Dans l’univers clos et coûteux de la Scientologie, Xenu occupe une place centrale, non pas comme un pilier de sagesse philosophique, mais comme un secret jalousement gardé, révélé aux adeptes les plus dévoués – et les plus endettés. Ce personnage galactique, inventé par L. Ron Hubbard, le fondateur de cette organisation souvent qualifiée de secte, incarne à la fois l’absurdité d’un récit de science-fiction recyclé en dogme religieux et les mécanismes de contrôle qui piègent les fidèles.

À l’opposé du mythe fondateur des Francs-maçons – le meurtre d’Hiram Abiff, symbole profond de palingénésie perpétuelle et de renaissance spirituelle –, l’histoire de Xenu n’est qu’une manipulation grossière, conçue pour exploiter les vulnérabilités humaines au nom d’un enrichissement personnel. Cet article explore Xenu, son rôle dans les grades avancés de la Scientologie, les dangers inhérents à cette pratique, et le ridicule d’un mythe qui, loin d’élever l’âme, l’enchaîne à une fiction lucrative.
Xenu : Le dictateur galactique et son mythe ridicule

Imaginez un scénario digne d’un roman pulp des années 1950 : il y a 75 millions d’années, une confédération galactique de 76 planètes souffre d’une surpopulation effroyable – 178 milliards d’habitants par planète, rien que ça. Xenu, son dirigeant tyrannique, décide d’une solution radicale : il rassemble des milliards d’êtres, les embarque dans des vaisseaux ressemblant à des DC-8 (oui, les avions de ligne d’après-guerre), les transporte sur la Terre (alors appelée Teegeeack), les entasse autour de volcans, et les fait exploser avec des bombes à hydrogène. Les âmes immortelles de ces victimes, appelées « thetans« , sont ensuite capturées, lavées de leurs souvenirs sur Hawaï et aux Canaries, et implantées avec des faux souvenirs – dont le Christ ou les mythes de création – pour les piéger dans une prison éternelle. Ces thetans errants, ou « body thetans« , s’accrochent aujourd’hui aux humains, causant névroses, maladies et malheurs. Ridicule ? Absolument. C’est une pure invention de L. Ron Hubbard, auteur de science-fiction raté, qui l’a couchée sur papier en 1967 sous forme de manuscrit manuscrit, présenté comme une « découverte » spirituelle.

Ce récit, connu sous le nom de « space opera« , n’est pas une métaphore subtile ni une allégorie intemporelle. C’est du Hubbard pur jus : un mélange de paranoïa anti-psychiatrique, de réincarnations cosmiques et d’éléments volés à la SF des années 40. Hubbard, qui avait déjà publié des histoires comme Fear ou Final Blackout, recycle ici ses tropes favoris pour en faire un outil de contrôle. Et le ridicule culmine dans les détails : des bombes H dans des volcans (alors que la géologie contredit toute trace d’une telle catastrophe il y a 75 millions d’années), des thetans « collés » comme des parasites, et Xenu lui-même, emprisonné dans une montagne électrifiée depuis des millénaires. Comme l’écrit l’historien des religions Mikael Rothstein, c’est « la mythologie de base de la Scientologie », mais une qui « ajoute du carburant aux accusations selon lesquelles le système de Hubbard est le produit de sa créativité d’écrivain de SF plutôt que d’un théologien« . Des ex-Scientologues, comme ceux interrogés sur Reddit, admettent que même au niveau OT III, beaucoup rationalisent : « Ça enregistre sur l’E-mètre, donc peut-être vrai ? » Mais pour les critiques, c’est du délire pathétique, un « intellectual garbage » selon John W. Campbell, l’éditeur qui avait lancé Hubbard dans la SF.
L’importance de Xenu dans les grades de Scientologie : le dévoilement comme carotte

Pour les adeptes, Xenu n’est pas révélé d’emblée. La Scientologie suit un « Pont vers la Liberté Totale« , une progression payante où chaque niveau coûte une fortune – souvent plus de 100 000 dollars pour atteindre OT III. Les débutants passent par le « Dianetics » (pseudo-thérapie pour effacer les « engrammes » traumatiques), deviennent « Clear« , puis grimpent les niveaux Operating Thetan (OT). OT III, ou « Mur de Feu« , est le Graal : c’est là que l’on « découvre » Xenu via des documents secrets lus en solo, avec un avertissement sinistre de Hubbard : révéler prématurément ce savoir cause la pneumonie et la mort. (Aucun cas documenté, bien sûr.) Ce dévoilement est censé libérer les thetans parasites via un « auditing » intensif avec l’E-mètre (un détecteur de mensonges trafiqué), permettant d’atteindre une « liberté » spirituelle.

