Du site officiel du grandeoriente.it
Intervention du Grand Maître Adjoint Antonio Seminario lors de la Tenue de Grande Loge du Grand Orient d’Italie, 6 avril 2025

C’est avec une profonde émotion que je m’adresse à vous, Maîtres, réunis en cette Tenue de Grande Loge décisive du Grand Orient d’Italie, une institution séculaire qui, depuis plus de deux siècles, perpétue l’Art de Bâtir grâce à la sagesse et au dévouement des Frères qui nous ont précédés. Aujourd’hui, nous sommes à un tournant. Les défis qui se dressent devant nous – la Justice Maçonnique, les tensions autour du Rite Écossais Ancien et Accepté, et les dérives de la communication – nous appellent à un retour aux fondamentaux de notre institution : l’unité, la fraternité et la quête initiatique. Retournons travailler dans nos temples, à huis clos, pour redécouvrir la lumière qui guide notre chemin.
La Justice Maçonnique : un Défi d’Éthique et d’Initiation

La Justice Maçonnique, pilier de notre institution, est aujourd’hui victime de malentendus qui menacent son essence initiatique. Le Grand Orient d’Italie, en tant qu’association initiatique, exige de ses membres une moralité irréprochable et une aptitude à comprendre la mission de la franc-maçonnerie : le perfectionnement de l’Homme et de l’Humanité. Nos règlements internes, bien que conformes aux lois de l’État, imposent une rigueur éthique supérieure, fondée sur des valeurs fondamentales – fraternité, tolérance, honneur, dignité, loyauté. Tout manquement à ces principes, même dans la vie profane, constitue une faute maçonnique.
Pourtant, certains Frères, dépourvus de vision initiatique, adoptent des comportements profanes qui trahissent ces idéaux. Ils ridiculisent les fondements de notre institution, les réduisant à de « belles paroles » aux yeux du monde extérieur. La Justice Maçonnique, contrairement à la Justice Civile, ne peut se contenter de critères normatifs objectifs. Des qualités comme la fraternité ou l’honneur ne se mesurent pas avec précision ; elles exigent une conscience élevée, une compréhension profonde de ce que signifie être maçon. Lorsque des différends internes sont portés devant la Justice Civile, nous mettons en péril l’aspect initiatique de notre institution, créant des malentendus dictés par des perspectives divergentes. Il est temps de réaffirmer que la Justice Maçonnique doit être un espace de réflexion et de régénération, non de division.
Le Rite Écossais Ancien et Accepté : une Richesse à Clarifier

Le Rite Écossais Ancien et Accepté (REAA), l’un des rites les plus pratiqués au sein du Grand Orient d’Italie, est au cœur de tensions récentes. Ces tensions ne sont pas seulement le fruit de malentendus doctrinaux, mais aussi de contingences historiques et d’une interprétation profane des principes initiatiques. Le Grand Orient d’Italie, fidèle à sa mission de « réunir ce qui est épars », a toujours accueilli les traditions initiatiques, intégrant leur patrimoine symbolique pour enrichir notre Art Royal. Le REAA, avec ses 33 degrés, offre une progression qui peut sembler complexe, mais il ne doit pas être perçu comme une élévation au-delà du grade de Maître.
Les trois degrés symboliques – Apprenti, Compagnon, Maître – contiennent l’intégralité du chemin initiatique. Comme le stipule l’article 5 de notre Constitution, le Grand Orient d’Italie « suit le symbolisme dans l’enseignement et l’ésotérisme dans l’Art Royal », enseignant la légende du Troisième Degré, celle d’Hiram Abiff, qui symbolise la mort et la résurrection spirituelle. Les degrés supérieurs du REAA ne sont pas une ascension hiérarchique, mais une opportunité d’approfondir le symbolisme des trois premiers degrés. Ils offrent des outils supplémentaires pour explorer les mystères de la « Chambre du Milieu », sans pour autant être indispensables à l’initiation. Clarifier cette distinction est essentiel pour éviter les confusions et réaffirmer l’unité de notre institution, où tous les rites convergent vers un même idéal : l’élévation de la conscience humaine.
La Communication : un Outil Sacré à Protéger

