidique, orientale – et nous le disons à ceux qui savent voir. » L’alchimiste bénédictin Basile Valentin, dans le langage imagé des hermétistes, écrit que cette matière première noire doit être cherchée « sous terre », dans la mère, une métaphore ésotérique pour le « sexe d’Isis ».

En 1521, un règlement à Manosque établit l’ordre de préséance des confréries religieuses lors des processions. La confrérie de Notre-Dame était celle des charpentiers et des maçons, les plus initiés et les plus occultes du Moyen Âge. Certains y voient les origines des francs-maçons. À Manosque, cette confrérie s’était regroupée autour d’une Vierge Noire. Fulcanelli, le grand alchimiste, affirme que les cierges brûlés devant ces statues étaient verts. Au Mont-Saint-Michel, la messe était dite devant une Vierge Noire, sur une pierre d’autel verte. Cybèle était noire sous un manteau vert, et Isis était surnommée la déesse verte.
Les Bénédictins installèrent une Vierge Noire là où ils découvrirent le corps de Saint Amadour, nom celtique de Zachée, disciple de Jésus et époux de Véronique. Zachée, connu sous le nom de Sylvain dans le Berry, aurait voyagé vers Le Puy, Saint-Jacques-de-Compostelle, et Porto. Au Mont-Saint-Michel, le rocher, autrefois appelé Mont Tomba, abritait une grotte dédiée à Belen. C’est là qu’au XIIe siècle fut placée une Vierge Noire, « Notre-Dame du Mont Tomba », dans une chapelle surnommée « Chapelle de dessous terre ».

À Toulouse, la Vierge Noire de la Daurade fut l’une des madones les plus illustres du Moyen Âge. Malheureusement, l’effigie originale fut brûlée par les révolutionnaires en 1799, et l’actuel tableau date du XIXe siècle. La Daurade est liée à la confrérie des troubadours : en 1328, la compagnie du « Gay Savoir », devenue l’Académie des Jeux Floraux, organisait des concours de poésie. Les vainqueurs offraient des fleurs d’or et d’argent à la Vierge Noire, leur « Dame » d’hommage, une autre Dame étant Clémence Isaure, figure mythique dont le nom évoque la rencontre d’Isis et de l’or, symbole de l’initiation accomplie. Le « Gay Savoir », dont parle Rabelais, était la clairvoyance des adeptes, et leurs diplômes étaient scellés de cire verte.
Cette connivence entre la Daurade, le Gay Savoir, et les troubadours occultistes révèle la présence d’initiés autour de ces sanctuaires. En France, peu de lieux perpétuent le culte des Vierges Noires, mais le plus célèbre est Montserrat, près de Barcelone, un monastère bénédictin d’une beauté saisissante. La Vierge Noire y incarne trois sources : celtique, orientale, et monastique.