Pour les fidèles, c’est un moment pivotal : après des années d’investissement financier et émotionnel, Xenu explique tout – pourquoi vous souffrez, pourquoi le monde est fou. C’est une validation narcissique (« Vous êtes un thetan immortel piégé par un complot galactique !« ) qui renforce la loyauté. Mais c’est aussi une carotte : pour progresser au-delà (OT IV à VIII), il faut croire et « expérimenter » ce mythe comme réalité. Comme l’explique un ex-membre dans Going Clear de Lawrence Wright, c’est là que beaucoup craquent – ou s’enfoncent plus. Ce secret crée une élite : seuls les 5 % d’adeptes qui y accèdent se sentent « éclairés« , isolés des « wogs » (non-Scientologues). Pourtant, la Church nie publiquement Xenu, poursuivant en justice quiconque le diffuse, comme dans l’affaire Fishman en 1993 où les documents OT III fuitèrent au tribunal.
La Scientologie : une secte, ses adeptes et les dangers de sa pratique
Fondée en 1954 par Hubbard, la Scientologie se présente comme une « religion appliquée« , mélange de pseudo-science et de spiritualité. Ses adeptes – environ 50 000 actifs aujourd’hui, contre les 10 millions revendiqués – sont souvent des célébrités (Tom Cruise, John Travolta) recrutées pour leur aura, ou des vulnérables cherchant un sens. Les « Sea Org » (bras armé) signent des contrats d’un milliard d’années, travaillent 100 heures/semaine pour 50 dollars, et subissent un régime quasi-militaire. Mais derrière les sourires, c’est un culte dangereux, classé comme tel en France (rapport 1995) et en Allemagne (secte anticonstitutionnelle).

Les dangers ? Financiers d’abord : les cours coûtent des centaines de milliers de dollars, poussant à l’endettement ou à la vente de biens. Émotionnels ensuite : la « déconnexion » force à rompre avec les critiques familiaux, brisant des vies. Physiques : des ex-membres rapportent avortements forcés, maltraitance infantile, et même morts suspectes (comme Lisa McPherson en 1995, laissée à mourir en « Introspection Rundown« ). La Church traque les dissidents via « Fair Game » (politique officielle jusqu’en 1968) : harcèlement, diffamation, procès en cascade – plus de 2 500 contre l’IRS seul. En 2009, un tribunal français la condamna pour escroquerie. Comme le note le sociologue Stephen Kent, « c’est une entreprise lucrative masquée en religion« , avec des procès pour ruiner les opposants. Les adeptes, piégés par l’escalade cognitive (« J’ai tant investi, ça doit être vrai« ), risquent l’isolement total, la santé mentale ruinée, et pire.
Xenu vs. Hiram Abiff : ridicule manipulatoire contre sagesse symbolique

Ici réside le cœur de l’absurde : comparez Xenu au meurtre d’Hiram Abiff chez les Francs-maçons. Dans le 3e degré maçonnique, Hiram, architecte du Temple de Salomon, est assassiné par trois compagnons jaloux qui exigent les secrets des Maîtres. Refusant de trahir la vérité, il est frappé (perche, équerre, maillet) et enterré sous un acacia. Son corps est retrouvé, élevé, symbolisant la résurrection. Ce n’est pas une histoire littérale, mais une allégorie puissante de la palingénésie perpétuelle : la mort n’est pas fin, mais renaissance ; la fidélité à la vertu triomphe de la bassesse. Elle enseigne l’intégrité, la fraternité, et la construction de l’âme comme un temple intérieur – une leçon intemporelle, inspirée de mythes bibliques et égyptiens (Osiris), qui élève sans manipuler.

Xenu, lui, est l’antithèse : un produit de SF kitsch, créé par Hubbard pour justifier des « audits » payants contre des parasites invisibles. Là où Hiram inspire la quête éthique, Xenu piège dans la peur (pneumonie mystique) et l’illusion de pouvoir (libérez vos thetans pour 360 000 dollars !). C’est une récupération cynique : Hubbard, ruiné par ses échecs littéraires, transforma sa thérapie en religion pour l’exonération fiscale (obtenue en 1993 après des décennies de batailles). Comme l’analyse Alec Nevala-Lee dans Astounding, c’est « la fiction de Hubbard au service de la Scientologie » – un mensonge galactique pour un contrôle terrestre.
Conclusion : Fuir l’illusion pour la Vérité
Xenu n’est pas un secret libérateur, mais une chaîne dorée dans une secte qui prospère sur l’exploitation. Ses adeptes, séduits par la promesse d’immortalité cosmique, finissent souvent brisés financièrement et moralement. À l’inverse des Francs-maçons, dont le mythe d’Hiram nourrit une palingénésie authentique, la Scientologie de Hubbard est un mirage manipulateur. Si vous croisez un recruteur, rappelez-leur : un thetan libre n’a pas besoin de payer pour voler. Pour en savoir plus, lisez Going Clear ou visitez xenu.net – mais gare à la pneumonie imaginaire.
La vraie liberté ? Elle est dans le doute, pas dans les étoiles factices.