Le texte d’Abnousse Shalmani, Laïcité, j’écris ton nom, se positionne avec une force vibrante en faveur d’une laïcité républicaine intransigeante, dans un contexte où les violences de l’islamisme, ainsi que les menaces contre la liberté d’expression et les valeurs républicaines, se font de plus en plus pressantes. Dès le début, la dédicace poignante aux victimes des pogroms du 7 octobre 2023 en Israël et aux otages détenus par des terroristes islamistes résonne comme une mise en garde solennelle contre les ravages de l’obscurantisme et la barbarie, rappelant que le combat pour la laïcité ne se limite pas à un idéal abstrait mais concerne des vies humaines bien réelles.
L’auteure développe tout au long de l’essai un discours sans concession sur les dérives qu’elle observe dans la société française contemporaine. Le texte fait écho aux débats ayant traversé les années 1989, lors de l’affaire du voile à Creil, où elle met en lumière la mollesse des autorités de l’époque, qui, selon elle, ont capitulé face à des revendications religieuses communautaristes, trahissant ainsi les principes laïques fondateurs de la République française. Abnousse Shalmani s’en prend aux concessions faites au nom d’une prétendue tolérance, dénonçant un recul de la neutralité laïque dans les institutions publiques, et en particulier dans l’éducation.
L’argument de l’auteure s’appuie sur une vision universaliste de la laïcité, qu’elle définit comme un rempart non seulement contre l’influence religieuse, mais aussi contre les divisions identitaires. L’éducation, pour elle, doit permettre aux élèves de transcender leur origine, leur religion, leur sexe, pour penser en termes universels, libérés des assignations communautaires. Elle fustige le fait que les combats menés par des intellectuels des Lumières comme Spinoza, Voltaire ou Baudelaire sont aujourd’hui relégués au second plan au profit d’un retour inquiétant des particularismes religieux et identitaires.
Au cœur de son propos, la laïcité est présentée non pas comme une simple position de tolérance passive, mais comme un combat actif pour la liberté. « La neutralité n’est pas passivité, ni liberté simple tolérance », martèle-t-elle, en faisant de la laïcité un principe d’émancipation contre toutes les formes de domination, y compris celles provenant de la religion. Ce qui est en jeu, c’est la capacité de la République à maintenir son idéal d’égalité face à des courants religieux qui revendiquent de plus en plus d’espace dans l’espace public. Pour Abnousse Shalmani, il ne s’agit pas de stigmatiser une religion en particulier, mais de maintenir un cadre commun où la liberté de conscience prime sur les croyances individuelles.
L’essai devient progressivement un plaidoyer contre ce qu’elle appelle l’obscurantisme islamiste, qui, selon elle, cherche à saper les fondements de la République laïque. Abnousse Shalmani ne mâche pas ses mots : elle accuse certains courants intellectuels et politiques d’excuser les dérives islamistes par peur d’être accusés de racisme ou d’islamophobie, une accusation qui, d’après elle, paralyse tout discours critique. Elle dénonce un climat de lâcheté et d’opportunisme qui permet à l’islamisme radical de gagner du terrain, aussi bien en France qu’à l’international.
Cette critique est portée par un ton qui oscille entre indignation et colère, une colère dirigée contre ceux qui, par passivité ou complicité, ont laissé l’affaire de Creil se transformer en un symbole de renoncement. Le texte d’Abnousse Shalmani est profondément engagé, tant dans la défense d’une laïcité combattante que dans le rejet d’une société de ghettos communautaires.
Pour l’auteure, le danger n’est pas seulement religieux, il est également politique. La laïcité est la condition même de la démocratie républicaine, et son affaiblissement ouvre la voie à une fragmentation de la société en communautés rivales. Cette fragmentation, selon elle, fait le jeu de ceux qui voudraient réduire la France à une mosaïque de ghettos, éloignée de son passé humaniste et universaliste. Abnousse Shalmani défend avec ferveur l’idée que la République ne peut survivre si elle ne défend pas fermement les principes de laïcité et d’universalité qui la fondent.
L’ouvrage se conclut sur une note de résistance. Abnousse Shalmani sait que son combat est difficile et qu’il s’oppose à des forces puissantes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des frontières françaises. Cependant, elle refuse la capitulation et se pose en gardienne de l’héritage des Lumières, cet humanisme qui considère chaque être humain comme égal, peu importe son origine, sa religion ou son sexe.
Laïcité, j’écris ton nom est un essai dense et percutant, qui ne laisse personne indifférent. Et surtout pas le maçon ! Abnousse Shalmani y expose, avec une clarté et une force rares, sa vision d’une laïcité républicaine mise en péril par l’islamisme et par les renoncements successifs des gouvernements et des élites intellectuelles françaises. Elle appelle à un sursaut, à une résistance ferme contre toutes les tentatives d’imposer une vision communautariste de la société, et à une réaffirmation des principes humanistes et universalistes qui ont fait la grandeur de la République française.
Biographie de l’auteure
Née en Iran en 1977, Abnousse Shalmani est une journaliste, romancière et essayiste française d’origine iranienne. Exilée en France avec sa famille pour fuir le régime islamique instauré par Khomeiny, elle a fait de la laïcité et de la liberté d’expression les piliers de ses écrits. Elle est l’auteure de plusieurs ouvrages notables, parmi lesquels Khomeiny, Sade et moi (2014), où elle aborde de façon percutante sa révolte contre l’oppression religieuse. Dans Éloge du métèque (2019), elle célèbre la diversité culturelle et condamne les dérives identitaires. Son dernier essai, J’ai péché, péché dans le plaisir (2024), témoigne de son engagement toujours vif pour la liberté sous toutes ses formes.
Présentation de l’éditeur
Les Éditions de L’Observatoire sont une maison d’édition française fondée en 2017, spécialisée dans la publication d’essais et de romans traitant des grands débats de société, de la politique et de la culture. L’Observatoire a pour vocation de donner la parole à des auteurs engagés qui interrogent notre monde contemporain, avec un accent particulier sur les questions de liberté, de laïcité et de démocratie.
Laïcité, j’écris ton nom
Abnousse Shalmani – Éditions de L’Observatoire, 2024, 80 pages, 10 €
Merci pour cette présentation, du contenu profondément courageux, d’actualité, et vrai que vous évoquez, de cet ouvrage.
Merci à cette femme aux qualités et au courage exemplaires (je suis ses “coups de gueule” quasi quotidiennement sur LCI à 19H30), et aux analyses de politiques étrangère et française si pertinentes,
Elle nous fournit encore plus de raisons pour être actifs/actives dans nos activités maçonniques pour le bien de l’humanité en général, et la liberté de penser en particulier.
J’ai dit,
Jérôme Lefrançois