jeu 25 avril 2024 - 23:04

Gilbert Bonnet : Comment imprimerie et initiation conduisent à l’édition ?

42 ans d’engagement, de passions et de fidélité à la Tradition primordiale. L’engagement au singulier c’est normal. Passions au pluriel pour Gilbert Bonnet, rien de plus normal non plus. Passions de la maçonnerie, passion de l’édition, passion des cathares, de l’alchimie, de la tradition… et plus encore. L’histoire de ses passions se raconte à la façon d’un conte, pas forcément de fée quoi que !

450FM – Votre chemin de vie se conjugue très étroitement entre vie initiatique et vie professionnelle. Les deux semblent indissociables.

G.B. – En effet, ma vie s’est construite au travers de nombreux facteurs différents, de signes que j’ai su prendre en compte, de rencontres, de lectures, d’engagement, de découvertes… Pourtant ma route semblait toute tracée : je serais imprimeur comme mon père ! Eléve peu passionné, à 14 ans je souhaite déjà travailler, être opératif. Un parcours un peu détourné, pour avoir enfin mon CAP d’imprimeur. L’imprimerie, ne me passionnait toujours pas, il fallait évoluer, abandonner l’offset, les vieilles typos… Hélas mon père …… pas d’accord. J’allais trouver, au fil de mes vacances en Ardèche, une revue : « objectif sud » ouverte à la page d’un article sur Montségur. Peu de temps après à la bibliothèque du même village, voilà que dans la vitrine un ouvrage datant de 1244 réédité chez Gallimard sur Montségur (le bûcher de Montségur par Zoé Oldenberg). Deux fois Montségur se met devant moi, est-ce un hasard, est-ce un signe ? Je ne crois pas au hasard et suis très attentif aux signes. Au travers de ces deux lectures, je découvre à la fois le moyen-âge, le Catharisme, les troubadours et la langue occitane. Plus tard et tout au long de mon chemin, les signes ne cesseront de me « faire signe » ! Je deviens militant occitan au moment où je découvre l’hermétisme, les ouvrages de René Guénon et les auteurs qui ont continué à transmettre ses valeurs. J’étais à l’époque animé par une véritable Hétérodoxie. C’est en lisant, relisant encore et encore que je redécouvre la société traditionnelle, je reviens grâce à René Guénon vers une orthodoxie traditionnelle et, au travers des autres religions, telles l’hindouisme, l’islam, le protestantisme et autres, je me recentre au cœur de ma culture religieuse originelle, de ses valeurs et de ses richesses.

450FM – Pour l’ado qui a quitté l’école un peu tôt, vous êtes resté avide de savoir, une curiosité éclectique vous a toujours guidé et poussé à toujours apprendre, découvrir et peut-être tenter de relier votre travail à la finalité du produit. Imprimeur, le livre ne peut pas rester seulement un produit, une commande, un commerce. Cela ne correspond pas à la passion que vous nourrissez pour cet outil de connaissance et de liberté qu’est, le Livre au sens le plus noble.

G.B – Evidemment les livres m’ont donné ma liberté de penser, d’être, ils ont participé à ma construction personnelle. Plusieurs périodes se sont succédées dans le temps. J’ai eu une période Jungienne à travers les écrits d’Etienne Perrot que l’on peut dire être le « continuateur de Jung ». Guénon me guide vers la Tradition Primordiale. Ce concept se référant aux mythes fondateurs des différentes traditions sacrées de l’humanité, me sied et me correspond. Mais voilà qu’à la trentaine, l’imprimerie me rattrape totalement, mon père malade ne peut plus travailler, je dois assumer et prendre le relais. Ayant tout à apprendre, j’ai sauté à pieds joints dans l’évolution incontournable de l’imprimerie.

Depuis Gutenberg, peu d’évolution et maintenant tout va à la vitesse d’un TGV !! Je plonge dans cette révolution, fini l’offset, oui à la Pao et au numérique… Incroyable cette révolution qui continue… Plus en 20 ans qu’en 500 ans ! Petit à petit, je vais mieux comprendre l’imprimerie qui restait encore un travail de commandes pour des clients pas toujours exigeants, mais toujours pressés. Mon immersion dans ce monde a été difficile jusqu’au moment, où je prends conscience de la valeur, de la beauté, de la puissance du Livre. J’aimais les livres d’exception, les beaux papiers, les typos originales, originelles. Je recherchais toujours à acquérir de beaux ouvrages, certes toujours en rapport, avec mes centres d’intérêts comme l’initiation, l’alchimie, la tradition,… Un livre n’est pas seulement un livre, il est un objet d’art, de connaissance, de plaisir de transmission. J’ai acquis tant et tant d’ouvrages qu’en déménageant, me voilà obligé de disperser mes livres : un garage devenu bibliothèque, un espace de rangement transformé en étagères pleines de livres…… un peu triste de ne pas avoir pu réunir mes acquisitions, de ne pas rassembler ce qui est épars !

450FM – Quelques décennies plus tard, ce métier d’imprimeur vous l’aimez et vous le célébrez, et sans cette imprimerie imposée les éditions Alcor  seraient-elles nées ?