À l’ère de la communication numérique, où les mots voyagent à la vitesse de la lumière, la franc-maçonnerie doit relever un défi majeur : préserver la sacralité du dialogue. Dans un monde connecté, la communication est devenue un outil de manipulation émotionnelle, un vecteur de vulgarisation et d’agressivité. Les mots, autrefois porteurs de nuances et de beauté, se sont appauvris, réduits à des instruments de provocation et de division. Cette dérive, que l’on observe dans le monde profane, s’est malheureusement insinuée au sein de notre institution, notamment lors des récentes élections pour la Grande Maîtrise.
Des messages diffamatoires, des campagnes électorales violentes, des canaux anonymes de désinformation ont terni l’esprit de fraternité qui devrait nous unir. Certains Frères, mus par la vanité et l’ambition personnelle, ont semé la discorde, ridiculisant notre institution aux yeux du monde profane. Ces comportements, alimentés par une mentalité profane, ont transformé des moments de dialogue fraternel en compétitions égoïstes, où l’insulte et la calomnie ont remplacé la réflexion et le respect. Nous ne pouvons tolérer que la communication, cet outil sacré qui devrait servir la connaissance et le progrès, devienne une arme de division. Comme le souligne le Grand Maître Adjoint Anthony Séminaire,
« la communication authentique, celle symbolique, est un outil puissant pour ceux qui désirent redécouvrir le meilleur d’eux-mêmes ».
Un Retour au Temple : la Voie de la Fraternité

Face à ces défis, l’appel est clair : retournons travailler dans nos temples, à huis clos, loin du vacarme profane. Le temple maçonnique est un espace sacré, un lieu où le silence et la réflexion permettent de faire taire les tentations de l’ego. C’est là, derrière des portes closes, que nous pouvons ouvrir un dialogue sincère, un dialogue qui transcende les intérêts individuels pour se consacrer au bien commun. Les symboles maçonniques – l’équerre, le compas, la pierre brute – ne sont pas des objets de musée à exposer pour satisfaire la curiosité du public. Ils sont des outils vivants, des guides pour notre travail intérieur, des rappels de notre mission : construire un monde plus juste et harmonieux.
Le Grand Orient d’Italie doit retrouver son unité, non pas en s’adaptant aux logiques profanes, mais en préservant la sacralité de l’existence humaine. Comme le rappellent les anciens devoirs, la franc-maçonnerie est « le Centre d’Union et un moyen de réconcilier une amitié sincère entre des personnes qui seraient restées perpétuellement éloignées ». Cette fraternité, ciment de notre institution, exige de chacun de nous un travail sur soi-même. Nous devons nous examiner avec courage, identifier nos vices cachés, et les corriger pour faire rayonner la lumière intérieure. Plus nous avancerons sur ce chemin initiatique, plus l’esprit de fraternité prédominera, assurant la pérennité de notre tradition.
Un Appel à l’Action : Construire le Grand Œuvre Ensemble

Frères, le défi qui nous attend est immense, mais il est à notre portée. La solution réside en chacun de nous. Nous devons assumer nos responsabilités, parler avec sincérité, et tourner notre regard vers ceux qui, parmi nous, ont compris la valeur initiatique de la franc-maçonnerie. Il est temps d’arrêter le spectacle extérieur, de cesser d’utiliser nos symboles comme des objets de parade, et de revenir à l’essence de notre Art : un travail intérieur, un dialogue fraternel, une quête de lumière.
L’avenir du Grand Orient d’Italie dépend de notre capacité à maintenir vivante la « chaîne de la tradition ». En travaillant dans nos temples, unis par l’esprit de fraternité, nous pouvons surmonter les divisions et les dérives profanes. Que chaque Maçon, conscient de son devoir, s’engage à polir sa pierre brute, à cultiver l’amour de l’humanité, et à contribuer au Grand Œuvre. Comme le conclut le Grand Maître Adjoint,
« l’esprit de fraternité est le seul ciment qui nous maintient tous Unis dans la construction du Grand Œuvre ».
Bonne navigation vers l’Est, Frères !
Vive le Grand Orient d’Italie.