Conclusion
En route !
Cri dans le désert d’Arne Naess, dès les années 60 : « L’homme ne se situe pas au sommet de la hiérarchie du vivant, mais s’inscrit au contraire dans l’écosphère comme une partie qui s’insère dans le tout » L’extrait vient de son livre au titre déjà révélateur : « Écologie, communauté et style de vie ». Déjà le lien entre notre état de nature et le fonctionnement de notre société. Et le monde commençait à avoir de la fièvre.
Au bout du chemin sur l’état de santé du monde, on se rend compte que ce qui parle au plus profond de l’humain, ce ne sont pas les cultures mais sa nature. Son étude relève d’abord et impérativement de l’éthologie. Nous sommes en cousinage de deux singes ; ils nous apprennent l’essentiel qui palpite dans nos tréfonds : les chimpanzés sont aiguillonnés par la compétition et règlent leurs fréquents conflits sans effusion de sang. Leur organisation est plus pyramidale. Les bonobos, eux, vivent sous le signe de la coopération ; ils règlent leurs conflits par l’affection et la sensualité. Ils préfèrent plutôt, entre eux, les relations en réseaux. En nous, jusqu’alors, le chimpanzé domine. En nous, avec l’hyper-capitalisme et les tristes affabulations qu’il provoque, la déification de l’argent, la consommation frénétique t les technologies pour le meilleur et pour le pire, les guerres en horreurs consommées, nous sommes, hébétés, sous le signe de la compétition. Mais nous sommes aussi des bonobos qui savons coopérer avec intelligence et dévouement, dans les situations douloureuses. Il nous reste donc à recouvrer la santé. Pour cela, osons rebâtir avec les blocs des pyramides qui nous contemplent depuis des siècles.
Commençons par changer radicalement notre regard d’observateurs de nous-mêmes, scientifique ou pas. Prenons la métaphore de l’arbre : l’éthologie nous pose en animal grégaire. C’est notre racine. En sort, le tronc de l’anthropologie et de la sociologie qui étudient les structures et les cultures. Les grosses branches avec les approches de la dynamique des groupe qui nous éclairent, en particulier, sur le fonctionnement des cellules anarchistes Puis les psychanalyse et psychologies qui en sont les branches ; enfin la connaissance de l’humain par lui-même : l’introspection et l’holistivité, ce regard qui embrasse spontanément le tout, le complexe, en dépassement de l’objectivité et la subjectivité.
Avec un regard renouvelé, retrouvons la concentration, la communion et la contemplation. Je me suis efforcé à prescrire un remède à l’état fiévreux du monde. Je le crois susceptible de l’aider à recouvrer une nouvelle santé et de palpiter en ces trois mots de rencontre. Le risque ? La complexité qui empêcherait l’humain de bien prendre en compte ses enjeux d’une société future libertaire.
Car « Quand le travail se fait brouillard, l’humain aussi se vaporise». J’espère que le brouillard s’est, au moins vaguement levé, grâce à la liste des personnages que le système nous demande d’endosser. En ordre croissant d’influence : des marionnettes compulsives et avides, un humain omniscient et hyperactif ; un saigneur, un seigneur, un soumis, des schizophrènes, un humanimal agressif, et peureux, enfin un humain en passe de devenir un libertaire.
Notre conscience collective prend en charge ces personnages d’importation. Mais le retournement, avant l’effondrement exige, en premier lieu que l’on regarde en face ce que nous sommes sans doute : des schizophrènes qui balbutient de plus en plus entre de nombreuses injonctions contradictoires. Le système, de plus en plus prégnant, de double contrainte nous fait trébucher : nous voulons tout à la fois ; et rien en même temps. Nous sommes avides de modes et de clans, dans l’occultation par l’écran des écrans
Les révoltes et les découvertes pointent leur museau dans des essais. Ils sont, à ce jour et malgré, les pesanteurs d’arrière, concluants : l’éducation libre, l’exemplarité revisitée avec les neurones-miroirs, l’après-vie avec les EMI et les hypothèses sur la survie de notre conscience hors du corps, la transmission épigénétique …et les éco-villages… tout cela, des traductions des utopies en anarchie pacifique. Reste la question métaphysique et vitale de tous les temps : mais qui sommes-nous ?
Oui sommes- nous, aujourd’hui, dans cet imbroglio, ce charivari, ce bredouillis ? Il faut, de plus en plus, que nous soyons à la fois, sous la pression de la société d’argent et de pouvoir, les humains ci-dessous :
• Cratophile ET arquéphile,
• En pyramide ET en réseau,
• Compétitif ET coopératif,
• Ocnophile ET stylobate,
• Solitaire ET solidaire,
• Prédateur, guerrier ET pacifiste,
• Individualiste ET mondialiste,
• Pressé ET méditatif.
C’est ainsi, la société actuelle nous moule, nous façonne, nous modèle en forte schizophrénie. En outre, elle sait bien réveiller nos peurs ancestrales avec le principe de précaution. Et le déversement publicitaire manipulateur. Enfin dans ces doubles injonctions, cette société nous menace d’abandon devant une épidémie virale : c’est la panique. Trembler, ensemble, devant ces dangers, devient la norme de la norme. C’est cela la norme. Elle est un puissant facteur de paix et une sécurisation intérieure. S’efforcer sans cesse de revêtir ces tuniques contradictoires, fait de nous des normosés. Alors, le pari de l’écolo-anarchie, de l’anarchie verte n’est-il pas pure utopie, puisqu’il exige de revenir à notre racine grégaire et à en remettre en cause des composantes « chimpanzées » pour mieux s’embrasser dans des réflexes bonobos ? Moi, j’y crois. Et vous qui lisez ce texte ?
Vite, cassons la voix ! Avant il fallait choisir, sous le joug religieux, un rôle réputé bon et fuir un autre de mauvaise réputation. C’était le règne du OU. Aujourd’hui, avec « la double contrainte », l’injonction paradoxale, nous devons ingérer des contradictions indigestibles. C’est le royaume du ET. Demain, me semble-t-il, nous aborderons d’autres rives, avec le NI/NI. La société en réseaux, l’écolo-anarchie, l’holistivité sont les conditions de cette alchimie. Le Grand Œuvre ? Un humain biophile, dans l’écologie de l’harmonie : avec soi, les autres, la nature.
Ils étaient des bagagistes tranquilles, nous somme des voyageurs inquiets, nous serons des explorateurs courageux. Par les effets d’ « une spiritualité pour agir », chaque humain sera un lac d’amour, dans le réseau de la société humaine. Ainsi, ce sera un NI/NI de douce rébellion. Quoi ? Pas une moyenne, ni une synthèse, ni un juste milieu, pas plus que l’ «aurea mediocritas » des sages de l’Antiquité, mais un nouvel hôte terrestre en tunique d’humble splendeur. Regards vers la Lune et le Soleil ésotériques.
Quand l’eau se transforme en vapeur, quand le feu rayonne de lumière, quand la terre jalouse ses germes, quand l’air balaie les montagnes, alors la Lune et le Soleil s’unissent en effusion circulaire d’amour. C’est la syzygie. Quand l’Homme, à l’instar des deux planètes, s’embrasera de la sagesse du sens de la vie, d’adaptabilité mesurée, de connaissance de soi, de fraternité pour lui est les autres, de biophilie en grande révérence pour les vivants, alors il agrippera le Sol(eil) et la Lune. Les astres l’adouberont « Solune », pour que la chouette hulule et la souris file.