par Serge Toussaint, Grand Maître de l’Ordre de la Rose-Croix
Dans l’un de ses écrits, Épictète a déclaré : «La nature nous a donné une seule langue mais deux oreilles, afin que nous écoutions deux fois plus que nous ne parlons». Force est de constater que la plupart des gens parlent beaucoup plus qu’ils n’écoutent. Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que tout être humain, sous l’impulsion de son ego, c’est-à-dire de son «moi je», a tendance à vouloir monopoliser la parole lors d’un échange avec d’autres personnes. Souvent, cette tendance atteint son paroxysme lorsqu’il est en désaccord avec son interlocuteur, car il éprouve alors le besoin de le contredire et de lui prouver qu’il a tort.
L’écoute
Très rares sont les personnes qui savent écouter l’autre et lui laissent le temps de s’exprimer pleinement. Elles s’empressent généralement de l’interrompre et de reprendre la conversation à travers ce qui s’apparente à un monologue. Dans ces conditions, l’échange est difficile, voire impossible, car chacun s’emploie plus ou moins consciemment à faire valoir son point de vue, parfois sans même essayer de comprendre celui de l’autre. Dans les cas extrêmes, ce non-échange peut donner lieu à un rapport de force mêlant violence verbale et invectives. Nous avons tous eu l’occasion d’assister à ce genre de situation, que ce soit dans la vie courante ou lors de débats diffusés à la radio, à la télévision ou sur internet.
D’une manière générale, notre aptitude à écouter les autres est fonction de notre capacité à maîtriser notre ego lors d’une discussion. Une telle chose n’est pas aisée, car il est dans sa nature de vouloir s’exprimer, imposer ses idées, convaincre qu’il a raison, attirer l’attention, etc. L’écoute va donc de pair avec l’humilité, vertu qui, précisément, se caractérise par la retenue, la courtoisie et le respect de l’autre. Si vous connaissez parmi vos relations des personnes qui ont éveillé cette vertu, vous aurez certainement noté qu’elles écoutent plus qu’elles ne parlent et ne cherchent pas à monopoliser la parole. Tout en étant ouvertes à la discussion, elles favorisent le dialogue et l’échange.
Le silence
En règle générale, les personnes qui savent écouter sont également celles qui prennent régulièrement le temps de s’intérioriser et d’être à l’écoute de leur âme, de leur personnalité profonde. Elles ont intégré le fait qu’il faut s’efforcer de parler à bon escient et que le silence est parfois plus évocateur que les mots. Autrement dit, elles appliquent cette maxime connue de tous les Rose-Croix : «Si ce que tu t’apprêtes à dire n’est pas plus beau que le silence, abstiens-toi de parler». Cela suppose d’écouter l’autre avec l’intention de le comprendre et, si l’on prend la parole, de réfléchir préalablement à ce que l’on va dire. Mais l’écoute ne se limite pas à «écouter l’autre» ; elle consiste également à «être à son écoute», c’est-à-dire à lui prêter attention. Si faire preuve d’humilité est une vertu, être attentionné l’est tout autant : penser aux autres, se préoccuper de leur bien-être, les aider si besoin est, leur rendre service, sont autant de marques d’intérêt à leur égard et contribuent à rapprocher les individus. À l’inverse, l’indifférence les éloigne les uns des autres et désagrège le tissu social, avec tout ce qui en résulte en termes d’exclusion.