Jean Vassort – Éditions Ouest-France, 2022, 286 pages, 23 €
Présentation de l’éditeur : Les Lumières, développées notamment en France au XVIIIe siècle, sont un sujet ouvert sur la modernité et qui demeure au cœur des débats contemporains les plus vifs ? Un sujet qui ne relève pas que de l’histoire intellectuelle, mais qui touche aussi les aspects, économiques, politiques et artistiques du XVIIIe siècle ? Un thème cultivé par les philosophes français (Voltaire, Rousseau, Montesquieu, Diderot) et qui rayonne en Europe, mais que contribuent à développer aussi de grands penseurs étrangers, Locke et Newton, Adam Smith et Kant ? Le souci du livre est non seulement de présenter les philosophes et leur pensée, mais encore de les replacer dans l’époque et dans la société au sein de laquelle ils vivent. Les Lumières, ce n’est pas seulement une affaire d’idées : c’est aussi une manière d’être présent au monde et de se le représenter ? Le livre est très attentif à cette dimension concrète, en traitant de manière très illustrée des points aussi divers que la science ou la médecine, le problème du luxe ou celui de la paix et de la guerre.
Biographie de l’auteur : Agrégé d’histoire, docteur d’État, professeur honoraire de khâgne au lycée Descartes de Tours, Jean Vassort a travaillé sur l’histoire sociale et culturelle des provinces ligériennes et a collaboré à de nombreux manuels de l’enseignement secondaire.
[NDLR : Jean Vassort a notamment publié Les jardins de France – Une histoire du Moyen Âge à nos jours (Perrin, 2020), L’histoire des châteaux de la Loire (Ouest-France, 2018), Les châteaux de la Loire (Ouest-France, Coll. Délipoche, 2016) consistant en des fiches illustrées et Les châteaux de la Loire au fil des siècles art, politique et société (Perrin, 2012).
Cette fois-ci, il s’intéresse au siècle des Lumières qui, juste après celui de la Raison – le XVIIe – constitue une transition entre la Renaissance et la Révolution française. Un mouvement des Lumières tirant son nom de la volonté des philosophes européens dudit siècle de combattre les ténèbres de l’ignorance par la diffusion du savoir.
Pour comprendre la genèse de la Franc-Maçonnerie au début du XVIIIe siècle en Angleterre, il faut se tourner – encore une fois – vers le passé. Même proche. Avec l’histoire de ce qui n’est pas encore le Royaume-Uni – le traité d’Union entre l’Angleterre et l’Écosse est signé en 1707, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande naît en 1808 – qui a été fort agitée – nouvelle dynastie, les Stuarts ; tentatives d’établir l’absolutisme ; guerre civile entre partisans du roi et partisans du parlement ; dictature militaire d’Olivier Cromwell, etc.
Pour comprendre la genèse de la Franc-Maçonnerie au début du XVIIIe siècle en France, il faut se pencher sur le siècle des Lumières définit souvent comme celui correspondant à un mouvement littéraire et philosophique qui se développe entre 1715 et 1789 dans toute l’Europe. Mais pas que !
Car il est exact de dire que la Franc-Maçonnerie est l’héritière du siècle des Lumières. Siècle des Lumières qui fut le mouvement intellectuel et philosophique qui domina le monde des idées.
D’ailleurs l’« Encyclopédie », dirigée par Diderot et d’Alembert, n’est-elle pas le meilleur symbole de cette volonté de rassembler toutes les connaissances ? Et de les répandre auprès du public, surtout public éclairé.
L’« Encyclopédie » étant cet ouvrage majeur dudit siècle titré exactement « l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers », éditée de 1751 à 1772 sous la direction de Denis Diderot (1713-1784) et, partiellement, de Jean Le Rond d’Alembert (1717-1783), avec la contribution de plus de 160 auteurs. Rappelons que cette première encyclopédie française est conçue comme un vaste système de classement, de hiérarchisation et d’appréhension des connaissances humaines. Elle est composée de 17 volumes de texte, dont les 71 818 articles sont classés par ordre alphabétique, et de 11 volumes de planches dessinées par Louis-Jacques Goussier (1722-1799).
De ce siècle des Lumières et de sa philosophie, nous retiendrons sept points :
– la primauté de l’esprit scientifique sur la Providence dont la révolution newtonienne est l’illustration la plus marquante. Rappelons-nous que Isaac Newton (1642-1727) fut membre, dès 1762, de la Royal Society, la présidant de 1703 au 20 mars 1727, jour de son décès, faisant, en 1714, élire son « disciple », un certain John Theophilus Desaguliers (1683-1744), par ailleurs membre très actif dans la toute récente Grande Loge de Londres et de Westminster, fondée le 24 juin 1717 selon certains et dont il fut Grand Maître de 1719 à 1721, puis le Député Grand Maître à partir de 1722 ;
– la diffusion et la compréhension du Discours de la Méthode du mathématicien, physicien et philosophe René Descartes (1596-1650) ;
– la réflexion politique marquée par la théorie contractuelle, influencée par les travaux du philosophe anglais John Locke (1632-1704) ;
– les progrès de l’esprit critique à l’œuvre, par exemple, dans le Dictionnaire historique et critique (1697) du philosophe, écrivain et lexicographe Pierre Bayle (1647-1706) et la critique lockienne des idées innées ;
– une première désacralisation de la monarchie dont les Dialogues de M. le baron de Lahontan et d’un Sauvage dans l’Amérique dudit baron sont l’une des manifestations (édition de 1703).
Satiriques et polémiques y annoncent avec vigueur les grands débats philosophiques des Lumières – religion, politique, justice, mœurs – où le contraste du dialogue entre le Sauvage et l’Européen met en cruelle évidence les vices de notre civilisation ;
– l’affirmation de l’idée de tolérance dans une Europe marquée par les divisions religieuses dont l’œuvre Nathan le Sage de Gotthold Ephraim Lessing (1729-1781), pièce publiée en 1779 mais représentée pour la première fois à Berlin qu’en 1783, est une brillante illustration ;
– le déisme.
L’ouvrage de Jean Vassort nous conduit à la fois à cette découverte mais aussi nous entraine dans une connaissance de tout l’environnement de siècle en cinq chapitres avec « La progressive affirmation des Lumières », « La présence des Lumières », « Des Lumières en religion et en politique », « Les Lumières et le monde » et, avant l’épilogue, « Les Lumières à la fin du siècle ».
Nous y découvrons volontiers les salons littéraires où se réunissaient hommes et femmes lettrés et beaux esprits.
Nous y découvrons, page 82 et suivantes entre autres, comment la Franc-Maçonnerie apparaît en France en 1725 et se répand tout au long du siècle, au sein de la société française.
Mais aussi comment les Lumières restent essentiellement urbaines et donc limitées à une certaine élite…
De belles illustrations renforcent le texte nous rappelant que la culture visuelle joue un rôle dans notre mémoire.
Un livre éclairant qui nous fait mieux comprendre ce que sont les sciences, la société d’alors, les choix religieux et politiques, mais aussi l’engagement artistique.]