De notre confrère france3-regions.francetvinfo.fr – Par Julia Sereni
Sylvain Zeghni, Grand Maître National de la Fédération Française de l’Ordre Maçonnique Le Droit Humain, était à Bastia ce jeudi 27 juin, pour une conférence publique destinée à mieux faire connaître l’obédience sur l’île. Il a répondu aux questions de France 3 Corse Via Stella.
France 3 Corse Via Stella : Vous êtes à la tête de l’ordre maçonnique Le Droit Humain, comment le définiriez-vous en quelques mots ?
Sylvain Zeghni : Le Droit Humain a été fondé en 1893 par Maria Deraisme et Georges Martin. Cette obédience vise à promouvoir la mixité, c’est d’ailleurs la première obédience mixte au monde. Sa deuxième caractéristique est d’être internationale : nous sommes présents dans 60 pays des cinq continents.
Il y a donc une mixité des genres, mais aussi des cultures. Nous avons 15 000 membres en France, 30 000 à travers le monde. En Corse, nous comptons 240 membres sur un total de 2 000 maçons sur l’île environ, toutes obédiences confondues, ce qui représente donc 10% des maçons insulaires.
Vous l’avez dit, le Droit Humain se différencie notamment des autres obédiences par sa mixité, quel est l’apport de cette mixité selon vous ?
La mixité, c’est apprendre à penser en commun, à dépasser les tabous, les idées reçues. Cela peut paraître très simple de nos jours, mais en 1893, il faut rappeler que les femmes étaient considérées comme mineures et n’avaient pas le droit de vote. Aujourd’hui, il y a d’autres obédiences mixtes, le travail se fait de façon naturelle, mais lorsque nous l’avons développée il y a 130 ans, la mixité était une révolution.
L’idée, c’est de réfléchir ensemble et non plus chacun de son côté. C’est pourquoi la mixité n’est pas uniquement celle des genres, elle est aussi sociale et culturelle : nous sommes une obédience où toutes les catégories sociales sont représentées et toutes les cultures également, puisque nous sommes présents à l’international.
Vous organisez des conférences publiques à travers le pays sur les Jeux Olympiques ou encore sur le réchauffement climatique, c’est une volonté de s’ouvrir et d’aller vers tous les publics ?
C’est une démarche de démystification de ce qu’est la franc-maçonnerie, c’est-à-dire un cheminement personnel vers son propre perfectionnement intellectuel, moral et spirituel, mais qui s’ouvre aussi sur la société, pour l’améliorer. L’idée est de s’ouvrir afin de provoquer, de stimuler l’intérêt pour la franc-maçonnerie.
C’est l’occasion aussi de rappeler que nous intervenons sur des sujets philosophiques mais également plus sociétaux : les Jeux Olympiques, la fin de vie, l’environnement… Cela nous paraît important de montrer que les francs-maçons ne sont pas des gens qui se réunissent pour parler entre eux de thèmes philosophiques, mais des gens ouverts sur le monde qui réfléchissent à des sujets contemporains, qui touchent l’ensemble de la population.
Dans le contexte politique particulier que connaît la France, marqué par la dissolution de l’Assemblée nationale et les nouvelles élections législatives qui en découlent, entendez-vous participer au débat public ?
Une obédience n’a pas vocation à se positionner sur un plan politique, mais à rappeler un certain nombre de valeurs auxquelles nous sommes attachés : liberté, égalité, fraternité, laïcité, ouverture vers le monde.
Nous défendons ces principes, mais nous ne donnons pas de consignes de vote. En revanche, nous appelons à exercer le droit de vote, et à être vigilants sur le respect des valeurs humanistes que nous défendons. C’est en ce sens que nous participons à la vie publique.
En Corse, avez-vous prévu d’échanger sur les sujets spécifiques à l’île, notamment le processus d’autonomie, même si celui-ci est en pause ?
Je ne suis pas un spécialiste de ces questions, mais effectivement, cela me semble important de parler des sujets qui préoccupent les hommes et femmes de l’île depuis plusieurs années. Ces questions, vues du continent, sont parfois traitées de manière simpliste, alors qu’il s’agit de véritables débats.
Mais il convient aussi de réfléchir sur l’ensemble des sujets qui concernent les Corses. À ce titre, échanger avec des acteurs de la vie politique et sociale insulaire est primordial.
Outre les questions institutionnelles, considérez-vous que certains sujets doivent être abordés particulièrement sur l’île ?
Les problématiques environnementales, migratoires, tout ce qui peut concerner la Corse sera abordé, afin de voir comment nous pouvons échanger avec la société insulaire pour atteindre une forme de consensus.
Je pense notamment aux questions environnementales en Méditerranée : ces phénomènes ont des implications encore incertaines, mais peuvent pourtant avoir des conséquences multiples, notamment sur l’économie corse. Il faut pouvoir en discuter et déterminer comment résoudre ces problèmes, ou en tout cas essayer de les circonvenir.