G.B. – Un déclic me fait comprendre que tous ce livres magnifiques avaient besoin d’un imprimeur attentif, passionné. Mon métier est devenu très important, grâce à mon savoir faire j’allais pouvoir redonner vie, prolonger la vie de certains ouvrages. Je venais de donner du sens à un métier qui en avait peu jusqu’à ce jour. Le premier ouvrage paru aux éditions ALCOR en 2015 « Le Mystère des Cathédrales » de Fulcanelli. Je découvre en même temps l’Alpha et l’Oméga chez Fulcanelli, dont tout commence et fini à Marseille avec Vierge noire de Saint Victor et  cierges verts, dont l’auteur ne manque pas de rappeler la célébration d’une tradition ancestrale remontant à l’an 1OOO grâce au moine bénédictin Isarn. Fête célébrée 40 jours après la naissance du Christ, le 12 février. Pour avoir lu et relu Fulcanelli , force est de constater qu’il y a plusieurs niveaux de lecture. Il donne toutes les clés dans les lithos et dans les textes. Je m’égare chaque fois que je commence à parler d’un auteur ou d’un ouvrage . Donc, je reviens à ce premier né chez ALCOR. Il fallait racheter les droits, ce qui est à la fois onéreux et difficile. Mais telle est ma volonté et ma détermination : ne pas faire de reprise, car le résultat n’a rien à voir avec la réédition, recomposition à l’identique. On traque le même papier, la même typo et on travaille à la césure près, à la virgule, au saut de page près. Les livres de chez ALCOR ne se lisent, ni sur un banc, ni sur une plage mais pour en tirer le plus grand plaisir l’idéal : s’installer devant un bureau qui sent bon la cire, une table de bibliothèque, un bureau, un lutrin. Lire c’est se mettre en situation de réception, d’une chose précieuse. Je reste convaincu que toute cette attention, ce travail minutieux que l’on met en œuvre fidélise nos acheteurs qui étaient très peu nombreux au début et le sont de plus en plus. Ils disent apprécier la qualité, le savoir-faire de ces livres qui pour eux aussi deviennent des objets d’art.

Le plaisir de travailler sur de tels ouvrages n’est pas un hasard non plus. C’est un peu redonner de la vie à des œuvres oubliées, peu connues ou méconnues, un vrai bonheur que de transmettre. «  Le Bestiaire du Christ », Une reprise fidèle de l’édition originale parue chez Desclée de Brouwer en 1940. Le livre par excellence au format plus que généreux, avec ses 1018 pages. Je me sens aujourd’hui totalement imprimeur-éditeur. Ces deux professions devenues pour moi indissociables prennent tous leurs sens et donnent du sens à mon travail.

Certes, vous l’avez compris, seul, jamais Alcor aurait pu faire tout ce travail. Daniel Fassino m’accompagne dans toutes mes « folies » il est l’épine dorsale, il maquette, recompose……… et aussi Philippe Subrini, qui à la façon du Troubadour va proposer nos ouvrages partout,où il est présent.

450FM – Il me semble que vous éditez aussi une revue semestrielle : Liber. Là aussi des ouvrages de belle facture.

G.B. – C’est notre savoir-faire et le petit succès de la maison d’édition qui nous a poussés à fonder cette revue avec Eric Unger. Un peu de fierté que de recevoir des propositions d’articles pour la revue LIBER. Une reconnaissance de notre passion et de notre travail. La revue à trois thématiques rédactionnelles :

Connaissance (religion &  spiritualité)

Amour (Agapé, Caritas)

Action (Témoigner et prouver que connaissance et amour génèrent des actions toujours positives.)

Un peu de poésie pour terminer, pourquoi le nom d’ALCOR ? Tout simplement pour cette petite étoile nichée au sein de la constellation de la Grande Ourse. Son nom Alcor d’origine arabe signifie Le Cavalier, elle servait de test d’acuité visuelle aux archers de Genghis Khan et de Charles Quint. Alcor, c’est aussi la clé du mystère du trésor des rois de France de Maurice Leblanc dans « la Comtesse de Cagliostro »

Editions ALCOR

1 rue de Ramatuelle

13007 Marseille

06 03 24 78 39

contact@alcor-editions.fr  

http://www.alcor-editions.fr

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Magali Aimé
Magali Aimé
Un parcours atypique conduit Magali Aimé de son Sud natal à Paris pour y découvrir le monde de la communication et du journalisme. Elle a collaboré à différents supports : Gault Millau, Côté Sud, Génération Santé, La Marseillaise. Elle enseignera dans des écoles de communication à Paris et à Aix- en-Provence. C’est à Paris qu’elle sera initiée il y a quinze ans, à la Grande Loge féminine de France. Auteure aux éditions Dervy depuis 2009 avec Les vignes de la Franc-Maçonnerie, Femme et Franc-maçonne. Publications : - Premier Surveillant que faire avec les Compagnons ? - Dervy 2015 - Quelle musique en Loge ? Dervy 2017

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