La France, terre celtique, fut le berceau de Cluny, Cîteaux, et Clairvaux. Les fondateurs de l’Ordre du Temple, eux aussi français, ont contribué à faire des Vierges Noires un symbole plus prégnant en France qu’ailleurs. Leur influence sur le christianisme dépasse un simple transfert de divinités : des éléments du culte d’Isis, comme l’eau bénite, l’encens, ou les processions, furent adoptés par le sacerdoce chrétien pour leur caractère universel. Le culte d’Isis persista en France jusqu’en 1514, date à laquelle une statue d’Isis fut détruite à Saint-Germain-des-Prés. En abandonnant le nom de Lutétia pour Paris – par Isis – la capitale de la Gaule renouait avec cette tradition.
Au XIIe siècle, le culte de Notre-Dame connut une ferveur sans pareille, mais derrière cet amour pour la mère du Christ se dessine un message initiatique. Il marque la continuation de la grande tradition primordiale, que Bernard de Cîteaux transmit à travers les constructeurs bénédictins. Les secrets des Druides, des Atlantes, la Tétrakis pythagoricienne, et la cabale hébraïque se retrouvent réunis grâce à l’intelligence de l’abbé de Clairvaux.
Les Vierges Noires captent l’énergie de la terre, et leurs grandes mains – par lesquelles se transmettent les pouvoirs – en sont le symbole. Les rois de France guérissaient les écrouelles par imposition des mains, mais aujourd’hui, seules une dizaine de ces statues conservent cette énergie vibratoire. Pour l’alchimiste, le noir est la « Materia Prima », la terre primitive, principe créateur de tout ce qui est. Comme le dit Eugène Canseliet, « l’invention de l’esprit est indispensable à la transformation de la Vierge Noire en Vierge Blanche ».
René Marlières, dans le n°351 d’Atlantis, écrit que ces effigies dégagent une émanation de force, une intensité de vie radiante. Le vrai mystère des Vierges Noires réside dans la puissance ressentie face à elles, plus que dans leur noirceur. Leur énigme demeure, et je vous ai simplement exposé des faits. À vous, désormais, d’entreprendre cette quête initiatique.
Pas un mot sur la vierge noire des saintes marie de mer et le pèlerinage des gitans. Pourquoi ?
Toutes les explications sont données mais on n’a l’image que tout le monde évite la bonne…
Les statues des vierges sont noires parce qu’elles représentent ISIS et ISIS était noire. La matière première est noire tout comme l’Humain premier est noir. C’est du noir que tout commence et que tout revient. La civilisation kémite qui était de race noire, et qui relate ISIS et OSIRIS ne parle pas des évènements d’il ya 6000 ans, commencement physique de la civilisation kémite. OSIRIS et HORUS sont des antépharaons qui ont certainement vécu dans le plan éthérique il ya Des centaines des milliers d’années et à cette époque l’humanité était de race noire.
Ou bien on lâche un peu les vieux fantasmes usés et on s’intéresse à la vérité :
https://decoder-eglises-chateaux.fr/vierges-noires-origines-mythe/
Bon resumé de l’énigme des vierges noires de Jacques Huynen, mon père et frère, paru chez Laffont dans la série: les énigmes de l’univers dans les années 70 et vendus en France et Espagne à 300.000 exemplaires. Ce serait peut-être fraternel de citer la source…
Vous trouverez au chap.8 de l’ouvrage “Le Mystère des cathédrales” de Fulcanelli un long développement sur les vierges noires. En voici un extrait :
…Jadis, les chambres souterraines des temples servaient de demeure aux statues d’Isis, lesquelles devinrent, lors de l’introduction du christianisme en Gaule, ces Vierges noires que le peuple, de nos jours, entoure d’une vénération toute particulière. Leur symbolisme est d’ailleurs identique ; les une et les autres montrent, sur leur soubassement, la fameuse inscription : Virgini parituræ ; à la Vierge qui doit enfanter. Ch. Bigarne2, nous parle de plusieurs statues d’Isis désignées sous le même vocable. « Déjà, dit l’érudit Pierre Dujols, dans sa Bibliographie générale de l’Occulte, le savant Elias avait signalé, dans son livre De dictis Germanicis, une inscription analogue : Isidi, seu Virgini ex qua filius proditurus est3. Ces icônes n’auraient donc point le sens chrétien qu’on leur prête, du moins exotériquement. Isis, avant la conception, c’est, dit Bigarne, dans la théogonie astronomique, l’attribut de la Vierge que plusieurs monuments, bien antérieurs au christianisme, désignent sous le nom de Virgo paritura, c’est-à- dire la terre avant sa fécondation, et que les rayons du soleil vont bientôt animer. C’est aussi la mère des dieux, comme l’atteste une pierre de Die : Matri Deum Magnæ ideæ. » On ne peut mieux définir le sens ésotérique de nos Vierges noires.
Elles figurent, dans la symbolique hermétique, la terre primitive, celle (76) que l’artiste doit choisir pour sujet de son grand ouvrage. C’est la matière première à l’état de minerai, telle qu’elle sort des gîtes métallifères, profondément enfouie sous la masse rocheuse. C’est, nous disent les textes, « une substance noire, pesante, cassante, friable, qui a l’aspect d’une pierre et se peut broyer en menus morceaux à la façon d’une pierre ». Il apparaît donc régulier que l’hiéroglyphe humanisé de ce minéral en possède la couleur spécifique et qu’on lui réserve pour habitat les lieux souterrains des temples.
De nos jours…La suite sur : costisnet.weebly.com/uploads/5/4/7/7/5477582/fulcanelli_-_le_mystre_des_cathdrales.pdf