Ce mot fait partie des milliers de mots dont les parlers celtes ont émaillé le latin qui les avait colonisés. Peut-être près de trente mille, que leurs avatars laissent entrevoir dans les dialectes modernes, gaélique et breton. Faute de traces littéraires fiables, force est de se contenter avec certitude des inscriptions ou des acceptions dans la langue courante des régions concernées. Mots souvent associés à la vie naturelle et rurale ou réservés à la sphère intime et quotidienne. Le chemin y participe, puisque l’on arpente ses terres, géographiques à cultiver, mentales à ensemencer de réflexion et de spiritualité.
Le celtique *caminus désigne le chemin sur lequel marche le chemineau un peu vagabond, avant que le cheminot du rail contribue à acheminer gens et marchandises.
Compagnons de voyages rituels et symboliques, nous ne saurions faire l’économie de ce vocable. Mais sans oublier que, comme l’énonce le philosophe allemand contemporain Rüdiger Safranski, « Il n’y a pas d’expérience sans acheminement. Arriver trop vite quelque part, c’est n’être nulle part »
Annick DROGOU
Qui a inventé le chemin ?
Si l’eau a naturellement un chemin qui est ruisseau, rivière ou fleuve, rien de tel pour les hommes et les animaux. Il a fallu inventer la piste. Et le premier chemin a été tracé entre deux parcelles. Ce sont les bords, les limites qui définissent le chemin. Tracer, c’est laisser trace, traces de pas innombrables qui façonnent le chemin. Et quand il s’agit de tracer sa route, le pas de l’homme se fait dessin. Le pied en est l’outil premier.
On suit la piste, on poursuit sa route. La marche n’est jamais solitaire, même si elle en a l’apparence : d’autres ont marché avant nous, ont fait le chemin. Pas de hors-piste, tout chemin semble balisé et cela n’en fait pas une impasse. Les chemins se conjuguent toujours au pluriel. À toi de choisir le chemin que tu emprunteras, et l’empreinte de pas que tu y laisseras, mince trace effacée par le vent et les pas des marcheurs à ta suite. Libre à toi de cheminer, d’aimer les carrefours et les échappées, d’apprivoiser le labyrinthe.
La vie comme un parcours, un pèlerinage, une longue marche, une traversée et la nécessité de faire le point comme le navigateur.
Dans la tradition initiatique, on chemine par étapes, nul court-circuit donnant un accès entier à la vérité et la connaissance. Petits pas. Horizon qu’on croit proche et qui s’éloigne au fur et à mesure qu’on avance. Surprise du paysage toujours renouvelé, familiarité éprouvée de la voie.
Jean DUMONTEIL
Un billet court mais plein de charme et de précisions délicates;. Merci !