“Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères. Sinon nous mourrons ensemble comme des idiots”. (Martin Luther KING)
“Bonsoir mon Frère, bonsoir ma Sœur !”
Chaque quinzaine, le même rituel joyeux recommence dans tous les ateliers maçonniques du monde : avant l’ouverture de la « tenue », et de mettre cordon, tablier et gants, les francs-maçons et franc-maçonnes prennent le temps de se retrouver et de s’embrasser par trois fois en se tapant sur l’épaule. Le regard est direct, le sourire chaleureux, les mots sincères, l’accolade franche…même si les barbes de ces messieurs piquent un peu, après la journée de travail ! Chaque frère, chaque sœur, est disponible pour son frère, pour sa sœur.
Du mythe au symbole
Si les maçons sont frères et sœurs, c’est que, d’évidence, il existe une fratrie et des parents ! Au fil du temps, selon les légendes et les rites, selon aussi, l’imagination fertile de personnalités maçonniques influentes, les francs-maçons ont été, ou restent, les « fils » de plusieurs héros mythiques. De Noé d’abord, le patriarche du déluge biblique. Puis, entre autres, parmi les plus prestigieux, de Jacques de Molay, grand maître des Templiers, ou encore d’Osiris, le dieu égyptien. Et enfin, ceux d’Hiram Abif, l’architecte du roi Salomon. C’est ce dernier qui fait désormais l’unanimité, si l’on peut dire, et qui a été « reconnu » et conservé dans la plupart des rites – même certaines branches du compagnonnage s’y réfèrent – depuis le XIXème siècle.
Les maçons sont donc, du même coup, les fils de la veuve d’Hiram (cette veuve étant logiquement sa femme, bien que certains auteurs avancent…qu’il s’agit en fait de sa mère !) d’où, quoi qu’il en soit, l’expression maçonnique “les enfants de la Veuve”, celle-ci symbolisant la franc-maçonnerie.
Ces légendes sont à prendre comme telles. Pour vivre, elles ont besoin sans cesse d’être réinventées. Superposées, juxtaposées, elles sont comme toujours, malgré leur charme, notoirement imprécises. Et pour cause. Il ne s’agit donc pas de chicaner sur leur provenance ou leur articulation, mais au contraire, de les accepter dans leur fantaisie descriptive et évocatrice ! Elles ont ainsi pour résultat que les francs-maçonnes et les franc-maçons, avec Hiram pour père et la franc-maçonnerie pour mère, sont bien entre eux des frères et des sœurs. Une fratrie déclinant une fraternité qui, nous le savons, constitue à la fois le fondement de l’organisation comme son ciment, et que l’on retrouve dans les Constitutions de toutes les obédiences.
Mais cette fraternité, ce contact bienveillant en loge, « entre des personnes qui n’auraient normalement jamais dû se rencontrer » – selon les pasteurs Desaguliers et Anderson (le père des Constitutions du même nom, publiées en 1723) – qu’en est-il vraiment ? Soyons honnêtes, ce lien que l’on a pu appeler “fraternité choisie”, mais qui est en réalité davantage une “proximité provoquée” par les circonstances, ce lien ne va pas immédiatement de soi. Et cette prudente retenue est logique !
Certes, elle s’atténue et disparaît au rythme des tenues, mais il serait faux de dire que dans un atelier, les maçons, anciens et nouveaux confondus, deviennent « copains d’enfance », dès qu’ils sont mis en présence les uns des autres. La cohésion du groupe se fait lentement, et c’est bien ainsi. Il faut bien que ces « frères de hasard » se mesurent, se jaugent, puis se rencontrent, au sens fort de ce verbe. Au risque même, inconvénient de l’avantage, que les affinités entraînent le clanisme, trop souvent ferment de désaccords. Ne fermons donc pas les yeux sur cette tendance des ateliers – déjà naturellement scindés par les degrés – qu’il convient d’empêcher avec une bienveillante fermeté.
Dans une vie, nous croisons des milliers de gens, mais nous en rencontrons très peu ! Parce que la rencontre, la vraie, celle qui rapproche les êtres, jusqu’à l’authentique communication – qui veut dire « mettre en commun », « communier » – est rare. L’atelier maçonnique permet cette mise en commun à travers ce que d’aucuns peuvent percevoir comme un conditionnement, mais qui, de fait, se traduit par une série d’obligations, auxquelles chaque membre souscrit en toute liberté.
