mar 30 décembre 2025 - 17:12

La glande pinéale chez le Franc-maçon

Mythe biologique au symbole initiatique

La glande pinéale fascine autant qu’elle fait sourire. Entre science, mythes et symboles, elle occupe une place singulière dans l’imaginaire humain. Sans chercher à trancher entre biologie et mystique, ce texte propose d’explorer ce que cette petite glande peut nous apprendre sur la vision intérieure, la lumière et le chemin initiatique.

Il est des sujets dont la simple évocation suffit à faire sourire. La glande pinéale en fait partie. Petite glande nichée au centre du cerveau, elle a suscité, au fil des siècles, des interprétations qui vont de la spéculation philosophique la plus rigoureuse aux envolées ésotériques les plus audacieuses.

C’est peut-être précisément pour cela qu’elle mérite notre attention : parce qu’elle se situe à la frontière entre le visible et l’invisible, entre le mesurable et le symbolique, entre la biologie et l’initiation.

I. Une exception anatomique devenue symbole

Le cerveau humain est composé de deux hémisphères parfaitement symétriques. Au milieu de cette dualité, une exception : la glande pinéale, unique, solitaire, comme un point d’équilibre entre deux polarités.

Descartes, cherchant un lieu où l’âme et le corps pourraient se rencontrer, y vit un symbole d’unité. Non pas un organe magique, mais un centre, un point où se résout la dualité. On imagine son sourire aujourd’hui, en découvrant qu’on lui prête des théories qu’il n’a jamais écrites :

« Je voulais un symbole d’unité, pas une prise USB vers l’au-delà. »

Mais derrière l’humour demeure une intuition profonde : au cœur de nos contradictions, il existe un point d’unité.

II. L’œil d’Horus : voir autrement

Œil d'Horus
Oudjat – Œil d’Horus

Bien avant Descartes, l’Égypte ancienne représentait un œil mystérieux : l’œil d’Horus.

Symbole de vigilance, de protection et de vision intérieure, il évoque la capacité de percevoir ce qui échappe au regard profane. La ressemblance formelle entre cet œil et la représentation anatomique de la glande pinéale a nourri bien des interprétations. Mais qu’importe la biologie : ce qui nous intéresse, c’est la symbolique.

L’œil d’Horus nous rappelle que la véritable vision n’est pas celle qui capte la lumière extérieure, mais celle qui éclaire l’intérieur. C’est l’œil qui ne regarde pas : il voit.

III. L’Œil de la Création : présence du GADLU

Dans de nombreuses traditions, l’œil n’est pas seulement un organe de perception : il est le symbole de la conscience qui éclaire, de la Lumière qui ordonne, de la présence qui voit avant même que le monde soit visible.

En franc-maçonnerie, cet œil prend une dimension particulière :
il devient l’Œil de la Création, manifestation symbolique du Grand Architecte de l’Univers. Dans la Genèse, la première parole du Créateur est : « Que la lumière soit. »

On peut donc supposer que la glande pinéale n’est pas indispensable à l’apparition de la lumière… mais qu’elle peut nous aider à la reconnaître quand elle passe. Et comme la lumière fut créée avant l’homme, il est rassurant de savoir que le GADLU n’a pas attendu notre troisième œil pour éclairer le monde.

Cet œil n’est pas un regard qui juge, mais un regard qui met en ordre, qui donne sens, qui ouvre.

Ainsi, lorsque certaines traditions associent la glande pinéale au « troisième œil », il ne s’agit pas d’un pouvoir occulte, mais d’une invitation à participer à cette vision créatrice, à aligner notre regard intérieur sur la Lumière qui structure le monde.

La glande pinéale devient alors le symbole d’un point de contact entre :

•          la lumière extérieure et la lumière intérieure,
•          la création cosmique et la création personnelle,
•          l’ordre du monde et l’ordre que nous cherchons à établir en nous-mêmes.

Ouvrir cet œil intérieur, ce n’est pas accéder à un pouvoir, mais participer humblement à l’œuvre du GADLU :

éclairer, ordonner, harmoniser.

Interlude mystique : Maître Eckhart et l’œil intérieur

Maître Eckhart, ce grand mystique dominicain du XIIIᵉ siècle, disait que

« l’œil par lequel je vois Dieu est le même œil par lequel Dieu me voit. »

Il ne parlait évidemment pas de la glande pinéale, mais il avait compris quelque chose d’essentiel : la véritable vision n’est pas un acte de perception, mais un acte d’unité. Pour lui, voir vraiment, c’est se tenir dans ce point intérieur où le regard de l’homme et la lumière du divin se rencontrent. Si la glande pinéale est un symbole, alors elle pourrait représenter ce lieu silencieux où l’être humain cesse de regarder le monde pour commencer à se laisser éclairer par lui.

