jeu 27 juin 2024 - 23:06

Le premier noir Franc-maçon… qui était-il ?

De notre confrère humanite.fr – Par Caroline Constant

Musicien d’exception, révolutionnaire et premier homme noir à diriger un bataillon, qui est le chevalier de Saint-Georges ? Né esclave, le chevalier de Saint-Georges est devenu un musicien incontournable du XVIIIe siècle, un familier de la Cour et le premier Noir à diriger un régiment pendant la Révolution. Un documentaire sonore le sort d’un relatif oubli.

Joseph Bologne, chevalier de Saint-Georges, est né noir et esclave, a joué à la cour de Marie-Antoinette, avant de diriger un bataillon dans l’armée révolutionnaire. Cet homme a eu un destin absolument romanesque et hors du commun, que raconte dans ce podcast en six épisodes Claudia Soto, sur un récit de Cécile Baquey et une réalisation de Bruno Dessommes.

Il reste pourtant peu de traces de cet homme. Né vers 1745 d’une mère esclave et d’un père grand propriétaire terrien, il a pris, à la naissance, le statut social de sa mère, comme le prévoyait le Code noir de Colbert qui assimilait les esclaves à des meubles. On ignore, raconte le podcast, l’identité exacte de son père. Ce qu’on sait, en revanche, c’est qu’il a embarqué pour la France, avec la mère et l’enfant vers ses 10 ans.

Ses œuvres sortent de l’ombre

Il aurait alors aussitôt affranchi les deux, tout en s’occupant de donner une éducation complète à son fils. Ce dernier a ainsi intégré une pension pour jeunes aristocrates dirigée par Nicolas Texier de La Boëssière, un maître d’armes célèbre en son temps. Très vite, se révèlent ses exceptionnelles dispositions pour l’escrime. Il est surnommé « l’inimitable » par ses contemporains, et gagne la plupart des duels qu’il engage, y compris le plus célèbre, contre le chevalier d’Éon, le fameux espion français qui vivait en Angleterre.

Mais c’est par sa musique que le chevalier de Saint-Georges est parvenu jusqu’à nous. Violoniste hors pair, il s’est piqué assez jeune de compositions qui ont ravi la Cour, où son père lui avait acheté une charge. Comme il est protégé par le duc d’Orléans, ses œuvres seraient parvenues jusqu’à Marie-Antoinette. Elles sont savantes et très modernes pour l’époque. Mozart et même Beethoven lui auraient beaucoup emprunté. Le cousinage entre les compositeurs est dans tous les cas assez net.

En 1776, Jacques Necker, ministre des Finances de Louis XVI, a même proposé sa candidature pour diriger l’Académie de musique. Deux chanteuses et une danseuse, que l’histoire a oubliées, s’y sont opposées, et ont adressé un placet, une sorte de pétition à la reine, pour prévenir que « leur honneur et la délicatesse de leur conscience ne leur permettraient pas d’être dirigées par un mulâtre ». Ce n’est pas la seule fois, d’ailleurs, que le chevalier a eu à composer avec les préjugés. Il lui est aussi arrivé de se faire bastonner en bonne et due forme dans les rues de Paris, racontent les biographes convoqués par les auteurs du podcast.

Très vite, le chevalier a intégré les salons des Lumières. Il est devenu franc-maçon et, évidemment, un fervent abolitionniste de l’esclavage. En 1789, il choisit le camp de la Révolution et devient le premier colonel noir à diriger un régiment. Emprisonné en 1793, il passe une dizaine de mois de prison avant d’être relaxé. Il meurt en 1799. Et si ses œuvres disparaissent, c’est que Napoléon Ier, quand il a fait rétablir l’esclavage en 1802, les a effacées du répertoire. Depuis le début du siècle dernier, elles sortent de l’ombre où on les avait enfermées. Trépidantes, comme la vie du chevalier.

