De notre confrère actu.fr – Par Mathieu Arnal
La loge maçonnique de Toulouse, désormais située à Pechbonnieu, a vu le jour il y a 80 ans, juste après la Libération, fondée par des républicains espagnols en exil. Retour sur une histoire marquée par l’exil, l’engagement et la transformation.
Toulouse, Berceau de la Franc-Maçonnerie
Toulouse, ville au riche passé maçonnique, a vu naître sa première loge le 2 décembre 1741, baptisée loge de Saint-Jean, grâce au noble Richard de Barnewall, maître des Free Accepted Masons of Ireland. Cette initiative bénéficia du soutien des figures d’autorité de l’époque, notamment de l’archevêque Arthur Dillon.
En 1743, le comte de Caraman, petit-fils de Pierre-Paul Riquet, créa à son tour une loge, marquant le début d’une adhésion massive des élites locales à la franc-maçonnerie. Initialement dominée par des valeurs catholiques et monarchistes, la loge évolua au XIXe siècle pour devenir un bastion de pensée républicaine et laïque. Sous la IIIe République, elle accueillit dans ses rangs des figures politiques locales telles que Camille Ournac, Albert Bedouce, Honoré Serres et Jules Julien.
Liens avec l’Espagne et l’évolution sous le Grand Orient de France
Les années de guerre virent des exilés jouer un rôle crucial, notamment des intellectuels antifascistes comme Silvio Trentin, ou encore des républicains espagnols. C’est dans ce contexte que, peu après la Libération en décembre 1944, un groupe de ces exilés, comprenant des figures comme le général Riquelme et José Maldonado, fonda la loge de Toulouse. Initialement indépendante, elle chercha en 1948 à se rattacher au Grand Orient de France, le siège toulousain de cette obédience étant situé rue de l’Orient.
La Loge de Toulouse à l’aube de la reconstruction
L’après-guerre fut une période de croissance pour la loge, qui vit ses effectifs croître jusqu’à atteindre environ 110 membres. Toutefois, le départ de certains membres pour l’Amérique latine, notamment le Mexique, à la recherche de nouvelles opportunités, marqua aussi cette époque.
Dans les années 1960 et 1970, la loge connut des difficultés à attirer de nouveaux membres, les jeunes générations de francs-maçons optant pour des loges où le français était la langue d’usage.
L’Inflexion stratégique et l’apport de la française des arts
Face à cette évolution, Manuel Anguerra, alors vénérable Maître, sollicita l’aide d’autres organisations. Seul Robert Roques, de La Française des Arts, répondit favorablement. Grâce à son soutien, neuf frères rejoignirent la loge de Toulouse, permettant la mise en place d’un véritable collège d’officiers capable de fonctionner et d’implémenter des réformes significatives : l’adoption du Rite Français dit Groussier en remplacement du Rite Ecossais Ancien Accepté, et l’introduction de la règle du tourniquet, qui stipule que l’accès au poste de Vénérable passe par l’occupation des postes de Secrétaire, 1er et 2nd Surveillant.
Cette histoire, riche en rebondissements et en adaptations, témoigne de la capacité de la loge maçonnique de Toulouse à se transformer et à se réinventer face aux défis du temps, incarnant ainsi l’esprit de résilience et de fraternité qui caractérise la franc-maçonnerie.