La solennité, le silence, la bienséance, la correction vestimentaire, le port de « décors » à visée symbolique, le ton de voix aimable et posé des officiants, l’autolimitation du temps de parole, les déplacements codifiés, le recueillement général, sont, à leur place et moment, autant “d’ingrédients symbiotiques”. Leur utilisation répétée et le vécu simultané par chaque membre du groupe, participent à la création et ensuite à l’entretien de la fraternité. Il est clair que ce protocole calculé, éprouvé et compris depuis plusieurs siècles maintenant, impose une forme de discipline, qui devient, individuellement, une règle de conduite. Celle-ci n’est toutefois pas le résultat d’une manipulation quelconque. La méthode maçonnique, basée sur la réflexion symbolique, ne relève ni de la magie, ni de la sorcellerie !
Une belle histoire
Il a été parfois rapporté que l’exercice des rituels provoqueraient chez les individus hypersensibles des « états modifiés de conscience », comparables aux effets de l’hypnose (transes, visions, hallucinations auditives, contacts avec des esprits, accès mystiques, etc, etc). Si de tels phénomènes sont susceptibles de se produire dans certaines cultures (par exemple, lors des pratiques vaudous ou dansantes des derviches tourneurs), ils n’ont pas leur place dans le travail symbolique en loge ! Il ne faut pas assimiler la légitime émotion émanant d’une ambiance recueillie – jusqu’aux larmes parfois lors d’intenses cérémonies – à des effets paranormaux.
Même l’étrange « égrégore », qui se définit par les uns comme un inconscient collectif, et par les autres comme le sentiment d’une unité de pensée dans un groupe en méditation, n’est pas aussi mystérieux qu’on veut bien le dire. L’entité à type d’être collectif – hypothèse encore – qu’engendrerait soi-disant l’harmonie d’une assemblée, peut être le fruit de pratiques occultistes, pourquoi pas, mais sans rapport ici, avec notre démarche. Restons sérieux : l’expérience maçonnique moderne est proposée à la pensée contrôlée d’hommes et de femmes, partant, aux commandes de leur raison.
Certes, il ne fait pas de doute qu’une ambiance sereine, vécue en même temps à chaque réunion par les frères et les sœurs, d’abord les déconnectent de la fureur citadine, ensuite les disposent à l’harmonie précitée, mais au sens de l’accord avec sa propre personne et celle d’autrui : détente, attention, présence à soi-même, découverte et prise en compte de cet « autre », écoute, compréhension, respect et calme mutuels. Une paix intérieure qui se prolonge fréquemment à la sortie du temple. Et parvient à nous faire donner sur nos semblables un nouveau regard, vidé de son agressivité, le volant de notre voiture retrouvé ! Parce que nous ne sommes pas que frères-maçons en loge, mais frères de tous les hommes, dans ce grand village, qu’est devenue la planète terre aujourd’hui.
Comme le mot « liberté », celui de « fraternité » a une forte connotation artisanale en maçonnerie moderne, et l’avait déjà en période opérative. Là encore, il importe peu de savoir si la maçonnerie spéculative d’aujourd’hui (au sens de la recherche abstraite), affirmée en Angleterre en 1717, – après l’achèvement des dernières cathédrales – a vraiment partie liée avec les anciens bâtisseurs, ou s’il s’agit d’un arrangement de ses créateurs avec l’histoire. Mais pour comprendre la force de cette fraternité qui elle, est bien passée d’un système à l’autre, il faut remonter le temps de quelques siècles. En France comme en Angleterre on parle de « confréries professionnelles » et de « communautés fraternelles de mestiers » dès le XIème siècle, le mot « corporation » n’apparaissant qu’au XVIIIème siècle. Ces confréries, maçonnerie, compagnonnage, guildes du bâtiment, entre autres, très pieuses et encadrées par l’Eglise, instaurent « l’égalité fraternelle », à type d’aides et de secours mutuels.
Ce corporatisme, non encore nommé, ancêtre lointain du syndicalisme, évoque donc très tôt une solidarité propre aux métiers de la construction, qui voit chaque ouvrier engagé vis-à-vis des autres, comme si tous étaient membres de la même fratrie et partant, frères biologiques. Ainsi apparaît cette notion de famille qui passera dans la maçonnerie spéculative. L’expression populaire « il est du bâtiment » désignant une personne intégrée à une profession, indique bien cette notion d’appartenance à un groupe identitaire. Il n’est donc pas surprenant que le vocable « frère », découvert dans les manuscrits opératifs anglais fondateurs (appelés du nom de leurs rédacteurs, « manuscrits Regius et Cooke », les plus anciens retrouvés) et suggérant déjà en quelque sorte le lien de responsabilité entre les membres – soit ensuite passé dans les Constitutions d’Anderson, avec la même vocation.
