mer 23 octobre 2024 - 15:10

Les Iluminati se sont-ils invités dans la pop culture d’aujourd’hui ?

De notre confrère geo.fr

Ce qu’il faut savoir sur la théorie du complot des Illuminati. La théorie des Illuminati, qui prétend qu’une société secrète contrôle le monde dans l’ombre, reste l’une des théories du complot les plus persistantes et répandues. Voici les éléments clés à connaître sur ce phénomène :

Origines et évolution

Cartes de crédit avec la pyramide du dollar US
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La théorie trouve ses racines à la fin du XVIIIe siècle, avec la publication d’ouvrages comme celui de John Robison en 1797. À l’origine, elle visait un groupe réel d’intellectuels allemands appelés les Illuminés de Bavière, fondé en 1776 et dissous en 1785. Bien que cette organisation n’ait existé que brièvement, le mythe des Illuminati a perduré et s’est transformé au fil des siècles.

Contenu de la théorie

Selon les adeptes de cette théorie, les Illuminati seraient une puissante organisation secrète composée d’élites influentes qui manipuleraient les événements mondiaux à leur avantage. Cette théorie attribue aux Illuminati une influence sur des événements historiques majeurs, de la Révolution française aux attentats du 11 septembre1.

Popularité actuelle

Malgré l’absence de preuves, la théorie des Illuminati reste étonnamment populaire. En France, un sondage de 2018 a révélé que 27% des personnes interrogées croyaient à l’existence des Illuminati. Aux États-Unis, 15% des électeurs inscrits partageaient cette croyance.

Explications du phénomène

Delta lumineux sur PC portable
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Les experts attribuent la persistance de cette théorie à plusieurs facteurs :

  1. La simplification d’un monde complexe
  2. La recherche de sens face à l’incertitude
  3. La méfiance envers les élites et les institutions

Conclusion

Bien que dénuée de fondement historique, la théorie des Illuminati continue de fasciner et d’attirer de nouveaux adeptes. Elle illustre la capacité des théories du complot à s’adapter et à perdurer, malgré les réfutations répétées des historiens et des chercheurs4

Une société secrète appelée les Illuminati contrôlerait la marche du monde

Illuminés de Bavière

Les enquêtes laissent songeur. Quelque 15 % des adultes américains se disent convaincus qu’une société secrète appelée les Illuminati contrôle la marche du monde (sondage Insider, juillet 2019). «Ce nom agrège toutes les peurs mais aussi tous les fantasmes», relève l’historien Pierre-Yves Beaurepaire, dans Les Illuminati, de la société secrète aux théories du complot (éd. Tallandier, 2022). En France, 27 % des interrogés souscrivent à cette idée (sondage Ifop / Fondation Jean-Jaurès / Conspiracy Watch de décembre 2018). Et cela n’a rien de nouveau puisqu’un sondage Ipsos a montré dès 2014 que 36 % des jeunes Français de 18-24 ans croyaient dur comme fer à cette théorie. Les stars américaines du rap (LL Cool J, Jay-Z, par exemple) seraient dans le coup, croient savoir certains. Des stars de téléréalité, aussi, comme Khloé Kardashian. La «preuve» : la Californienne a été photographiée portant une bague rappelant l’oeil de la Providence, symbole que les complotistes associent volontiers aux fameux Illuminati.

Un juriste bavarois fonde sa propre société initiatique en 1776

Mais qui sont donc ces «Illuminés », qui s’invitent avec insistance dans les cours de récréation et envahissent les réseaux sociaux ? Leur véritable histoire n’a bien sûr pas grand-chose à voir avec le fantasme : à la fin du XVIIIe siècle, c’est un juriste bavarois, Adam Weishaupt (1748-1830), titulaire de la chaire de droit canon à l’université d’Ingolstadt, qui en est à l’origine. Disciple des Lumières, l’homme partage les idées progressistes de la franc-maçonnerie et des 18 000 frères implantés dans cette mosaïque de peuples et de principautés qui compose alors l’Allemagne. Mais Weishaupt, anticlérical et républicain, reproche aussi aux francs-maçons de se montrer trop tolérants envers la religion et les monarchies, déplorant par exemple l’existence en leur sein de loges ouvertement royalistes. Pour ce farouche jacobin, la priorité doit être la lutte contre le despotisme, l’obscurantisme et le fanatisme religieux.