Et si Maître Eckhart avait connu le concept de “troisième œil”, il aurait probablement souri et répondu :

« Un seul œil suffit, pourvu qu’il soit tourné vers l’Essentiel. »

IV. La calcification moderne : mythe, réalité ou métaphore

On lit parfois que la glande pinéale se « calcifie » dans nos sociétés modernes. Certains y voient la main d’une élite cherchant à neutraliser notre éveil spirituel. Permettez-moi une hypothèse plus simple, et peut-être plus inquiétante :

si quelque chose menace notre vision intérieure, ce n’est pas un complot, mais la distraction permanente, la dispersion, le bruit, l’oubli de soi. La calcification la plus dangereuse n’est pas celle d’une glande, mais celle de notre attention, de notre discernement, de notre capacité à nous recueillir. Ce qui s’invite dans nos soirées, épaulé par les notifications et le tumulte du quotidien, endort notre vigilance mieux que n’importe quel fluor.

V. La glande pinéale comme symbole maçonnique

En loge, nous travaillons à ouvrir un œil qui n’est pas celui du profane.

Nous cherchons à voir :

•          au-delà des apparences,
•          au-delà des préjugés,
•          au-delà de nos propres illusions.

La glande pinéale, qu’on l’appelle troisième œil ou siège de l’âme, devient alors un symbole du centre, un point où se rencontrent :

•          la raison et l’intuition,
•          la lumière et l’ombre,
•          le haut et le bas,
•          le matériel et le spirituel.

Elle nous rappelle que l’initiation n’est pas un savoir extérieur, mais un éveil intérieur.

VI. Humour et vigilance : une sagesse maçonnique

Il serait tentant de prendre ce symbole au pied de la lettre, de lui prêter des pouvoirs extraordinaires, ou de chercher dans un recoin du cerveau ce que nous peinons à trouver dans notre cœur.

Saint Matthieu

L’Évangile selon Matthieu nous glisse pourtant un conseil plein de sagesse :

« Si ton œil est simple, tout ton corps sera dans la lumière. »

J’ignore si l’auteur pensait à la glande pinéale… mais il avait compris que la clarté intérieure ne dépend pas de la vue, mais de la vision. Et si l’œil doit être “simple”, c’est peut-être parce qu’un troisième œil complique un peu les choses.

L’humour n’est pas une fuite : c’est une manière de désamorcer les illusions pour mieux atteindre l’essentiel.

VII. Conclusion : ouvrir l’œil intérieur

La glande pinéale n’est peut-être qu’une petite glande, mais elle nous offre un grand enseignement :

voir autrement, voir plus loin, voir en soi. Elle nous rappelle que la lumière que nous cherchons n’est pas à l’extérieur, mais au centre. Et que ce centre, comme la glande pinéale, est unique, discret, et profondément silencieux. Si la glande pinéale est un symbole, alors elle nous invite à ouvrir ce troisième œil qui ne regarde pas le monde…

Mais nous regarde nous-mêmes.

Note de l’auteur

Si cette glande pinéale devait vraiment s’ouvrir, souhaitons-lui de le faire avec la même douceur qu’un matin d’été à Perpignan, lentement, sans se presser, et en évitant soigneusement les coups de chaud. On dit qu’elle serait un troisième œil : très bien. Mais qu’elle n’oublie pas de cligner un peu, car sous notre soleil, même un symbole peut se retrouver ébloui.

Alors, si cet œil intérieur nous aide à mieux nous voir nous‑mêmes, qu’il nous rappelle aussi quand il est temps de parler, quand il est temps d’écouter… et quand il est temps d’aller boire un verre d’eau fraîche avant de confondre la Voûte étoilée avec le plafond de la loge. Au fond, la lumière est en nous, mais rien n’empêche de l’entretenir avec un peu d’ombre, un peu d’humour, et beaucoup de fraternité.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Gérard Lefèvre
Gérard Lefèvre
En parlant de plume, savez- vous que l’expression “être léger comme une plume” signifie ne pas peser plus lourd qu’une plume et pouvoir soulever quelqu’un ou quelque chose avec une grande facilité ? C’est une belle métaphore pour exprimer la légèreté et la facilité. Et puis, être une plume peut aussi signifier autre chose. On n’est pas seulement « plume », on est « plume de… ». Parfois, on propose à quelqu’un qui a une audience, un public, et pas forcément le temps, ou parfois pas forcément la compétence d’écrire pour être compris et convaincant à l’oral. Alors, que choisir? Être ou ne pas être une plume ? Gérard Lefèvre Orient de Perpignan

Articles en relation avec ce sujet

Titre du document

DERNIERS ARTICLES