Les divers types de motivation commencent à livrer leurs secrets : découvrez leurs différences. Le flux est un mode particulier de motivation, qui embellit la vie ; nous pouvons le rencontrer et le cultiver en franc-maçonnerie.
Nous le savons tous : nous sommes capables d’accomplir de grandes choses lorsque nous sommes motivés. Et nous en retirons alors un sentiment de plénitude, bien décrit par Maslow juché sur sa pyramide . Ayn Rand, dans son « la révolte Atlas », martelait que si on se met au service d’une belle cause uniquement parce qu’on nous l’a enjoint, on tombe dans l’esprit de sacrifice, et tout se passera dans la douleur ou la morosité. Par contre, si on est au préalable passé par la case « accomplissement de soi », un altruisme authentique peut naître.
Nous voyons là déjà deux sources de motivation.
La première, l’extrinsèque, est ce qu’on appelle la carotte et le bâton : nous la subissons pendant l’éducation, puis au cours de notre vie professionnelle, et en bien d’autres occasions. Disons le franchement : c’est souvent une motivation « utilitaire » qui en résulte, on la comprend avec la tête, mais le cœur ne suit pas. Il arrive même qu’un travail que nous aimions nous plaît moins depuis qu’il est lié à des primes d’objectif ou carottes similaires.
L’autre source de motivation est interne, on appelle donc cette motivation intrinsèque, et elle peut nous booster bien plus que l’extrinsèque. Cela ne fonctionne toutefois que si nous nous connectons à nos désirs intimes. Les psychologues ont étudié les milliers de nuances de désirs exprimées par nos congénères. On y distingue trois grandes familles : l’envie d’auto-réalisation, celle du pouvoir, et celle de connexion. Dans la première, nous aurons des notions de progrès, de compétence, de perfectionnement ; dans la seconde, on trouvera les mots comme chef, commandement, ascendant, et dans la troisième, être entouré, aimé, connecté aux autres.
Attention, les désirs avancent souvent masqués, aussi il arrive que l’assouvissement d’un désir procure peu de satisfaction : c’est le signe qu’il s’agissait sans doute d’un désir-écran ; à vous de trouver la vraie envie derrière.
Les désirs évoluent également avec l’âge, et un fantasme de jeunesse peut se révéler fade si consommé trop tard : gare à la date de péremption !
Les chercheurs ont observé deux conditions grâce auxquelles la motivation intrinsèque peut rester efficace sur de grandes durées, et même dans un environnement hostile ( critiques, etc. ) : le sentiment d’autonomie et le sentiment de compétence. Cela nous rappelle la formule « bien faire et laisser dire ». Lorsqu’une activité est accomplie et qu’on a des signes montrant qu’on la fait mieux que les autres, même légèrement, la motivation s’en trouve renforcée. Le sentiment d’autonomie naît lorsqu’on a librement choisi l’activité et la manière de la pratiquer.
La naissance et le maintien de la motivation sont liés au circuit de la récompense ( dopamine etc. ) . On pense souvent que la libération d’une dose de dopamine ne porte que sur des plaisirs forts et ponctuels, comme lors du contact avec des drogues, mais les petits plaisirs de meilleure maîtrise, jalonnés tout au long de l’apprentissage, par exemple d’un instrument de musique, suffisent à rendre la motivation durable.
On peut en déduire que maintenir le circuit de la récompense actif nécessite que le prochain objectif soit non immédiat ( sinon pas de plaisir ) mais atteignable. On retrouve là les conseils très connus pour la fixation d’objectifs ( on se souvient du « SMART » dans lequel A signifiait atteignable et R réaliste ) .
En 1975 le psychologues ont décrit un état d’esprit particulier, qu’ils ont appelé « flux » ( flow puisque c’était aux USA ). La majorité d’entre nous le connaissent : on y était lorsque, une tâche difficile accomplie, on relève le nez en souriant et on déclare : « je n’ai pas vu le temps passer ! » C’est bien entendu une source immédiate de plaisir et de détente, mais aux effets efficaces, dans la durée, sur notre mental et notre estime de soi.
Les étudiants avec plusieurs activités pratiquées « sous flux » connaissent de meilleurs résultats en moyenne que les autres. Sortant d’une activité sous flux, on reconnaît avoir eu une vision en « tunnel », avec oubli de tout ce qui peut perturber la tâche en cours, une concentration parfaite avec souci du détail, et du plaisir tout le long.
A propos du flux, on pense inévitablement au « enivrez-vous, de vin, de vertu ou de poésie » de Baudelaire.
Analysant le côté physiologique de cet état, les chercheurs ont découvert un niveau de cortisol modérément élevé. Cette hormone, secrétée par les grandes surrénales, se trouve à des niveaux élevés lors des situations de stress, pénibles à vivre. A des niveaux moindres de cortisol on aurait donc une excitation comme dans le cas du stress, mais agréable. C’est probablement lié à une activation simultanée des systèmes nerveux sympathique et son antithétique le parasympathique ; ce dernier, jouant en principe du côté de la détente, est aussi celui qui peut conférer la sensation de bien-être. Côté ressenti, le flux donne une expérience subjective de contrôle : comme les choses se passent avec facilité, il en ressort un sentiment de maîtrise totale. La satisfaction globale de nos vies s’en trouve augmentée, et répercute ses ondes positives dans tous les domaines de notre vie, pourvu qu’on repasse en flux de manière régulière. On retrouve là cet ajustement mouvant entre le niveau de maîtrise du jour et l’objectif d’amélioration réaliste et atteignable qui maintiendra le flux et ses effets bénéfiques. Le chemin vers les objectifs à long terme doit donc être fractionné en de nombreux jalons intermédiaires . Des objectifs inatteignables peuvent générer du stress qui diminuera alors les chances de se mettre en flux.
Le sentiment de maîtrise, on le ressent aussi en franc-maçonnerie, isn’t it ? Qui n’a pas eu cette petite étoile de compréhension qui s’allume dans l’esprit à écouter une planche avec plein de nouvelles associations symboliques ? Ou, en grattant sa prochaine planche, l’aiguillon de plaisir quand le filon de l’inspiration est là, qu’on le suit jusqu’au bout, et puis « mince ça fait 4 heures que je suis dessus », fourbu mais heureux ?
On a observé un effet de contagion de personnes en flux vers les personnes de leur entourage, surtout si elles pratiquent la même activité : cela ressemble à de l’égrégore, non ? Avoir toujours le sens de ce qu’on fait présent à l’esprit favorise la survenue du flux : n’est-ce pas ce que nous faisons, surtout en ouverture de nos travaux ? Ensuite, le collège d’officiers et les travaux nous élèvent très progressivement vers l’amélioration de soi, la maîtrise de ses pulsions et les progrès collectifs. Remarquez la mise en pause périodique, lorsque la colonne d’harmonie fait son office, pour une courte méditation sur ce qui vient d’être dit, avant de reprendre le cheminement . La progressivité des rituels jalonne nos travaux afin d’obtenir la durabilité de nos efforts via notre circuit de feedbacks positifs.
Alors, parés pour des tenues en flux ?