En 1776, il fonde sa propre société initiatique, qui s’adresse aux universitaires, hauts fonctionnaires et personnalités politiques, en un mot à une élite d’«éclairés» (dans le sens du mot latin illuminati). «Cherchez des hommes nobles, puissants, riches, savants», écrit-il à ses premiers compagnons chargés de recruter de nouveaux membres. Pour échapper à la censure, cet ordre des Illuminés (Illuminatenorden en allemand) sera secret et doté d’une hiérarchie pyramidale quasi militaire dont Weishaupt sera le «général». Ses membres auront un pseudonyme, lui-même prenant celui de Spartacus en référence au gladiateur qui souleva les esclaves contre la République romaine.

Un ordre qui ne comptera au plus que 3 000 membres

En dépit de ses préventions, Weishaupt, conscient que la franc-maçonnerie constitue un vivier de choix pour recruter des adeptes, se fait recevoir au sein d’une loge munichoise. Pourtant, en dépit de l’intense activité de Weishaupt et de ses lieutenants, l’ordre comptera au plus, selon les estimations des historiens, entre 1 500 et 3 000 membres, essentiellement dans les pays rhénans, en Autriche et en Suisse, avec quelques personnalités de premier plan comme Goethe et, peut-être, Mozart. En 1785, alors que les Illuminés, à l’instar de toutes les sociétés secrètes – telles la Société du ciel et de la Terre, en Chine – sont dans le collimateur des autorités, l’interception d’un courrier de Weishaupt destiné à des francs-maçons français va précipiter leur chute. Le très catholique duc de Bavière, Charles-Théodore, en profite pour dénoncer publiquement un complot et fait publier dans les journaux les statuts et les règlements internes des Illuminati, ainsi que les noms de leurs principaux membres. L’ordre est dissous. Il aura subsisté neuf ans seulement. Weishaupt, contraint de s’exiler, se réfugie à Gotha, en  uringe, sous la protection du duc de Saxe et renonce à ses activités secrètes.

Quatre ans plus tard, en 1789, la prise de la Bastille marque le début de la Révolution française. L’exécution de Louis XVI, la proclamation de la République, la répression du clergé, puis la Terreur, vont faire trembler les monarchies européennes et l’Église de Rome. La paix civile revenue, les tenants de l’Ancien Régime s’interrogent. Il leur semble inimaginable que le peuple se soit soulevé de lui-même contre son roi et soit parvenu en moins de trois ans à balayer la plus ancienne monarchie d’Europe. «Tout a été prévu, médité, combiné, résolu, statué», écrit l’abbé Augustin Barruel (1741-1820), ancien élève des jésuites exilé en Angleterre pour fuir les excès des sans-culottes, dans son livre Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme, dont le premier tome paraît en 1797. Ce fut un complot ourdi par les francs-maçons et plus particulièrement, estime-t-il, par leur branche la plus radicale, les «Illuminés de Bavière». Weishaupt n’a-t-il pas écrit noir sur blanc : «Les princes et les nations doivent disparaître de la surface de la terre […] et cette révolution doit être l’oeuvre de sociétés secrètes» ? Pour faire bonne mesure, Barruel leur adjoindra les Juifs, accusés de partager la même détestation du trône et de l’autel.

En cette même année 1797, l’universitaire écossais John Robison (1739-1804) publie de son côté Preuves de conspirations contre toutes les religions et tous les gouvernements de l’Europe, un essai dans lequel il développe des arguments identiques. Les deux ouvrages remportent un succès considérable. En traduisant dans le sien «Illuminés » par Illuminati, un nom mystérieux «qui fascine autant qu’il effraie», souligne Pierre-Yves Beaurepaire, Robison est loin d’imaginer la fortune que va connaître ce mot.