Précisons, sans insistance cocardière, que si lesdites Constitutions sont nées sur le sol anglais, l’idée en est française, puisque leur rédaction est attribuée de source quasi certaine, à Jean-Théophile Desaguliers. Une belle histoire, une belle revanche aussi, pour ce pasteur, parti de La Rochelle petit enfant, chassé par l’anti-protestantisme, et caché par son père dans un tonneau. Au fond de la cale d’un bateau, en partance pour Londres ! Il n’est pas inutile de rappeler que cet ecclésiastique formé à Londres, fut également un brillant scientifique, adjoint d’Isaac Newton. Quand on sait que ce savant est le père de l’attraction universelle et de la théorie du rayon lumineux, la tentation est grande d’y voir les métaphores créatrices de la maçonnerie spéculative : l’idée de la terre-aimant (entendue comme l’Amour et l’attirance de l’autre) et de la lumière (vue à la fois comme l’éclairement et la chaleur humaine) est venue à l’esprit de nombre d’historiens, qui n’hésitent pas, de ce fait, à désigner Newton comme le véritable fondateur de l’Ordre !
Quoi qu’il en soit, même s’il ne fallait évoquer ici que de pures coïncidences, le concept d’une « famille mondiale », est une merveilleuse perspective. Convenons-en, elle constitue à la fois un rêve magnifique et, par l’infinité signifiante des symboles…une méthode complexe. Car « maçonner » n’est pas facile en soi. Dans notre société pyramidale, où la hiérarchie est omniprésente, où le corporatisme atteint des sommets, où le niveau social et l’argent sont devenus des mètres-étalons, est-il imaginable que dans une association, un boulanger embrasse un Président-Directeur Général, qu’un commissaire de police sympathise avec un steward, qu’un garagiste tutoie une institutrice ? Réponse : oui, c’est possible en maçonnerie, parce que la convivialité y correspond à la considération de l’être humain, avant sa fonction. Sans qu’il n’y ait à voir dans cette approche et cet attachement réciproques, une quelconque connotation sectaire, la liberté de partir étant, pour chacun, une éventualité sans conditions ni préavis.
Cette fraternisation est également réalisable par l’application d’une autre règle typiquement maçonnique, aux effets sains et bienfaisants : l’abandon symbolique des métaux sur le parvis du temple. C’est-à-dire, « tout ce qui brille », tous les faux biens, clichés, passions, ardeurs et élans inconsidérés. Ainsi, grâce à cette volonté de présenter, en toute modestie, son cœur avant ses qualifications et ses valeurs… autres que boursières, chacun, – au-delà des jeux sociaux laissés au vestiaire – devient responsable de chacun.
Frères et faux frères
Une telle fraternité « construite », librement consentie et exercée, est fréquemment aussi forte qu’une fraternité de sang, quand elle est entretenue. Ne serait-ce que, justement, parce que la rencontre est régulière, souvent même plus fréquente, que celle intervenant dans une fratrie biologique. Comme telle, elle devient un modèle de communication à diffuser dans la cité, en nous permettant de comprendre que, lorsqu’il s’agit d’amour et d’affection, la biologie n’a rien à voir à l’affaire ! Certes, nous n’avons pas de « centre de l’amour » dans le cerveau, comme nous disposons d’un centre de la toux, qui nous ferait aimer l’autre par seul réflexe. Mais nous possédons mieux avec l’intelligence, qui doit nous amener à définitivement admettre que tous les hommes, toutes les femmes, de toutes conditions, profanes, francs-maçons et franc-maçonnes, sont pétris de la même pâte, vivent sur un sol identique – séparés par des frontières artificielles – et font le même voyage. Autant de raisons impérieuses de s’aimer et de s’estimer !
On n’a pas assez dit que la franc-maçonnerie, par discrétion sans doute, a été et demeure, sous cet angle, une école exemplaire. En revanche, les porte-voix médiatiques, d’emblée généralisateurs, affirment encore trop souvent que, au titre de la fraternité, notre association est une vaste entreprise de copinage et d’entr’aide professionnelle entre ses membres. Au point que l’expression générique « c’est une franc-maçonnerie ! » désigne couramment toute organisation qui favorise en circuit fermé des intérêts particuliers.
