Ah, la belle progression que celle de tout initié franc-maçon qui a mis son temps d’apprentissage à profit et a démontré, vigilant et persévérant, qu’il était digne de faire deux pas de plus, pour rêver et viser à un autre plan, plus loin… Un peu plus haut !
Un compagnon franc-maçon, c’est un peu comme un ado. Comme les parents un peu plus permissifs sur les sorties mais qui n’en lâchent pas moins les rênes, le 1er surveillant ou surveillant ancien, veille encore au grain ! Le compagnon a envie de sortir de l’enceinte de son atelier, de s’émanciper, de visiter le vaste monde symbolique qui n’attend que lui ! Qu’à cela ne tienne, il y a toutefois les réunions d’instruction durant lesquelles il complète ses connaissances et échange avec son surveillant. Peut-être avec un peu d’effort, probablement en en redoublant, pourra-t-il entrevoir que le 5 de son âge exprime l’homme inscrit dans le pentagramme de l’infini et qu’il évoque, entre autres, l’ensemble des polyèdres réguliers ou volumes platoniciens. Non, cher jeune ado, un polyèdre régulier n’est ni un héros, ni un algorithme d’un jeu vidéo ! Il y a le tétraèdre, le cube, l’octaèdre, le dodécaèdre et l’icosaèdre ! Vertige pour ceux qui redoutent les examens de maths… Ou de philo (Bingo!). 5 formes qui n’évoquent peut-être que peu de choses pour le compagnon, sauf à creuser (ou tailler) la question… Et donc ? Et Platon alors dans tout ça ? Les objets matériels ne seraient que des répliques imparfaites d’idées parfaites et immuables qui existent dans un monde intelligible ? LOL rigole l’ado compagnon…LOL parce qu’il ne mesure pas qu’il va encore cheminer dans l’adulescence (décryptage : phase critique au sortir de l’enfance, de l’adolescence juste avant l’âge adulte et que redoutent tous les parents qui savent que ça va être compliqué !). Cheminement qui peut être calme mais souvent mouvementé avant de se confronter à la dure loi du monde adulte.
C’est donc, en grande partie, le rôle du 1er surveillant d’accompagner le compagnon dans son processus d’acquisition de connaissances et dans son cheminement vers la sagesse (du maître ?) tout en l’aidant à comprendre les limites et les responsabilités qui en découlent.
Alors, imaginons une réunion d’instruction, où tel un franc-maçon opératif, « notre » jeune compagnon, qui cherche à s’élever spirituellement et intellectuellement, doit déjà travailler sur la pierre cubique pour ciseler la forme et polir la surface, outils à la ceinture… Imaginons encore la 1ère surveillante, qui manie aussi bien la pierre que la terre glaise, peaufiner son chef d’œuvre et prouver par l’exemple comment viser l’harmonie, l’équilibre entre le corps, l’esprit et l’âme… Sous la symbolique d’un Adam et d’une Ève aux pieds d’argile… Une prise de conscience du libre arbitre, de la quête de connaissance, de l’entrée dans le monde du savoir mais aussi dans celui des choix, de leurs conséquences dans une possible éventualité de rencontrer défis et épreuves… Voici donc comment pourrait débuter cette réunion d’instruction pratico-pratique avec notre 1ère surveillante (qui s’appellerait Toscane…) et notre compagnon (Pierre) :
1ère Surv. : « Pierre, aujourd’hui, pendant que je parfais mon chef d’œuvre, il me semble constructif, que vous vous atteliez à travailler votre pierre à polir ! N’est ce pas une belle idée Pierre ? »
Pierre : « Heu, oui mais pourquoi une échelle sur le pilier, avec la pierre tout en haut ? Il y a combien de barreaux ? C’est peut-être un peu haut, non ? »
1ère Surv. : « Visons le chef d’œuvre et la sagesse ! »
Pierre : « Ah, l’échelle… C’est comme monter à l’échelle de la vie ? C’est haut, non ?
1ère Surv. : « Pourquoi pas ! Il faudra aussi savoir redescendre de temps en temps (avant que les autres ne s’en chargent pour toi…) »
Pierre : « C’est quand même très haut ! »
1ère Surv. : « Allé ! Un peu de courage et de force bien mesurée ! Ce n’est pas la hauteur qui compte, mais le polish de ton œuvre ! »