450.fm avait déjà pris soin de déconstruire un premier texte antimaçonnique de Riposte Laïque intitulé « La Franc-Maçonnerie et les libertés populaires », publié par Charles-Albert Delatour le 29 août 2024. Dans cette analyse critique, notre frère Charles-Albert dénonçait les failles et les manipulations présentes dans le discours de Riposte Laïque, dévoilant ainsi les biais et les motivations sous-jacentes de cette rhétorique antimaçonnique.
Pourtant, malgré ce debunkage approfondi, Riposte Laïque persiste dans ses attaques, comme en témoigne ce nouvel article de Jean Saunier, qui accuse la franc-maçonnerie de détruire le patriotisme et les fondements mêmes des nations.
Nous aussi, nous persistons et signons !
La lecture du texte intitulé « La franc-maçonnerie détruit le patriotisme » de Jean Saunier, publié sur le site Riposte Laïque, révèle une vision particulièrement critique et hostile envers la franc-maçonnerie, accusée de saper les fondements mêmes du patriotisme et de la nation. Ce texte s’inscrit dans une tradition polémique qui associe souvent la franc-maçonnerie à des forces conspiratrices visant à établir un nouvel ordre mondial au détriment des valeurs traditionnelles, des nations et de la religion.
Riposte Laïque : Un vecteur de l’extrême droite identitaire
Avant d’entrer dans l’analyse du texte, il est essentiel de comprendre l’origine et l’idéologie du site Riposte Laïque. Fondé en 2007, Riposte Laïque se présente comme un site défendant la laïcité et les valeurs républicaines, mais a progressivement dérivé vers une position identitaire, nationaliste et islamophobe. Le site est connu pour ses prises de position radicales, souvent teintées d’un nationalisme exacerbé et d’une hostilité virulente envers l’immigration, l’islam, et, comme ici, la franc-maçonnerie.
Le texte de Jean Saunier – /!\ ne pas confondre avec le syndicaliste, écrivain, ésotériste et franc-maçon Jean Saunier (1939-1992) –, s’inscrit parfaitement dans cette rhétorique, exacerbant les peurs liées à la perte d’identité nationale et à l’effacement des frontières, tout en désignant la franc-maçonnerie comme l’ennemi ultime de la nation et de la foi.
La famille et la religion : Fondements du patriotisme
L’auteur commence par ancrer son argumentation dans une définition traditionnelle de la patrie, enracinée dans la famille, la religion et la tradition. Cette conception essentialiste de la nation, qui se fonde sur la continuité historique et la transmission des valeurs ancestrales, est opposée à l’universalisme prôné par la franc-maçonnerie. Selon Saunier, la religion (ou la transcendance) constitue le lien suprême qui unit les hommes, et c’est à travers elle que se définissent les droits, les devoirs, et les lois qui structurent la nation.
En évoquant Jean-Etienne-Marie Portalis et d’autres figures historiques, l’auteur cherche à légitimer son propos en s’appuyant sur des autorités reconnues, associant ainsi la défense de la patrie à la défense de la religion et des traditions.
La franc-maçonnerie : Une menace pour la nation
Le texte accuse les sociétés secrètes, et en particulier la franc-maçonnerie, de vouloir détruire les nations en s’attaquant à leurs fondements : la religion, la morale, la famille, la propriété et les lois. Cette accusation repose sur une vision conspirationniste de la franc-maçonnerie, vue comme un réseau international œuvrant dans l’ombre pour instaurer un “vaste empire” universel où les frontières seraient abolies et les identités nationales dissoutes.
L’auteur cite plusieurs francs-maçons, comme Jean-Marie Ragon et Adam Weishaupt, pour illustrer son propos, les présentant comme les architectes d’un projet mondialiste qui vise à éradiquer le patriotisme en le remplaçant par un cosmopolitisme déshumanisant. Le but ultime de ce projet serait, selon Saunier, l’instauration d’une “République universelle” qui nierait les spécificités nationales et religieuses.
La destruction de l’identité nationale
Pour Jean Saunier, le patriotisme est intrinsèquement lié à une série de critères identitaires : le sol, la langue, la culture, la souveraineté et la religion. Ces éléments constitutifs de l’identité nationale seraient aujourd’hui menacés par les forces mondialistes et cosmopolites, largement influencées par la franc-maçonnerie. L’auteur voit dans l’effacement des frontières, la libre circulation des personnes, et le multiculturalisme des stratégies visant à détruire l’idée même de patrie.
En invoquant Martin Heidegger, Jean Saunier tente de donner une dimension philosophique à son discours. Il fait référence au concept de « Gestell » (arraisonnement), pour décrire comment le cosmopolitisme utilitariste priverait l’homme de sa patrie, réduisant ainsi l’existence humaine à une simple fonction utilitaire, déconnectée de toute transcendance.
Une vision manichéenne et réductrice
Le texte de Jean Saunier se caractérise par une vision manichéenne où la franc-maçonnerie incarne le mal absolu, responsable de la destruction des nations, des religions et des valeurs traditionnelles. Cette vision, profondément conspirationniste, repose sur une opposition binaire entre les « forces du mal » (la franc-maçonnerie, le mondialisme, le cosmopolitisme) et les « forces du bien » (le patriotisme, la religion, les traditions nationales).
Cette rhétorique simpliste ignore la complexité des dynamiques sociales, politiques et culturelles qui ont façonné l’histoire moderne. Elle occulte également les nombreux apports positifs de la franc-maçonnerie, notamment dans le domaine des droits de l’homme, de la liberté de conscience et de la tolérance.
Une critique radicale du mondialisme en guise de conclusion
En somme, le texte de Jean Saunier est une critique virulente du mondialisme et du cosmopolitisme, qu’il associe à la franc-maçonnerie. Cette critique s’inscrit dans une vision nationaliste et identitaire du monde, où toute tentative d’universaliser les droits ou de promouvoir une fraternité humaine au-delà des frontières est perçue comme une menace existentielle pour les nations.
La lecture de ce texte doit toutefois être abordée avec prudence, car il repose sur des prémisses conspirationnistes et manichéennes qui simplifient à l’excès des réalités historiques et sociales complexes. Si la franc-maçonnerie a effectivement joué un rôle dans la promotion de valeurs universelles, il est abusif de la tenir pour responsable de la disparition des identités nationales ou religieuses. Ce texte de Riposte Laïque reflète davantage les angoisses identitaires contemporaines que la réalité des faits historiques ou politiques.
Le texte de Riposte Laïque, in extenso.