Il est clair que la franc-maçonnerie, comme microcosme sociétal, ne comprend pas que des gens irréprochables. La tentation existe pour quelques « faux-frères » d’en exploiter commercialement le réseau relationnel. Mais est-il bon de faire mousser cet aspect regrettable, quoique très minoritaire – qui touche toute communauté importante – à coup d’éditoriaux moralisateurs et de « pavés de librairie » ? Outre le geste délateur, resurgi d’une sinistre époque, cette “inflation informative” revient à valoriser et, finalement à majorer les écarts de conduite observés. C’est bien ce qui se passe quand la justice est appelée à faire son travail : aussitôt, l’écho médiatique tend à multiplier le soupçon par le nombre de frères. Résultat instantané dans l’opinion : 120 000 francs-maçons = 120 000 affairistes ! Et après jugement, il est rare que les démentis éventuels soient apportés par la presse, pourtant si prompte à dénoncer. Le procédé est classique et attriste profondément, voire décourage, l’immense majorité de maçons honnêtes.
Car la réalité du terrain, hors les exceptions précitées, est heureusement tout à l’honneur de l’Ordre. Lorsque dans le plus pur sens du mot, la fraternité devient par exemple, synonyme d’emploi, nombre d’employeurs francs-maçons pourraient témoigner qu’en cette période impitoyable, ils n’embauchent pourtant pas en priorité un collaborateur parce qu’il est frère, mais d’abord parce qu’il a les qualités requises pour la fonction à pourvoir. C’est alors l’excellence qui, de plus, est attendue du postulant, tradition des bâtisseurs exige ! Ainsi comprise, et comme dit mon vieux Larousse d’écolier, «la fraternité est la plus noble des obligations sociales ».
Il a pu être avancé que la franc-maçonnerie, pourvoyeuse de bons sentiments, dont une grande tolérance, est de ce fait mal armée pour effectuer la tâche indispensable de « filtrage », lors de l’accueil de nouveaux membres. Au vrai, cette ancienne société secrète, devenue discrète, a encore du mal à perdre ses réflexes originels qui entretiennent une propension au non-dit. Si, d’évidence, il appartient au parrain de présenter un candidat loyal et d’avoir un « regard d’avance » sur son évolution favorable au sein du mouvement, il revient aux « enquêteurs » désignés de ne pas masquer par gentillesse dans leur rapport, les manques, les défauts qu’ils perçoivent. Nous en avons tous.
Certes, il n’est pas toujours aisé d’appréhender sur le champ, entre autres critères déterminants, les motivations réelles, l’aptitude relationnelle d’une personne, sa disposition aux certitudes et aux doutes, son goût pour le pouvoir ou la soumission, son degré de résistance aux frustrations, son endurance, sa fidélité à un serment. Les bonnes réponses de celui qui « frappe à la porte du temple », ne peuvent venir que des bonnes questions de ceux qui sont à l’intérieur. Les goûts automobiles ou le statut sexuel d’un postulant importent moins que son exigence ou sa rigueur morale. Il ne s’agit donc pas d’être élitiste en matière de recrutement, mais de faire preuve de discernement. En maçonnerie, au plan de la réflexion et de l’exercice de la fraternité, un tourneur sur métaux vaut un énarque !
Il n’y a pas que les affairistes à dépister et à écarter. Si la franc-maçonnerie n’a pas vocation à apparaître comme un centre de négoce, elle ne doit pas non plus être confondue avec une institution psychothérapeutique. Même si à l’image de la psychanalyse, son but est d’offrir la liberté intérieure à l’individu. Dans le cadre de la réserve précitée, à l’image des signifiants des trois singes de Notre-Dame de Paris (ne rien voir, ne rien dire, ne rien entendre), le distinguo nécessaire n’est pas toujours annoncé et les ateliers se retrouvent parfois en position délicate de “lieu de soin”, hors de leur objet. Un tel malentendu – finalement handicapant pour les deux parties – peut tout à fait être évité par une information préalable, donnée avec le tact nécessaire.
Des êtres de désirs
Enfin, abordons un point capital que l’on aurait tendance à éluder : la loge maçonnique est un espace d’expression. Pour chacun, du trop-plein au manque. De l’humeur à l’humour. Emetteurs et récepteurs, nous sommes tous des « êtres de désirs ». Dans cet esprit, il ne faut pas se cacher que chaque membre d’une association (les obédiences maçonniques sont des associations Loi 1901) vient certes donner de lui-même – ce don de soi est demandé avec insistance – mais il vient aussi recevoir, c’est-à-dire quérir quelque chose, au sens effectif de « désirer ». De cela, on parle moins.