Dès 1801, les progressistes contre-attaquent. «La France entière fut illuminée, puisque tous les ordres de l’État voulurent limiter le pouvoir du monarque », ironise l’un d’entre eux, Jean-Joseph Mounier, juriste réputé, ancien député du tiers état aux états généraux de 1789 et partisan d’une monarchie constitutionnelle (De l’influence attribuée aux philosophes aux francs-maçons et aux illuminés, sur la Révolution de France). Peine perdue, le mythe l’emporte sur la raison. Il a sur elle l’avantage d’abolir la part de hasard qui participe à tout événement historique, ce hasard que l’historien et journaliste Christophe Bourseiller qualifie d’ennemi mortel de la religion complotiste, pour qui tout obéit à une logique maléfique. Le paradoxe est là : la théorie du complot rassure – car on sait que les dés sont pipés – autant qu’elle fait peur, puisque des puissants invisibles dirigent le monde.

Suspectés d’être derrière tous les complots au XIXè siècle

Cette image fournie par la Bibliothèque du Congrès montre une chromolithographie intitulée « Washington en tant que franc-maçon, commandant de l’armée américaine, 1775, président des États-Unis, 1789 », publiée vers 1870. Les francs-maçons comptaient de nombreuses personnalités comme Washington parmi leurs membres et leurs membres. Cette influence a alimenté les rumeurs suggérant que l’organisation fraternelle était une conspiration satanique déterminée à gouverner le monde (Strobridge & Co. Lith./Bibliothèque du Congrès via AP).

Au XIXe siècle, les Illuminati sont ainsi suspectés d’être derrière tous les complots, de la mort du président des États-Unis George Washington à l’épopée des carbonari, une société secrète qui lutte contre la domination napoléonienne dans le royaume de Naples, en passant par les révolutions sud-américaines menées par le Vénézuélien Simón Bolívar dans plusieurs pays du sous-continent.

La littérature, de son côté, popularise le fantasme de cette secte qui tirerait les ficelles dans l’ombre. Citons un roman gothique allemand : Der Genius, de l’auteur Karl Grosse, traduit en anglais par un pasteur luthérien et publié à Londres en 1796 sous le titre de Horrid Mysteries. Le pitch ? Des Illuminati côtoient des femmes proches du jacobinisme qui accordent des faveurs sexuelles pour s’emparer du monde. Une fiction qui ouvrira la voie, bien plus tard, à des bestsellers contemporains comme Illuminatus !, trilogie entre satire et science-fiction des écrivains Robert Anton Wilson et Robert Shea (1975) et Anges et démons (2000), de Dan Brown (paru sous le titre Illuminati dans l’édition allemande).

Mais les Illuminati n’inspirent pas que des écrivains. Ils hantent aussi l’univers Marvel (le monde imaginaire dans lequel évoluent la plupart des personnages de fiction de la maison d’édition américaine Marvel Comics et de ses franchises cinématographiques) : les super-héros Iron Man, Flèche noire, Namor, Professeur Xavier et Mr Fantastique font partie du club. On retrouve aussi les Illuminati dans les jeux vidéo (comme dans l’épisode Unity de la saga Assassin’s Creed, 2007), et au cinéma. Dans Tomb Raider (2001), par exemple, l’héroïne Lara Croft démasque à Venise l’une de leurs assemblées secrètes.

Des Illuminés censés être éclairés, qui font florès dans les noirceurs d’une époque angoissée… Voilà une postérité que n’aurait sans doute pas imaginé le respectable Adam Weishaupt, pourtant ouvert aux pensées à contre-courant.

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Alice Dubois
Alice Dubois
Alice Dubois pratique depuis plus de 20 ans l’art royal en mixité. Elle est très engagée dans des œuvres philanthropiques et éducatives, promouvant les valeurs de fraternité, de charité et de recherche de la vérité. Elle participe activement aux activités de sa loge et contribue au dialogue et à l’échange d’idées sur des sujets philosophiques, éthiques et spirituels. En tant que membre d’une fraternité qui transcende les frontières culturelles et nationales, elle œuvre pour le progrès de l’humanité tout en poursuivant son propre développement personnel et spirituel.

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