jeu 02 octobre 2025 - 21:10

Grand Prieuré Rectifié de France – Saint-Michel 2025, Chevaliers fantômes

Il arrive que la fête, lieu de cohésion, révèle par sa vacuité l’état du chantier. La Saint-Michel 2025 du Grand Prieuré Rectifié de France (GPRF), célébrée le samedi 27 septembre dans le Grand Temple Jean Mons de la Grande Loge Nationale Française (GLNF), a eu la pâleur d’un écu terni.

Nous y avons vu moins une célébration qu’un miroir : l’épure d’une crise devenue forme, où le Rite ne parvient plus à tenir l’âme. Les absences y parlaient plus fort que les présences ; la liturgie, réduite à l’ossature, n’a guère dépassé une heure.

Dans les travées, une assistance clairsemée, une quarantaine de Chevalier Bienfaisance de la Cité Sainte (CBCS) et d’Écuyer Novice (EN). pour une juridiction qui en compte cinq cents : autant dire une garde en demi-maillets.

Croix CBCS

L’absence la plus éloquente fut celle de la Grande Loge Nationale Française — silence lourd de sens. Aucun délégué, et, en filigrane, l’évidence d’un lien distendu. Faut-il y lire un message à peine voilé : « remettez de l’ordre, et nous reviendrons » ?

La plupart des juridictions de hauts grades avaient, elles aussi, renoncé au déplacement. Les colonnes paraissaient orphelines, comme si la voûte étoilée elle-même hésitait à se laisser allumer. Nous savons pourtant ce que signifie l’archange Michel pour le Régime : figure de psychostasie, équilibre de l’acier et de la plume, défense du Sanctuaire intérieur. Ici, la balance symbolique ne trouvait plus son contre-poids.

Nous ne feindrons pas de découvrir la cause de cette désaffection : depuis des semaines, le GPRF traverse une tourmente publique où se mêlent griefs de gouvernance, documents contestés et démissions. Deux enquêtes de 450.fm ont détaillé les étapes et les responsabilités alléguées ; elles ont nourri le débat maçonnique, mais elles ont surtout creusé une fracture de confiance dont la Saint-Michel a offert la matérialité : des places vides.

Le cérémonial s’est donc déroulé comme un rite sous perfusion. Quelques Grands Prieurés amis avaient tenu parole ; d’autres, annoncés, n’étaient pas au rendez-vous. L’épisode ivoirien, lui, a laissé perplexe : annoncé empêché, le Grand Prieuré de Côte d’Ivoire a tout de même fait entendre une voix chaleureuse, remerciant l’assistance et rappelant la fraternité des liens, tout en indiquant poursuivre sa route vers Nice pour une réception à la Grande Profession. Or nous savons, par l’usage du monde Rectifié, que la Profession et la Grande Profession ne se publient ni ne se revendiquent dans les discours ; elles se reçoivent dans la discrétion qui est l’âme même de leur grâce. Les nommer ainsi en scène publique, c’est faire vaciller le voile qui protège la chambre la plus intérieure.

Cette Saint-Michel, au lieu d’être l’armure qui rassemble, aura donc été une éprouvette : elle a mesuré la densité fraternelle présente, et le résultat est apparu trop léger. L’absence assumée de la GLNF, l’évaporation de nombreuses juridictions, le format réduit de la tenue et sa brièveté, tout cela compose un signal : le Régime ne peut vivre de mots si la main fraternelle se retire. Le glaive de Michel n’est tranchant que si la communauté accepte d’en être le fourreau ; sans fourreau, l’acier s’émousse.

Baucent

Pourtant, rien n’interdit la rémission. Le Rectifié demeure une école de droiture. Il enseigne que l’Ordre extérieur n’a de sens que s’il obéit à l’Ordre intérieur. Réparer, ici, ne sera pas affaire de communication mais de vérité : vérité des actes, vérité des procédures, vérité des signatures et des responsabilités. La fraternité ne se décrète pas par communiqué ! Elle se reconquiert au prix d’un examen de conscience collectif, d’une restitution des rôles à leur juste place, d’un renoncement aux arguties pour retrouver l’esprit du vœu. Les leçons tirées des dernières révélations publiques doivent être entendues, point par point, sans hâte défensive ni posture d’orgueil.

Préparatif de la St-Michel une assistance très très clairsemée…

Nous avons vu un Temple où la lumière circulait mal ; nous souhaitons un Temple où elle respire à nouveau. La Saint-Michel, dans le calendrier du Régime, n’est pas seulement une date : c’est une métaphore du discernement. Peser, séparer, remettre chaque chose à sa juste mesure, puis relever l’épée non pour frapper, mais pour protéger le faible et la vérité. Que cette fête manquée soit prise non comme une humiliation, mais comme une injonction : revenir à l’esprit chevaleresque, préférer la rectitude à la ruse, le service à la manœuvre, la règle vécue à la règle brandie.

À ceux qui ont tenu être présents malgré la dispersion des forces, nous adressons une parole de fraternité lucide. À ceux qui se sont abstenus, une invitation…

Si la crise vous a fait douter, dites-le  !

Si elle vous a blessés, qu’on vous entende  !

Si elle vous a révulsés, qu’on vous répare !

Et si elle vous a simplement fatigués, qu’on vous laisse le temps de revenir !

Le Rectifié n’est pas un parti ; c’est une ascèse. Il n’appartient à personne, pas même à ceux qui le dirigent temporairement ; il appartient à la promesse qu’il nous fait faire : devenir des hommes droits, jusque dans l’inconfort de la vérité.

Ce samedi 27 septembre, la fête de l’Archange a montré un vide mais, demain, elle peut redevenir une montée. Que l’on éteigne les querelles, que l’on rallume la lampe. Alors, peut-être, l’année prochaine, la Saint-Michel ne sera plus un sabre sans lame, mais une épée polie par la main de tous.

Illustrations : Facebook – Chapitre prieural de la Saint-Michel 2025

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2 Commentaires

  1. « Et c’est là seulement ou vous pouvez la trouver »,….tant qu’on ira pas l’y chercher pensant la trouver dans la pyramide des grades , vous ne serez que des coquilles vides, pardon magnifiques coquilles vides

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Charles-Albert Delatour
Charles-Albert Delatour
Ancien consultant dans le domaine de la santé, Charles-Albert Delatour, reconnu pour sa bienveillance et son dévouement envers les autres, exerce aujourd’hui en tant que cadre de santé au sein d'un grand hôpital régional. Passionné par l'histoire des organisations secrètes, il est juriste de formation et titulaire d’un Master en droit de l'Université de Bordeaux. Il a été initié dans une grande obédience il y a plus de trente ans et maçonne aujourd'hui au Rite Français philosophique, dernier Rite Français né au Grand Orient de France.

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