Au-delà du besoin d’appartenance et de la volonté de développement personnel, au-delà de la rencontre, de l’échange et de l’altruisme, aussi sincères soient ces élans, chaque frère, chaque sœur, selon son histoire et ses conditions de vie, ses forces et ses faiblesses, se présente, en demande, en recherche (pas seulement « spirituelle », avec toutes les interprétations de ce mot et adjectif, si souvent entendus !). Cette demande est plus ou moins secrète, voire inconsciente. Qui d’un père, d’une mère, d’un partenaire, d’une famille, d’un « espace d’amour ». Qui de compréhension, de reconnaissance, d’honneurs, de gratifications, de pouvoir précité (pouvoir perdu, pas encore ou jamais obtenu ailleurs, cercle familial compris). Qui de confiance en soi ou de l’ennui. Qui de fournisseurs ou de clients, nous venons d’en parler. Cette dernière quête, n’en doutons pas, génèrent largement les fameuses « affaires », dans les loges qui, souvent par un laxisme coupable, veulent bien accepter leur existence !
La liste est longue de nos attentes, conscientes ou non, de nos souhaits affectifs, intellectuels ou matériels. Les francs-maçons ne doivent pas occulter ces paramètres fondamentaux, générateurs de satisfactions… ou à l’inverse, de déceptions, de rancœurs non comprises et finalement, de démissions. Les frères et sœurs sont donc invités, non seulement à s’aimer les uns les autres, mais à tenter de saisir leurs « fonctionnements » respectifs. Il ne s’agit pas d’entrer systématiquement dans le désir d’autrui et le satisfaire, mais d’y être attentif, ce que notre interlocuteur perçoit. Point n’est besoin pour autant de jouer au psychothérapeute : il n’est de meilleure oreille qu’un cœur ouvert. Si nous prétendons être à l’extérieur des loges, des modèles de communication, c’est à l’intérieur que nous devons apprendre à écouter le monde.
Aujourd’hui, on communique de plus en plus, mais on se parle de moins en moins ! Pour les authentiques « fils et filles de la lumière », l’enjeu est heureusement tout autre que la minable visée commerciale d’une poignée d’opportunistes, après-coups identifiés. Il s’agit de montrer et démontrer que, à l’exemple des maçons de toutes ethnies, toutes couleurs, toutes confessions, qui constituent notre Ordre, les Hommes peuvent vraiment vivre ensemble !
Certes, la tâche est immense. Depuis son origine, l’homme est un loup pour l’homme. Un tragique 11 septembre vient de nous rappeler que la pulsion de mort pointée par Freud, est toujours inscrite en nous. Il nous reste donc un travail interne à réaliser pour détruire cette disposition criminelle blottie dans notre cerveau archaïque. L’homme est soi-disant poussière d’étoile, mais son esprit diabolique pourrait finalement le réduire en cendres ! Sur cette planète, sans cesse en proie à des crises de folie meurtrière, que pouvons-nous prétendre nous, les frères et les sœurs aux mains nues ?
L’effroyable destruction des édifices américains nous renvoie à la mythologie : de l’écroulement de la tour de Babel, aux démolitions successives du temple de Salomon, métaphores de la « mésentente » des peuples. La tradition maçonnique, bien comprise et bien utilisée, nous enseigne que l’écoute et la parole, sont à la fois nos armes et nos outils. L’une et l’autre nous permettent de poursuivre inlassablement notre mission choisie de transmission fraternelle au quotidien : de personne à personne, de groupe à groupe, d’état à état.
Au vrai, nous n’empêcherons pas que la franc-maçonnerie, qui se veut une fraternité universelle, puisse être perçue comme une utopie. La plus lointaine des étoiles connues a été précisément baptisée du joli nom d’« Utopia ». Hier, un équipage comprenant le cosmonaute américain et franc-maçon Eldwin Aldrin est allé se poser sur la lune, demain d’autres iront sur Mars, puis, après-demain sur Vénus. Espérons sans gémir.
L’inaccessible étoile est en vue
Osiris est cité dans ce très beau texte. J’aimerais attirer l’attention de nos Sœurs et Frères sur un ouvrage peu connu et si justement intitulé “Osiris – Mort et renaissance d’un dieu” (Flammarion, 2007) de Bojana Mojsov, égyptologue de renommée internationale.