Zistoir. Chevalier de Saint-Georges,

5 Commentaires

  1. Bonjour,
    J’aime beaucoup la musique du Chevalier St George, et j’admire son talent reconnu sur tant de disciplines, et suis totalement pour lutter contre l’oubli de son existence et de ses mérites. Mais affirmer que Mozart et Beethoven lui aurait emprunté … ça j’en doute très fort. Certes le Chevalier St George n’a rien à envier aux deux génies contemporains, et sans doute certaines de ses compositions ont peut-être été perdues. Mais la diversité et la complexité des oeuvres de Mozart et Beethoven montrent que très jeunes, ils dépassaient les compositions types qui font se rejoindre en effet le Chevalier St Georges et Mozart et Beethoven. Si Saint Georges avaient davantage vécu et avait été aussi protégé, ils les auraient peut-être égalé dans l’éventail de leurs créations, mais pour l’instant on ne pas pas affirmer qu’ils lui ont emprunté quoique ce soit. Particulièrement Mozart, vraiment contemporain de Saint Georges, (Beethoven était plus jeune).

  2. A lire :
    Monsieur de Saint Georges, le nègre des lumières
    Une biographie écrite par Alain Guédé
    Éditions Acte Sud, 1999

  3. En tant que professeur d’Histoire-Géographie, Historien et Sociologue Chercheur, je peux dire que, le destin exceptionnel du Chevalier de St Georges ressemble en beaucoup de points à celui de Pouchkine dans la cour du Tsar Pierre le Grand (Pierre 1er) en Russie, à la différence juste de carrière (le Chevalier de St Georges, escrimeur, musicien, militaire, Pouchkine, est dans le monde de la littératur, il est précisement poète et écrivain, Père fondateur de la littérature russe au sens strict du terme).

    En outre, on peut aussi dire que, le destin du Chevalier de St Georges (notamment leurs parcours d’esclaves à l’Amérique centrale pour le Nord: futurs Usa pour Prince Hall, et France metropolitaine pour le Chevalier de St Georges), ressemble aussi à celui de Prince Hall, l’un des premiers Afro Americains maçons, dont le nom a été donné à l’ex African Lodge aux USA.

    Et justement parlant de Prince Hall et du Chevalier de St Georges au niveau maçonnique, je pense qu’il serait prudent et logique de dire au niveau du titre de cet article que “Le premier noir Franc-maçon DE FRANCE… qui était-il ?, (comme le dit d’ailleurs Wikipédia dans la biographie du Chevalier de St Georges, en parlant de premier franc maçon Noir de France), car si nous regardons les faits historiques et lisons la biographie de Prince Hall, il se peut qu’il ait été initié à la Franc-maçonnerie avant le Chevalier de St Georges, donc si nous partons dans cette perspective, et bien c’est Prince Hall qui est ou sera le PREMIER FRANC MAÇON NOIR (DE L’HISTOIRE) du moins jusqu’à preuve du contraire. Voilà mon avis en tant qu’Historien.
    En tout cas l’article est enrichissant et je pense aussi que la video qui figure dedans est toute aussi enrichissante. Bravo à l’autrice, qui a toujours écrit des articles interressants sur des événements et personnages historiques pour rappeler cela dans la mémoire collective.

    • Quelques ajustements: Pouchkine était* dans le monde de la littérature*, il était précisement poète et écrivain*.

      Et parlant de Prince Hall en tant que premier franc maçon Noir de l’Histoire (jusqu’à preuve du contraire si nous suivons la biographie de ce dernier comme je l’ai dit dans mon commentaire précédent), il serait plus logique de dire même que “Prince Hall, est l’un des premiers francs maçons Noirs de l’Histoire, car quand Prince Hall était initié, il n’était pas le seul Afro Americain, ils étaient plus de dix Afro-américains, 15 pour être précis, lui et 14 autres Afro Americains, donc voilà.

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Alice Dubois
Alice Dubois
Alice Dubois pratique depuis plus de 20 ans l’art royal en mixité. Elle est très engagée dans des œuvres philanthropiques et éducatives, promouvant les valeurs de fraternité, de charité et de recherche de la vérité. Elle participe activement aux activités de sa loge et contribue au dialogue et à l’échange d’idées sur des sujets philosophiques, éthiques et spirituels. En tant que membre d’une fraternité qui transcende les frontières culturelles et nationales, elle œuvre pour le progrès de l’humanité tout en poursuivant son propre développement personnel et spirituel.

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